Si on se retrouvait en famille ? - Danak, Nathaniel

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

J'aide mon oncle avec mon cousin depuis plusieurs semaines maintenant. Il sait fort bien qui je suis, mais nous éludons avec soin le sujet de mon père depuis que je suis arrivée. De son côté aussi visiblement, quelque chose ne passe pas, sans que je ne sache de quoi il s'agit. Je fais équipe avec mon cousin sur ce coup là. J'ai demandé à mon père de m'apporter quelques affaires, lui disant que mon oncle serait occupé à l'école de mon cousin pour une histoire de comportement, tandis que mon cousin doit s'arranger pour que mon oncle soit dans la maison au bon moment, alors qu'il est censé travailler. Un peu compliqué ? Si peu!

J'ai préparé un gâteau, j'espère qu'il va permettre d'apaiser un peu les tensions. J'entends rapidement la cloche retentir à la porte. Je vais rapidement ouvrir. Mon père est là devant moi, je le serre dans mes bras en affichant mon plus large sourire. Je suis tellement contente qu'il soit là et je profite qu'il me le rende, je doute que ça dure bien longtemps.

- Contente que tu sois là!

Nathaniel, Megan et Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Ma fille, mon soleil, ma raison de vivre avec sa mère. Elle m’appelle, j’accoure comme le gentil papa que je suis. Quelques fringues, des affaires de toilettes laissées à la maison et un pincement au cœur. Plus elle en demande, plus la sensation qu’elle ne reviendra pas à la maison de sitôt pèse sur mon palpitant. Je n’aime pas la savoir si loin de la maison et encore moins à travailler pour mon frère. Je ne lui fais tout simplement pas confiance. Et s’il l’abandonné comme il m’a abandonné. Et si elle se retrouvait dans une mauvaise passe et qu’il n’était pas là pour elle. Je spécule et pourtant je me sens légitime dans mes craintes. Lorsque la jeune fille m’aperçoit et saute dans mes bras, je lui adresse un sourire sincère.

« Moi aussi mon poussin, j’aurais préféré que tu voles pas si tôt de tes propres ailes. »

Un gros câlin pour profiter encore un peu de ma fille rien que pour moi et je lui tends le sac contenant ses biens. Un regard rapide sur ma montre : 17 h.

« Tu veux qu’on se trouve un petit salon de thé pour papoter et manger … des … »

Non, ce n’est pas mon reflet. Déjà, je ne porte pas les mêmes vêtements. En revanche, l’expression de mon visage doit être plutôt similaire. Je déglutis. Je n’avais pas vraiment prévu de me trouver face à mon frère et ma fille m’avait dit qu’il était loin, en ville, pour … je sais plus. Je passe ma main dans mes cheveux afin de retirer la mèche qui commençait à me chatouiller le front.

« Hey »

Pourquoi en étant jumeau m’a-t-il toujours donné l’impression d’être le grand frère ? Un regard vers ma progéniture qui ne semble pas bien innocente dans cette rencontre fortuite. Je soupire.

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Aujourd'hui, je suis à la taverne. Non pas que y ai foule, mais j'ai terminé toutes mes commandes en cours à la forge, alors, quitte à ne rien avoir à faire, autant le faire utilement. Cela était sans compter sur Kelean, qui, se rendant compte de mon inactivité, décide de profiter de mon attention pour m'avoir pour lui tout seul. Je me retrouve donc trainé de force à la maison, par un gosse de dix ans doté d'une force surprenante pour son âge, tout en devant esquiver les coups excités des petites ailes qu'il tient de sa mère.
A peine arrivé chez moi, je sens le piège. Une sorte de pressentiment qui me prend soudain. Et avec raison. Alors que je passe la porte du salon, je me retrouve face à ma nièce... et à mon frère. Si je l'avais vue venir celle-là..

"Lequel de vous deux je dois prendre pour taper sur l'autre?"

Cependant, je suis de bien moins mauvaise humeur que mes paroles le laissent entendre. Parce que, malgré l'éloignement et la distance mis entre nous, Danak reste mon frère, envers et contre tout. Je glisse d'ailleurs une main sur les cheveux de mon fils pour le rassurer, craignant qu'il ai pris mes paroles au premier degré.

