Is it really you? [Barry&Serena]

Décidément, je crois que où que j'aille, les ennuis ne tardent jamais vraiment à me suivre. D'aucuns diraient que je dois tenir ça de mon père, étant donné que pour courir autant qu'il a pu le faire, fallait être un de ces aimants à emmerdes comme on en fait plus. D'accord, c'est peut-être l'excuse de merde qu'un gosse de dix ans s'est mis dans le crâne pour justifier l'absence de son paternel, allez savoir. Bref, on oublie l'idée d'aller du coté du quartier des affaires depuis qu'il y a un gouffre en lieu et place des immeubles (d'accord, j'avais pas non plus grand chose à foutre dans ce quartier à la base), donc faire le tour du quartier avant de s'offrir un brin de route avec la moto s'est imposé comme la bonne idée de la journée.

Et bien sur, quand on est amoureux de la bécane comme je le suis, on ne peut pas ne pas tiquer sur un rassemblement de deux-roues devant un bar sans s'y attarder. Oui, ça fait moins de dix minutes que j'ai démarré le moteur, mais la curiosité l'emporte autant, sans doute, que le besoin de voir du monde, pour une fois. La pleine lune est passée d'une semaine, il y a encore le temps avant que je doive songer à ne pas laisser mes émotions exploser dès qu'on met un mot plus haut que l'autre à coté de moi. Je vous le donne en mile, c'est chiant comme calendrier. Je fais donc monter ma moto sur le trottoir à coté des autres avant de couper le moteur et la poser sur sa béquille pour aller jeter un œil à l'intérieur. Où je finis par aller m'installer au bar en laissant mes oreilles trainer autour de moi. En général dans ces rades, on arrive toujours à choper la conversation au vol, qu'on soit du coin ou pas, pas besoin de chercher à s'y engouffrer volontairement.

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En huit ans dans cette ville, j'en ai vu des choses, j'en ai croisés des gens sympa à qui je ne me suis pas trop attachés. Avoir des liens, c'est important, c'est même primordial. Alors je fais le minimum pour ma santé mentale, sans pour autant mettre les autres en danger.

Du coup, quand je suis rentrée dans ce club de bikers la première fois, je me suis très vite trouver quelques relations. Je ne fais pas partie de leur groupe, mais il me propose certaines balade à moto et quand y a des soirées comme aujourd'hui, ils me proposent et si je peux, je viens. J'avais quelques connaissances que je me refusais d'appeler amis, mais qui en sont en réalité.
Plus tôt dans la semaine, j'avais été contacté par l'une des filles du club. J'avais tout de suite accepté, en me disant qu'après une semaine de boulot ça me ferais le plus grand bien. C'est donc une heure plus tôt que j'ai mit les pieds à Canaryville. Je me gare devant et rentre comme dans une deuxième maison. Je suis accueillie comme une habituée, c'est assez agréable à ressentir pour quelqu'un comme moi qui a plutôt prit l'habitude d'être rejetée. Oui je sais c'est du passé tout ça, mais ça s'oublie pas si facilement qu'on le pense. Surtout qu'avec les années, je l'ai entretenu cet effet.

Je commande une bière au bar et je vais saluer les gens que je connais. Je suis contente d'être là. Ils sont un peu comme une deuxième famille, même si je ne me l'avouerais probablement jamais Dans le fond, ils me rappellent le groupe de sorciers rencontrés à l'époque où j'ai quitté la Nouvelle Orléans, le principe était un peu le même.
Il y a plusieurs petits groupes qui discutent, principalement motos, mais ça parle aussi politique, motos, matériels, motos, prochain casse... Oui bon bin on les refera pas les mecs qu'est-ce que vous voulez ?

Des copines me proposent un billard, j'accepte avec joie. Je fais une première partie, que je perds évidemment (ça aussi c'est une habitude), mais je m'amuse bien. Je me fais légèrement draguer - oui bin pour votre gouverne je ne suis pas rester abstinente pendant dix ans. On a dit "ne pas s'attacher", on a pas dit "ne pas vivre". Oui, oui pour moi il y a une petite mais significative différence. J'accepte tout sourire le verre qu'il me paie. Nous discutons un moment, avant que je ne sois conviée avec force pour un second round. Bon bin on discutera plus tard jeune homme... J'ai une mission, et je ne me défile jamais devant une mission, que dis-je ? Un défi ! Elles me laissent commencer, pas sure que ce soit un avantage avec mon faible niveau, mais bon c'est déjà ça qu'elles auront pas, potentiellement.
Je tourne le dos à la porte lorsque le nouveau rentre. Je ne le vois pas, je suis trop absorbée par ma tâche. Je vais bien finir par l'avoir cette bille 9 bon sang.