"Lut Dan' "

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Après un câlin bien trop court à mes yeux de petite fille à son papa, je me recule pour nous aller assez de cet espace si important à tous pour respirer et se sentir libre de ces mouvements : notre zone de confort. Avec mon père la mienne est faible, normal j'ai envie de dire quand on s'entend aussi bien. Il me donne le sac avec plein d'affaire que je lui ai demandé. Il me dit ensuite qu'il aurait aimé que je sois encore un peu une petite fille et d'un côté je suis d'accord avec lui, mais bon j'avais aussi besoin de prendre mon indépendance, je suis dans la période révolte et tout et sur le principe c'est le moment où on a envie de partir loin de ses parents. Ce n'était qu'à moitié mon cas puisque je suis chez mon oncle, l'homme qui ressemble comme deux gouttes d'eau à mon père, même au niveau du caractère ils se ressemblent, c'est fou. Et puis, il faut être honnête j'ai toujours eu dans l'idée de les faire se retrouver, quitte à avoir un ou deux "ennemis" au passage.

Nous n'avons pas le temps d'échanger que mon père se coupe dans sa phrase à l'ouverture de la porte d'entrée : mon cousin, mon oncle et les voilà qui se font face. Je me tais lorsque mon oncle demande sur qui il frappe avec qui. Il sait très bien que c'est moi, que j'ai influencer son fils pour en arriver là. Je doute qu'il en aurait eu l'idée seule et encore moins qu'il le fasse. Pourtant il nous pardonne bien vite pour s'adresser directement à mon père, son frère. Ça fait bizarre de dire le mot frère. On ne l'a jamais trop dit à la maison, sans que je ne comprenne pourquoi. J'entends mon père qui soupire, après un regard vers moi. je pourrais être désolée, je pourrais avoir ce petite regard de prise en faute, mais je suis plutôt fière de moi, alors je ne baisse pas le regard, mais je ne l'affronte pas non plus.

- Asseyez vous, j'ai fait du thé et un gâteau.

Tu vois papa, y en a du thé, pas besoin de sortir. Tout est déjà près sur la table, je n'est plus qu'à aller chercher le gâteau dans le four que j'avais laissé au chaud, puis la théière. Je pose tout cela sur latable, avant de m'asseoir à mon tour. Pur l'instant je reste, pour m'assurer que l'un ne parte pas tant qu'il ne se seront pas parlé. Quand je comprendrais qu'ils veulent parler, je m'éclipserais pour leur laisser de l'intimité c'est prévu. j'irais aider mon cousin sur ses devoirs, mais on y est pas encore je crois.

Nathaniel, Megan et Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Je reconnais bien là mon petit rayon de soleil. Son regard en dit long et je ne peux m’empêcher de lui adresser un sourire furtif pour lui faire comprendre que … c’est ok. Je vais survivre. Un peu égoïstement, je ne peux pas m’empêcher de me dire que je suis celui qui a le plus souffert de la rupture de notre lien, que c’est lui le responsable, que c’est lui qui m’a abandonné. Enfin bref, un gamin dans ma tête et je ne peux pas en vouloir à ma fille de vouloir briser le cercle dans lequel je me suis moi-même enfermé. Le thé … les gâteaux … je me disais bien que j’avais ce genre d’envie pas pour rien. C’est que l’odeur était déjà parvenue à mes narines en me mettant l’eau à la bouche. J’observe le jeune Kelean s’éclipser discrètement vers sa chambre après qu’il m’ait dit bonjour. Il est chouette ce gosse. Je l’aime bien.

On s’assoit à table dans un silence malaisant en attendant que ma progéniture ramène ses petites merveilles. Je ne sais même pas quoi dire. Sans doute « Salut ça va ? » Absurde. Totalement absurde. Je me racle la gorge et tente d’entamer le dialogue.

  « T’as l’air d’aller bien … »

Je dois avoir l’air ridicule. J’ai même pas envie d’essayer … pas pour lui en tout cas. Megan revient vers nous et je me sens déjà un peu mieux. Plus à mon aise. J’pense qu’elle devra sans doute nous aider si elle veut que la conversation se fasse. Qu’est ce qu’on pourrait bien avoir à se dire … Qu’il me manque ? Que je me sens stupide d’être fâché ? Jamais ! je suis mille fois trop buté, trop con !!

J’observe les gourmandises préparées par ma fille et la laisse nous servir le thé. Le doux parfum des plantes me réconforte et je devine les différentes herbes le composant.