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Une bière finit par se matérialiser sur le comptoir devant moi et je place un billet à coté pour payer mon verre sans franchement m'attarder sur la serveuse qui l'a placé devant moi. Mon regard dérive plutôt sur le liquide ambré devant moi, avant que mon voisin ne se décide à entamer la conversation avec moi, et si je suis devenu assez peu sociable ces derniers mois, il y a deux choses sur lesquelles on peut me trouver pour discuter. Les motos et la mécanique. Et je prends aussi bien les conseils que je les donne, quand je les pense utiles et fiables en tout cas. Une conversation qui dure quelques minutes avant qu'un troisième homme à la droite de l'autre ne siffle à l'attention du "beau petit lot" en train de se faire laminer sur la table de billard. Je prends mon verre en main avant de me retourner pour voir de quoi il en retourne, buvant une gorgée avant de m'y intéresser vraiment. Et pour être honnête, heureusement que j'ai avalé avant de relever le regard, sinon j'y aurai gagné de m'étouffer et donc de me montrer tout sauf discret dans le paysage. Parce que si je n'avais pas reconnu cette tignasse et cette allure de dis, alors la voir se retourner aurait fini d'enfoncer le pieu. Non pardon, les pieux c'est pour les vampires. Cela dit, ça doit pas faire de bien à grand monde. Mais je m'égare. Sans doute parce que c'est plus simple de s'égarer que de réaliser que celle qui a attiré mon regard est aussi celle qui m'a brisé le cœur il y a une dizaine d'années. Dix ans, 1500 kilomètres, et la preuve que le monde est vraiment trop petit parfois.

"Nan mon pote, j'te l'déconseille."

Je me retourne face au bar pour replonger le nez dans mon verre, attirant du coup davantage l'attention de l'homme que ce que j'avais prévu.

"Elle et toi?"
"Y a une paye. Et j'te l'déconseille toujours. Allé, à la tienne."

Je finis mon verre avant de me retourner pour m'en aller, me retrouvant soudain nez à nez avec Serena. Et non, en dix ans, j'ai pas oublié son prénom, aucun risque.

"Salut."

Oui ben appelez ça "être pris au dépourvu" si vous le voulez, je m'attendais pas à la voir dans cette ville, ni ce soir, et une fois ce fait établi, je pensais avoir dix minutes de réflexion avant de me retrouver dans la situation présente.

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Le mec qui siffle, je l'entends et je me retourne même pas, sinon il se prend mon poing dans la tronche. Je perds lamentablement, comme la première fois, mais je souris tout de même. J'aime cette ambiance, cet univers. Je m'y sens à ma place. Les filles s'accordent pour me payer un verre et passer à autre chose, je ne peux pas refuser ça. Je me dirige donc vers le bar, lorsque je tombe nez à nez avec Barry Mickaels. C'est fou ça, qu'est-ce qu'il fiche ici ?

- Barry, qu'est-ce ... qu'est-ce que tu fais ici ?

Je ne comprends rien à ce qui se passe devant moi. Il est bel et bien là, j'en suis sûre. Il n'a rien d'un fantôme, même si je ne suis pas nécromancienne, je le sais bien. Tout cela est bien réel. C'est insensé !

Je fais du surplace, incapable de bouger le moindre orteil. Tout cela me dépasse. De drôles de sentiments que je ne parviens pas à décrypter passe dans mon esprit, mon cœur et même mon corps tout entier. je ne parviens pas à mettre de mot dessus. Je pensais avoir parcouru assez de chemin pour ne plus jamais le croiser. Pas après tout ce qu'il s'était passé entre nous, pas après avoir ressenti tout ce que j'avais ressenti pour lui, pas après tout ce que cela avait engendré pour mes pouvoirs et ma perte totale de contrôle.