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

J'adore mon fils, et ma nièce, mais je pense que je vais avoir une conversation avec eux. Parce qu'ils sont gentils, mais les emmerdes d'adultes, ça concerne les adultes, d'où le nom d'ailleurs. Si c'est une brouille stupide? Certainement. Mais mon frère et moi sommes plus buté l'un que l'autre, et donc, en voilà le résultat.

Si je vais bien? Ah beh ça baigne c'est sur. J'ai enterré ma femme au début de l'année, je galère à passer un peu de temps avec mon fils entre les deux boulots que j'ai pour vivre et ses heures d'école, et je ne parle même pas du fait que je ne sache toujours pas si il pourra se servir de ses ailes ou non avec les gènes de total terrestre que j'ai pu lui refiler... et maintenant, il faut qu'un passé sur lequel j'ai fait un trait depuis perpette me revienne dans le coin du nez. Manque plus qu'un tremblement de terre et j'appelle ça une journée idéale...

"Comme tu vois, ça va. Et toi?"

Faut offrir les louanges qu'elle mérite à Megan, elle a fait les choses bien. Presque un gouter normal entre membres d'une même famille... d'ailleurs je ne sais pas où a disparu mon garçon, mais j'ai peur de ce qu'il pourrait avoir dissimulé dans sa chambre pour en rajouter une couche.. je devrais fouiller le dessous de son lit plus souvent.

"Merci Meg, mais viens t'asseoir." Je monte un peu le ton pour être entendu à l'étage. "Kely, tu viens? Ta cousine a fait du gâteau!"

Non pas que j'ai très faim avec tout ça, mais je ferai honneur aux efforts de ma nièce, au moins un peu.

"Si tu me permet Dan', elle est géniale ta fille. Vous l'avez bien élevée."

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Je sers tout le monde et m'assois. Je ne sais pas trop quoi dire pour les aider. Je joue avec mes mains sous la table pour essayer de me détendre mais c'est un échec. C'est ça le plus beau, c'est moi à l'origine de la situation, mais je ne me sens pas du tout, mais alors pas du tout à ma place. Plus de quinze ans sans se parler c'est super long! Je saurais à cause de quoi c'est du encore … Je rougis devant le compliment de mon oncle, avant de prendre ma tasse de thé et d'en boire une gorgée pour cacher mon stress.

- Si je peux me permettre vous avez eu une longue période sans vous parlez, alors autant commencer par les trucs les plus récents, genre eu … Comment va maman ? Ou il est en quel classe Kelean, il fait quoi de beau à l'école ?

Et maintenant je me tais. Je sors des âneries plus grosse que moi, c'est tout du moins l'impression que j'en ai en m'écoutant parler. Mon cousin enfin descendu je lui coupe un bout de gâteau que je lui mets dans une assiette avant de lui tendre. Je fais de même pour mon oncle, puis mon père, puis moi. Pomme à la cannelle, je mors dedans sans aucune hésitation. C'est le gateau préférée de maman, donc rien à voir avec eux, mais c'est aussi celui que je fais le mieux, donc d'un sens ou dans l'autre ça devrait mettre pas mal de monde d'accord … enfin j'espère.

- Ca va ça se laisse manger! Que je dis pour rire un coup.

Nathaniel, Megan et Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Je soupire. Comme d'hab', j'aurais mieux fait de me taire. Mon frère me répond presque par politesse et surtout parce que Megan n'est pas loin mais je le sens bien sur j'ai encore mis les pieds dans le plat. A mon tour de répondre des banalités sans profondeur. Après tout rien de nouveau. Mélisandre est plus belle que jamais et j'apprécie chaque jour de ma vie a voir s'épanouir notre fille. Ma serre est ma forteresse de solitude où même Mégan s'aventure peu sachant que lorsque j'y suis c'est pour me ressourcer. Pourquoi me ressourcer ? Parce que le crétin qui me fait actuellement face, n'a même pas idée du vide qu'il a laissé dans ma vie.

« ça va, je vais ouvrir un salon de thé et vendre mes propres décoctions, Mélisandre m’aidera et comme tu le vois, Megan entretient mon gras"

Oui bon, je suis un sac d'os mais j'suis sur qu'en cherchant bien on peut trouver 100g de gras quelque part.
L'appel du gâteau ne se fait pas attendre eu voilà mon neveu réapparaître pour manger ce qui lui est dû. Je souris en le voyant ainsi, il m’avait manqué ce petit. J'ai l'impression qu'il a doublé en taille depuis la dernière fois que je l'ai vu.

« ben ouais, je peux pas tout rater dans la vie non plus … et ma fleur devient une vraie demoiselle, j'ai intérêt à faire attention avant qu'elle ne m'annonce qu'elle s'émancipe ! »

Je souris à ma fille qui semble plus désolé d'entendre son vieux père sortir des absurdités pareilles. Je compte bien la garder près de moi encore un moment avant qu'elle ne s'envole de ses propres ailes !

Un silence un tant soit peu malaisant s'installe où l'on n'entend plus quitter les bruits de mastication.. je me concentre sur une miette qui reçoit toute mon intention. J’écoute mon frère parler, il semble si naturel avec Mégan, et plus je l'écoute, plus j'ai envie de lui mettre une claque, sans raison, juste pour lui faire comprendre la douleur que cela représente pour moi de le voir après qu'il m'ait abandonné, une blessure sans fin pour un jumeau qu'on ampute de sa moitié.

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Les efforts de Megan sont louables, et rien que pour ça, elle mérite que nous tachions de faire un effort de notre coté. Je pioche un morceau de son gâteau au moment où un tonnerre de pas déboule dans l'escalier avant que je ne sente le poids de mon fils contre mon épaule. Pas qu'il soit lourd, mais il y a mis toute sa volonté, de me percuter.  Tel que je le connais, il n'est pas autant à l'aise avec la situation qu'il ne tente de le montrer. J'ai beau tenir une taverne, un endroit où on pourrait dire qu'il croise pas mal de monde, la cité n'est pas bien grande, alors, autant dire qu'il connait tous ceux qui viennent ou presque. Avec Megan, le courant est passé tout de suite. Comme j'ai pu le dire à ma nièce, une présence féminine, il en a besoin, même si ni lui ni moi ne sommes prêts à remplacer sa mère un jour. Danak le met moins à l'aise, et j'imagine que mes propres émotions y jouent. On peut pas dire que je sois à l'aise moi non plus.

Je l'embrasse rapidement avant qu'il n'aille s'asseoir à son tour, attiré par l'odeur du gâteau, ses petites ailes battant aussi frénétiquement qu'inutilement l'air dans son dos.

"Kely, Amaël t'as rien appris?"

Non pas que je ferai confiance au néphilim pour apprendre quelque chose de censé à mon fils. Mais faut reconnaitre qu'en matière d'ailes, il est un peu mieux placé que moi pour le faire. D'ailleurs, Kelean a quand même du apprendre un truc ou deux à son contact, parce que les battements frénétiques se calment presque aussitôt. Peut-être que son cousin parviendra à lui faire pousser quelques plumes, sait-on jamais. Mais là n'est pas notre sujet.

"Un salon de thé? Bonne idée ça. Avec toutes tes plantes et tout. Pis, Mélisandre a un meilleur contact aux autres que toi, si je n'm'abuse."

Une vérité qui nous concerne tous les deux, d'ailleurs. Mais je pense qu'il partage assez mon opinion à ce sujet pour ne pas avoir besoin de le préciser. Je manque d'ailleurs lui préciser, en revanche, que si sa fille est si parfaite, ce n'est surement pas grâce à son père. Mais si une part de moi a envie de renouer avec mon frère comme si de rien ne c'était passé, une autre craint de froisser quelqu'un que je ne connais plus, au fil des années passées loin de lui.

"T'inquiètes pas pour elle, elle a l'air bien plus intelligente qu'on a pu l'être à son âge. Elle prendra pas le risque de te prévenir pour que tu l'en empêches! Plus sérieusement, elle cuisine beaucoup mieux que toi, alors je risque de te l'emprunter encore un peu. Fin, si t'es ok, Megan?"

Parce qu'après tout, son avis importe autant que celui de son père. Même si Kelean a un avis bien tranché sur l'avis des autres, étant donné qu'il manque s'étouffer avec son dernier morceau avant de sauter sur sa cousine.

Nathaniel, Megan et Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Je regarde mon frère respire le bonheur et ressent une pointe d’amertume. Son fils si guilleret, ma fille qui préfère graviter autour de son oncle plutôt que moi … Je me snes toujours de trop, avec tout le monde … Mélisandre savait me faire me sentir unique, mais dès que Nath est dans les parages, la tendance s’inverse et je perds tous mes moyens. Je baisse les yeux et écoute la critique. D’un côté … à part mes plantes, je n’ai jamais su parler à personne.