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Je dois dire que je ne sais pas du tout comment réagir face à elle. Et pas parce que c'est loin derrière moi notre histoire (cela dit, dix ans c'est long), mais peut-être parce que c'est trop près justement. Du point de vue du mec qui n'a pas eu l'occasion de poser le mot "fin" sur l'histoire sans que cette dernière ne joue les filles de l'air, j'entends. Depuis le temps, je m'en suis remis, bien heureusement, mais pour être totalement honnête, ça n'a pas été sans mal.

"Comme tu le vois, j'bois un verre."

Oui non, j'ai assez bien compris que "ici" ne voulait pas dire "dans ce bar" mais "dans cette ville". Cela dit, c'est la première chose qui est sortie, de quoi faire remarquer qu'en dix ans, j'ai pas attrapé l'ombre d'un demi-cerveau, sans doute.

"Plutôt compliqué. Paraitrait que mon père est passé dans le coin alors, j'suis venu voir ce qu'il en était. Et toi?"

Si je zappe pas mal de trucs? Ben disons que "ma mère s'est fait tuer par un loup-garou qui m'a infecté, j'ai trouvé quelques trucs bizarres sur le sujet dans les papelards de mon paternel alors j'suis venu voir si il pouvait pas me dépanner" c'est pas franchement l'intro idéale à mes yeux. Si, si j'veux qu'elle me rit au nez en me précisant que les loups-garous n'existent que dans les films, ça peut être pas mal après tout...

"T'as toujours ta moto? J'ai pas fait gaffe en arrivant."

La tête qu'elle avait fait quand j'y ai offert cette moto. Y a les mecs qui adorent que leur copine fasse les potiches godiches derrière eux en jolie spectatrice pendant qu'ils font de la mécanique, et ceux qui la laisse volontiers mettre les mains dans le cambouis. Bon, elle m'a pas trop laissé le choix non plus, mais l'option 2 est de loin ma préférée. J'préfère partager les activités et les avis, et avoir parfois les désaccords qui vont avec, plutôt qu'étaler ma science sans vouloir de réaction en face... du coup, que ma copine ait sa propre moto plutôt que devoir partager mon porte bagage, c'était la suite logique quoi. Cela dit, ça fait une paye, elle a aussi bien pu en changer depuis, pour ce que j'en sais.

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J'ai un léger sourire pincé lorsqu'il me dit qu'il est là pour boire un verre. Oui ça j'aurais pu deviner. C'est tout lui ça, comme réponse.

- Ton père ? Tu le vois toujours aussi souvent qu'y a dix ans à ce que je vois.

Je veux pas être désagréable, j'ai juste du mal à rester moi-même là. C'est d'un compliqué.

- J'espère que t'en sauras plus !

Je ne sais pas trop quoi dire. C'est si soudain, si inattendue comme rencontre. J'ai parcouru quelques milliers de kilomètres pour m'éloigner de lui et de ma famille, enfin plutôt de tous les sentiments que j’éprouvais pour eux et les Etats-Unis sont si vaste, je ne me serais jamais douté que l'un d'eux pourraient être ici dans cette ville et encore moins dans ce bar. C'est fou !

- Comment va ta mère ? Elle est toujours à la Nouvelle Orléans ?

Bizarre comme question ? Je sais pas. Je ne la connaissais pas beaucoup, mais le peu, je l'aimais bien. Elle ne me faisait pas me sentir différente. En la voyant, j'avais comprit rapidement qui avait élevé Barry. Enfin il me l'avait déjà un peu expliqué, mais ça confirmait quoi.

- Oui. J'ai du faire pas mal de réparation depuis tu t'en doutes. J'ai pas eu le cœur de m'en séparer.

Pourquoi je dis ça moi ? Je suis bête. Après la façon dont je l'ai quitté, dont j'ai quitté cette ville, sans un mot, sans un retour en arrière, comment je peux dire ça. Lui, il a du se dire que j'en avais pas de cœur. J'aimerais pouvoir tout lui expliquer, mais ça le mettrais en danger et puis après dix ans, il y a tellement de chose qui on changer; peut-être trop de chose ? Je ne m'attends pas à ce qu'il me pardonne, même moi je ne l'ai pas fait.
J'avale difficilement ma salive, je ne sais plus ou me mettre. Je ne sais même pas si je dois rester ou partir ? Si je dois dire quelque chose ou me taire à jamais! Je vote pour le silence momentanée, ne sachant pas quoi dire.