« Je suppose … »

Mon frère ne me rate jamais … si je suis capable d’écraser mon poing contre un mur submergé par la colère, lui me foudroie de ces répliques acerbes. Je pense qu’il ne se rend même pas compte de ce que cela génère chez moi, ce sentiment d’impuissance, de total soumission et si je réplique, je serais juste un gros connard. Enfin, c’est ce que je redoute. Je ne veux pas que Megan ou Mélisandre pense cela de moi, mais forcément, je ne sais pas non plus ce que j’y gagne. Un jour viendra où ce sera contre son visage que ma fureur va passer et avec chance je lui casserai une dent pour que chaque fois qu’il sourit, il se rappelle qu’il est aussi un abruti.

Je pince les lèvres à sa dernière réplique. Bravo, merci de souligner une fois encore à quel point je suis un mauvais père ! C’est sûr, toi t’es parfait ! Ma fille veut travailler avec toi, ton fils respire le bonheur et ma femme m’ignore quand t’es dans les parages ! Je secoue la tête pour chasser ses pensées et me concentre sur le thé qui tournoi dans ma tasse. Nathaniel sera toujours celui de nous deux qui aura mieux réussi. Après son abandon, je n’ai été qu’une loque, un petit frère incapable de surmonter cette épreuve et un boulet pour ma propre famille. Je serre mes mains l’une contre l’autre sous la table à m’en faire blanchir les jointures.

« Non, si Megan est ok, je n’y vois aucun souci. »

A part mon complexe d’infériorité ... et l’amour que j’ai pour ma princesse. Sa mère me dit tous les jours que la présence de Megan lui manque, qu’elle me trouve aussi triste mine depuis. On a monté de nouveaux projets tous les deux, comme un couple qui se reconstruit après le départ de son oisillon, se rendant compte que la vie ne s’arrête pas là et qu’ils nous restent beaucoup de rêves à accomplir. Alors oui, Mélisandre est mon moteur, elle me tire de ma mélancolie et m’aide à construire ce futur que nous vivons main dans la main. Je l’aime et chaque jour me rappelle que je suis l’homme le plus chanceux au monde. Un sourire se dessine au coin de mes lèvres et je laisse tomber mes rancunes envers mon frère pour ne me concentrer que sur le point que vivre près de son oncle, signifie pour Megan s’épanouir et être heureuse.

« Tu vas finir par t’y rendre indispensable ma belle si tu continus, d’ailleurs ta mère me fait passer aussi qu’elle a besoin d’une de tes recettes de gâteau pour s’entraîner. Elle essaye de mettre aux points différents trucs avant l’ouverture du salon de thé. »

Je relève la tête et m’adresse à ma fille en la regardant dans les yeux, je n’ai pas envie de briser ses espoirs, elle fait tant pour que Nath et moi nous réconcilions.

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

- Évidemment, que j'suis d'accord. Ça te va, toi Kelean ?

Ça le concerne tout autant que moi cette question après tout. Je sais très bien, nous en avons même parlé avec Nathaniel que je ne remplacerais pas sa mère, ce n'était pas mon idée de toute façon, mais ça n'empêche pas que je suis là pour lui en grande partie en tout cas.

Je suis contente de voir qu'ils arrivent à discuter, même si c'est pas fou, au moins y a un début de quelque chose et vu depuis le nombre d'années où ils se sont pas parlés, ni peut-être même croisés, c'est pas rien quand même.
Quand à moi et mes parents ? Je viens quand même les voir aussi souvent que possible. Après tout il n'y a pas des dizaines de kilomètres qui nous sépare.

- Oui, je passerais la voir dès demain entre midi et deux.

J'aime mes parents plus que n'importe qui au monde. Je ne me vois pas ne pas les voir au moins une fois par semaine et croyez moi c'est le minimum.

- La prochaine fois vous pourrez peut-être venir tous les deux ? Maman et Kelean se sont jamais rencontrés, c'est dommage ! Non ?

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

Il n'est pas dur de voir à l'expression de mon frère que ma plaisanterie n'a pas fait mouche, bien au contraire. Même s'il avait essayé de le dissimuler, on peut dire que je connais ses traits aussi bien que les miens, alors, non, c'est impossible pour lui d'essayer de faire bonne figure devant moi. Kelean n'a pas l'air mécontent de l'idée que sa cousine reste à la maison quelques temps, bien au contraire, et j'avoue que ça me fait du bien de voir mon oisillon avec un vrai sourire aux lèvres, loin de ce sourire de façade avec lequel lui pense pouvoir me convaincre quand je lui demande si ça va. Non, ça ne va pas, bien sur, mais mon fils a su tenir de son père pour ne pas qu'on attaque les sujets sensibles. Si ça va, les gens n'ont pas d'intérêt à continuer dans cette conversation. Si ça va pas, là, ils s'engouffrent dedans. Et je crois que du haut de ses dix ans, il l'a parfaitement compris.

"C'est tout bien. J'veux aller voir ta m... aller avec toi Megan. Je peux Papa, je peux?"

Je tends la main vers lui pour l'attirer vers moi, glissant un baiser dans ses cheveux bruns tout en le tenant contre moi un instant. J'ai bien noté comme il a évité de prononcer ce mot qui lui fait encore si mal. De là, je l'écarte légèrement, pour le regarder dans les yeux, avant de croiser le regard de mon frère.

"Tu veilleras sur lui? J'suis pas convaincu que Mel serait ravie de me voir." Reportant mon regard vers mon fils, je soulève légèrement son menton pour l'empêcher de se défiler. "A une condition. Les ail..."

"Je sais. Les ailes restent cachées..."

Je sais ce qu'on dit des oiseaux en cage, mais je sais aussi combien sa mère craignait que son existence soit découverte. Je ne prendrais pas le risque de le mettre en danger inutilement, même si une part assez importante de moi se dit que la présence de Amaël à proximité de mon fils suffit à le mettre en danger. Et pas que à cause de ses exploits. Je laisse Kelean rejoindre sa cousine avant de me déplacer pour rejoindre mon frère, de façon à être entendu de lui seul et ne pas lui mettre la pression avec les témoins de notre conversation.

"Dis Dan, j'sais qu'on a tous les deux des tords... d'accord, j'en ai beaucoup. Mais tu crois qu'on pourrai.. j'sais pas, essayer? A défaut d'le faire pour nous, pour les gamins?"

Nathaniel, Megan et Danak

Si on se retrouvait en famille ?

J’acquiesce silencieusement. Bien sur que je veillerais sur mon neveu, il a même pas besoin de me le demander que cela me paraît évident … Mélisandre sera toujours ravie de le voir et j’hésite à lui dire … d’un côté, j’préfère toujours qu’il se teinne à distance et de l’autre je vois ce que ça génère chez ma fille et j’ignore pas que ma femme aussi aime mon frangin. C’est pas pour rien qu’on a toujours été fourré tous les trois plus jeunes. Je soupire.

« Méli t’accueillerai tu le sais bien. T’aurais le droit aux câlins, aux blagues et à toute son attention. »

Merde, c’est sorti avec plus d’amertume que ce que j’aurais aimé et je pince mes lèvres à nouveau regrettant de pas avoir tourné sept fois ma langue dans ma bouche. Je me tourne vers ma fille.

« Mais oui sinon ton oncle a raison, on embarque Kelean et maman sera contente de le voir. Moi aussi ça me fera du bien de vous avoir un peu tous les deux à la maison. »

Surtout elle … elle grandit trop vite c’est pas possible ! à quel moment c’est devenue une jeune femme plutôt que ma petite fille ? Je laisse Nath prodiguer ses conseils à son fils alors que la mienne l’incite à venir jouer avec lui. Ils partent un peu plus loin et c’est l’occasion que choisi mon cher frère pour se rapprocher de moi. Je sers les poings lorsqu’il parle de nos tords … il pourrait commencer par s’excuser d’avoir été un con un jour que ça serait passé mieux, mais non, il me met direct dans le même panier que lui et j’ai déjà envie de lui fracasser ma main sur la tronche. Je fronce les sourcils et tourne un regard froid vers lui alors que mon ton devient des plus tranchants.

« Ça t’arrange de parler des gamins pour me faire culpabiliser … j’suis sûr que si j’te demande là maintenant pourquoi j’t’en veux, t’es même pas capable de cibler la véritable cause. »

Ma mâchoire se contracte et ça devient moins aisé de parler. Le pire, c’est la larme qui vient couler alors que j’ai plus qu’une envie c’est celle de me barrer. Je l’écrase d’un revers de la main et tente vaguement de me calmer.