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Concernant mon père, y a pas à dire, on a les mêmes avis et les mêmes infos. Enfin presque. En vérité, j'ai compris y a longtemps que fallait pas trop que j'compte sur lui dans ma vie. Mais avec ce que j'ai trouvé dans ses affaires trouvées dans le grenier et ma situation actuelle, ouais, je crois que pour une fois, j'ai besoin de lui. Cela dit, c'est un tel fantôme que je vais bientôt apprendre à gérer la pleine lune sans avoir eu besoin de son aide.

"Si on note que la dernière fois que je l'ai vu, il m'a fortement conseillé de pas trainer avec toi parce que, je cite, "ta grand-mère est une sorcière", ouais, j'devrais plutôt chercher une aiguille dans tout le foin du Kentucky."

Je manque lui demander si elle a repris des nouvelles de sa grand-mère depuis son départ d'ailleurs, quand elle met les deux pieds dans le plat en me demandant des nouvelles de ma mère. Non, c'est sur qu'elle ne risque pas de savoir, après tout, mais je pense que mon expression faciale parle pour moi avant que je ne lui offre la réponse toute prête que j'ai offert à peu près à tous ceux qui m'ont posé la question ces derniers mois.

"On s'est fait attaquer par un chien sauvage à la maison. J'm'en suis sorti. Pas elle. Ce qui explique que j'cherche à savoir si mon père est pas mort dans un fossé, sans doute."

Je fais l'impasse sur les condoléances et autres excuses qui suivent toujours, pour en avoir trop entendu en trop peu de temps, avant de poser la question que je devais poser au départ.

"Du coup toi, t'as des nouvelles de ta grand-mère et de ta sœur?"

J'en ai pris au début. Pis j'ai fait autre chose de ma vie, et petit à petit j'ai pris mes distances. Rajoutez que l'ex petit ami jarté comme du poisson pourri qui s'accroche à l'ex belle-famille, c'est pas franchement le rôle de ma vie. Même si j'dois avouer que j'ai beau avoir eu d'autres copines depuis elle, j'peux pas réprimer un sourire quand elle me dit avoir gardé la moto. Simplement parce que la moto, c'est un truc qu'on partageait tous les deux, et ça me déplait pas qu'elle l'ait gardé dans un coin de sa tête. Fin, qu'elle se rassure, j'suis clairement pas en train de me dire que ça signifie qu'elle m'a pas oublié en dix ans. Comme dit, ça a été dur, mais j'm'en suis remis.

"Ouais j'connais ça. La mienne doit plus avoir des mas de pièces d'origine à force."

Mais bon, y en a qui changent de bécane au moindre pépin, et d'autres qui s'obstinent à la garder en vie jusqu'au bout. J'suis de la deuxième catégorie, et incapable de passer à coté d'une ruine à moteur sans tenter de lui redonner vie. C'comme ça. Et si faut une preuve, j'parlerai de la voiture sur cales et au moteur déposé sur une palette qui prend à peu près toute la place dans mon garage.

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- Il avait raison sur ma grand-mère!

Je ne peux m'empêcher de rire. C'est un rire nerveux. Je suis vite à court de souffle, mais c'est plus fort que moi. Tout ma magie est entrain de bouillir en moi, alors croyez-moi il faut mieux que je ris plutôt que ma magie n'explose. Je suis partie pour ne pas lui faire de mal, ça serait dommage de commencer aujourd'hui.
Sa réponse suivante me glace le sang. Un chien sauvage ? Pas impossible, mais surprenant. Y a déjà eu des loups, des loups garou qui trainaient à la Nouvelle Orléans, je me demande, si ...Enfin si ça avait était un loup garou il ne serait probablement plus là pour en parler pas vrai ? Je garde cette pensée au plus profond de mon esprit, ne voulant pas envenimer les choses.

- Oh! Je suis navrée Barry.

Je le suis vraiment. Je n'avais pas souvent eu l'occasion de voir sa mère, mais le peu de fois nous avons eu des échanges plutôt cordiaux et il me semble qu'elle m'appréciait, enfin c'est ce qu'il me semblait en tout cas, je ne peux pas en avoir la certitude bien sur.

Il repasse rapidement à d'autres sujets. Je n'ose pas insister, je suis déjà allée trop loin avec ma question, mais en même temps je ne pouvais pas deviner. Je suis prise de maux de ventre : l'angoisse. Je ne sais plus où me mettre.