« Il sont pas cons, ça sert à rien de faire semblant de passer un bon moment si on en est pas capable, ils en souffriront plus … »

Je me tourne vers lui.

« Alors égoïstement, si je veux essayer que ça aille mieux entre toi et moi, ça sera pas pour eux, mais véritablement pour nous. »

Sous le coup de l’émotion, j’ai pas fait gaffe que je me suis levé et que j’ai totalement zappé de parler plus doucement comme mon frère l’avait si bien fait. Autour de nous, y’a plus un bruit et je sens le regard de nos gosses vers nous. Le problème, c’est que je suis lancé et j’en ai bien trop gros sur le cœur pour m’arrêter là.

« Tu m’as tourné le dos, t’as lâché ceux que t’aimes juste pour ton envie d’aventure et tu reviens me parler de mes tords ? Vas-y crache le morceau, tu as quoi exactement à me reprocher ? Parce que là, j’ai du mal à voir où j’ai merdé auprès de ta personne ! Tu veux demander à ta belle-sœur comment j'ai ruiné des années de sa vie ? Tu veux parler avec ta nièce des soirées où son père était trop imbibé pour tenir debout ? Eux ils ont bien un milliard de choses à me dire et j’aurais qu’à me taire et m’excuser, mais toi … »

Je le poque sous le coup de l’énervement pour le désigner, mes doigts s’enfoncent dans son pectoral et j’suis à deux doigts de compléter le schéma d’une droite. Mais ma fille … mon neveu … j’vais encore passer pour le méchant et ils auraient raison. Je fais un pas en arrière pour me retenir. J’me suis déjà bien donné en public, Megan aura une raison de plus pour être déçu de son père …

Megan&Nathaniel&Danak

Si on se retrouvait en famille ?

La situation se renverse et d'un coup ce n'est plus mon père et ma mère qui vont venir, mais mon cousin qui viendra avec moi pour rencontrer ma mère. Son père lui conseille de ne pas montrer ses ailes et il connait par cœur le topo le jeune homme; il le répète au mot près.

Kelean et moi nous éloignons un peu pour que les adultes parlent. Les adultes ? Oui je me considèrent dès leur, mais pas sur qu'ils en pensent autant. Kelean sort ses soldats et nous jouons tous les deux pour les laisser se dire ce qu'ils veulent. La tension est papable, mais je tâche de faire bonne figure.
Le ton monte soudain et je ne peux que sursauter lorsque mon père déballe tout ce qu'il à dire. Visiblement il en a gros sur la patate. Je voudrais que Kelean n'entende rien de tout ça, mais c'est impossible. Je vois à son regard qu'il a envie de pleurer et je vois aux visage dur de mon père et à son regard qu'il est dépassé par tout ça. Il ne s'arrête plus de parler, lui qui est plutôt du genre discret.

Ma gorge se sert au fur et à mesure. Je n'ai plus de salive dans la bouche. Je ne parviens pas à prononcer un seul mot. Je suis plutôt cool d'ordinaire, je parviens facilement à trouver les bons mots, rappeler ce qui peut rendre le sourire, mais là, non ... y a rien qui sort excepté quelques larmes lorsqu'ils évoquent les nuits où il est rentré un peu éméchés à la maison. Je n'ai jamais osé demandé pourquoi il agissait ainsi. Pourquoi il souffrait autant que notre présence ne lui suffisait pas à s'apaiser. J'imagine que la réponse et là sous mes yeux. Comment ai-je fais pour ne pas comprendre plus tôt ? Pourquoi n'ai-je pas vu ? Si j'avais comprit, j'aurais pu agir plus vite. peut-être que je ne serais jamais venu ici. J'ai toujours su qu'il y avait des non-dits entre eux que leur éloignement était du à beaucoup de peine et de rancœur, mais j'ignorais à quel point.

Papa !

Ce sont les seuls mots qui sortent de ma bouche, lorsqu'il menace mon oncle. Rien de plus. J'empêche Kelean de rejoindre son père, je veux d'abord que mon père se calme. J ne le crois pas capable de faire du mal à ce petit bonhomme, mais je ne veux pas non plus qu'il se retrouve entre les deux s'ils en venaient aux mains.