- J'espère que tu le retrouveras vite! Très peu en réalité. Je l'appelle deux fois par an, au moment de son anniversaire et de celui de ma soeur. Elle est plutôt en forme pour son âge; on a pas à se plaindre de ce côté là. Je suis jamais retournée la voir, j'en suis incapable, mais je sais qu'elle va bien et que Lola prend soin d'elle.

Je sais que je lui ai fait de la peine quand je suis partie, elle a su me le dire la première fois que j'ai osé l'appeler. Elle m'avait carrément raccrochée au nez, avant de rappeler deux minutes plus tard, dans cette cabine téléphonique que je n'avais pas pu quitter, les larmes aux bords des yeux. Mais je sais aussi que malgré la peine, elle a comprit pourquoi je l'ai fait. J'avais trois personnes que j'aimais le plus au monde, que je devais à tout prix protégée de moi-même. Étrange à dire, mais véridique.

- Je ... Je tiens à m'excuser d'être partit comme une voleuse. C'était pas contre toi... Je ... je tenais à ce que tu le saches.

Je le pense sincèrement. J'avais même pas eu le courage de lui dire aurevoir. J'étais la pire petite amie possible. Ca me pince le cœur rien que d'y repenser. Lui avait peut-être pas envisager notre vie future ensemble, mais moi comme toute gamine un peu trop rêveuse, je nous avais déjà envisagé une vie à deux, dans une charmante petite maison du quartier français, avec un chien et deux enfants (un garçon et une fille). On se serait marié et on aurait travaillé dans le même garage.
Mais tout ça est derrière nous. J'ai effacé d'un revers de main, ce rêve avant même que je n'ai eu le temps de lui en parler.

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Je hausse un sourcil, penchant légèrement la tête sur le coté par l'incompréhension, quand elle me dit que mon père avait raison au sujet de sa grand-mère. Une sorcière, vraiment?
Cependant, Serena rebondit sur un sujet qui m'est malheureusement plus douloureux qu'elle ne l'aurait surement pensé, et si je garde mon questionnement dans un coin de ma tête, je n'insiste pas pour le moment.

Quand elle m'offre à son tour les condoléances que tant de gens m'ont donné avant elle, je me contente de baisser le regard et de la remercier d'un geste de la main avant de changer de sujet. En vérité, je crois que je prends autant de risques à parler de sa famille qu'elle en a pris à parler de la mienne, mais heureusement pour moi, elle a l'air de dire que tout le monde va bien.

"Pour être honnête, j'vais pas passer ma vie là-dessus. Si j'le r'trouve pas, j'ferai sans lui. Comme d'hab."

Je hausse les épaules pour illustrer mon propos. Si j'ai toujours trop compté sur ma mère, j'ai également appris il y a longtemps que fallait pas compter sur mon père, alors non, j'aurai pas trop de mal à faire ma vie sans lui. Même si je suis pas sur de rester à Chicago pendant des années. Trop froid, trop humide, trop pollué... et mon coté loup affirme qu'il n'y a pas assez de forêt aux alentours. Sans déconner, à tourner dans le lotissement comme un chien errant, j'vais me taper une voiture un jour, ça va pas trainer... ou finir à la fourrière... ou me taper une voiture et me réveiller dans une cage... bref, ça craint.

"C'est top si tout le monde va bien de ton coté. Si j'peux me permettre, attends pas qu'il soit trop tard pour y retourner. J'aurai détesté ne pas être là pour ma mère, même si ça aide pas à dormir de l'avoir été."

J'en profite pour vider mon verre et repasser une commande d'un geste de la main, avant qu'elle ne m'envoie une bombe que je n'avais vraiment pas vu venir, je peux le dire en toute sincérité. J'en oublie ce verre que je comptais vider aussi rapidement que son grand frère, pour préférer planter mon regard dans le sien, totalement indécis sur la façon de réagir, quoi lui répondre ou simplement ce que je ressens suite à ses paroles.

"J'veux bien te croire. Ca aurait été un peu extrême de quitter la ville et ta famille simplement pour plus avoir à me croiser dans le quartier. C'est cette histoire de..."Je jette un regard à la ronde avant de poser une main sur son épaule pour l'attirer plus près de moi, de manière à lui parler sans être écouté. "Ce que mon père disait, à propos de ta grand-mère? Toi aussi t'en es une?"

Une supposition qui me convint de moins en moins à mesure que je l'exprime. Pourquoi serait-elle partie si sa famille était en capacité de l'aider avec un truc pareil? Qu'elle refuse de m'en parler à moi, qui aurait sans doute rigolé si on avait parlé magie, je peux le comprendre. Mais si je connaissais le moindre loup susceptible de m'aider avec mon problème de pleine lune, je ne cracherai pas sur le coup de main.

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Ne pas pouvoir compter sur son père ça me connait. Personnellement ces mes deux parents qui m'ont fait défaut toute ma vie. Je leur en ai voulu fut un temps et puis je me suis rendue compte que j'étais aussi bien sans eux. Les forcer à prendre leur rôle de parents n'auraient été agréable pour personne. Aujourd'hui, j'étais enfin passée à autre chose. Je pense qu'il s'en sortira aussi bien sans son père, mais bon ça c'est pas à moi de lui dire. Même si on était toujours ensemble aujourd'hui, et c'est loin d'être le cas. Je n'ai aucune raison de me dire qu'il le cherche pour autre chose que de "retrouver son père" et lui parler de sa mère.

Oui, si je peux, je le ferais, mais ce n'est clairement pas à l'ordre du jour. Rien qu'à le voir là, même si je le remercie d'avoir des retrouvailles dans le calme, qui me permette un minimum de tout garder sous contrôle, je reste méfiante.

De mon côté, je crois que j'ai eu la langue un peu trop pendue... qu'elle idée d'avoir dit qu'il avait raison pour ma grand-mère. Sur le coup, j'avais trouvé ça drôle. Comme n'importe quel enfant humain qui pourrait dire une telle chose des membres de sa famille, mais plus péjorativement, comme quelqu'un que l'on aime pas. Mais il a prit ça dans l'autre sens du terme, le véritable sens. Pourquoi a t'il pensait à ça aussi tôt ?

- Mon Dieu non, enfin pas que je sache!

Dis-je en tentant une boutade. Pas sure que ça prenne. Mais je peux pas non plus partir maintenant, ce serait un signe d'aveu. Comment je suis censée m'en sortir de celle-là ? Je remets un peu de cette distance qu'il a franchit entre nous lorsqu'il a évoqué ma grand-mère, enfin ce que je suis.

- Tu m'offres un verre ? On en a des choses à se dire, enfin si t'as le temps. Je veux pas t'arrêter dans ce que tu faisais.

Je vais essayer de détourner la conversation, on verra bien.

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Si j'étais sérieux en lui demandant si elle était une sorcière? Je suis un loup-garou, alors oui, plutôt. Malheureusement pour moi, sa réponse est négative, mais heureusement pour moi dans le même temps, elle a apparemment pensé que je plaisantais sur le sujet. Non parce que je ne suis pas sur de tenir longtemps sur la conversation "comment ça se fait que je crois dur comme fer à la magie?" pour être honnête.
Décidant de continuer un peu dans la plaisanterie, d'oublier un peu qu'elle m'a brisé le cœur dix ans en arrière, je me saisis d'un bâton à cocktail dans un verre vide abandonné sur le bar pour mieux le tenir comme une baguette magique.

"N'empêche, ça me botterait si c'était vrai. Comme dans Harry Potter. Wingardium Leviosa."

Et le bon mouvement de "baguette" qui va avec. Ouais, j'suis peut-être à moitié geek sur les bords. Entre la mécanique et les virées en moto, ou entre les soirées pizza et les nuits de pleine lune. Disons que j'connais mes classiques. Mais je remarque assez vite que ça n'a pas franchement l'air de l'amuser, alors, plutôt que de devenir définitivement lourd, je repose le bâton dans son verre, clôturant ainsi le sujet.

"Pardon. Et ouep, bien sur que j't'offre un verre. En revanche, j'vais attendre un peu avant d'en reprendre un. Que les deux... ou trois, premiers soient un peu passés."

Non, je ne suis pas bourré, et je ne ressens d'ailleurs pas franchement d'effets dus à ces verres dont je parle, mais je sais que je rentre en moto, et je connais mes capacités en ce qui concerne la bouteille. Quitte à avoir une conversation franche avec elle, je compte bien avoir les idées claires. J'viderai une bouteille plus tard si besoin. Et j'ferai confiance à Ghilian pour me ramener dans son cercueil roulant... à la réflexion, si j'en venais vraiment à rouler sous la table, je préfèrerai encore retrouver mon chemin à pieds.

"Et j'ai toujours le temps. De base, j'comptais me faire une virée sur ma bécane, et j'suis tombé sur ce rade. Alors tu vois, j'ai toute ma journée si j'veux."

Si je laisse par la même occasion filtrer l'idée que personne n'attend mon retour chez moi? C'était pas intentionnel, mais dans le coup, oui, je pense que "j'ai pas d'heure pour rentrer" c'est assez clair sur le fait que y a ni chat ni chien chez moi, alors ne parlons même pas d'une femme ou de gosses.

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- Je préfère les sorcières plus ordinaires, avec leurs potions, les maléfices qu'elles envoient sur les pauvres âmes humaines, ce genre de chose.

Remettre un peu de vérité dans ce monde un peu trop pailletés d'Harry Potter ? Oui carrément. Enfin par pailletés, je veux dire que ça ne ressemble vraiment pas à ça nos vies quoi. Ca se saurait. Si je devais comparer ma vie à celle d'Harry Potter, je dirais que je suis un obscurus et c'est pas très joyeux.
Bon j'avais dit que j'arrêtais de parler de ça, mais il me lance sur le sujet aussi.

Il accepte de me payer un verre et nous allons nous installer un peu plus loin. Je commande un whisky coca au serveur le plus proche. Nous sommes silencieux un petit moment. Ce n'est pas si facile que ça, après dix ans d'absence. Je ne sais pas si j'ai bien fiat de lui proposer de discuter. J'espère que je vais pas le regretter, que ce bar ne va pas le regretter. J'ai mal au ventre un truc de fou. Je prends une profonde inspiration. S'il le voit je m'en fiche. Je garde mon self control par je ne sais quel miracle alors on va tout faire pour que ça continue.

- Tu fais quoi sinon ? A part chercher ton père, je veux dire. T'as un endroit ou crécher en ville ? Sinon je connais quelques adresses si tu veux!

Oui, bon, c'est un peu fouillis et alors ? On pourra pas me reprocher d'essayer.

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"Ah oui c'est pas le même genre. Mais j'comprends. D'une certaine façon, elles sont cools aussi. Fin, pas que j'en connaisse de vrais hein, mais c'est la base de la magie comme on la voyait dans les films y a 20 ans... avant Poudlard j'veux dire."

Et je finis pas de m'enfoncer alors je vais arrêter là comme son attitude semble m'intimer de le faire. En me prenant un coup de vieux dans la tronche en captant que ce "y a 20ans" doit correspondre à mes premières années de collège, par là.

Je la laisse récupérer son verre avant de la suivre plus loin dans la salle, jusqu'à une table libre où on pourra discuter plus posément, je l'espère en tout cas. Ca va, on est encore loin de la prochaine pleine lune, alors mon naturel calme et posé est plus présent que la nervosité du loup. Enfin, je ne peux pas dire que la situation soit confortable pour autant, ce qui explique probablement que je reste un moment silencieux, attendant qu'elle ne prenne la parole en premier. Sauf qu'elle attend peut-être la même de moi, alors, ça pourrait être long. Ou pas. Merci Serena, du fond du cœur.

"J'ai trouvé une baraque à louer dans la banlieue. Un peu grande pour moi, mais y a un garage, et le loyer est pas dégueu. Et j'fais des heures chez un mécano pas loin. Et toi, y a longtemps que t'es là? J'veux dire, j'ai du me faire toutes les hypothèses à l'époque, mais j'aurai vraiment pas pensé que le climat de l'Illinois te conviendrait."

J'me suis jamais sorti de la mécanique, même si ces fichues voitures électriques vont vraiment finir par rendre le boulot obsolète à force, on ne se refait pas, et apparemment, il semblerait qu'on soit deux dans ce cas de figure. J'la connais - connaissais - trop bien pour savoir que si elle a gardé la moto, c'pas pour l'emmener chez le mécano tous les quatre matins. Elle continue à faire la mécanique elle-même, sinon, elle serait repartie sur un truc neuf et sans embrouilles.

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