Comment retrouver goût à la vie ? ft Dmitri

Il y a les personnes avec qui je peux être courtois, et il y a les autres. Au naturel, Sylvana fait partie des autres. Mais davantage encore quand je la voit si proche d'une personne que je souhaite voir vivre encore un peu, même si, étant donné notre rencontre récente, je ne peut pas dire "à laquelle je tienne". Pas encore. On ne peut pas tenir à quelqu'un qu'on vient de rencontrer, même en ayant plus d'empathie que je ne suis capable d'en éprouver pour autrui. Un vampire empathique ne tient pas longtemps. Imaginez se préoccuper de chaque être que l'on tue pour se nourrir, ça doit être harassant. Mais là n'est pas le sujet. Nous disions, Sylvana.

"La réponse est simple. Les anciens semblent apparemment avoir oublié l'art et la manière de se tenir en public."

Guettant la réponse à venir de la part de la blonde, je prend les devants sur ses récriminations.

"J'ai choisi de lui révéler ma nature. Et toi, quelle est ton excuse?" Je jette quand même un regard machinal vers l'est avant de reporter mon attention sur la jeune rousse assise devant moi. "Sylvana en est également une. De vampire. On est même de la même "famille", même si ça m'arrache les tripes d'y penser."

Ce qui signifie? Que ma famille, question vampires, s'arrête à Mina et Anya, et peut-être Ryan si un jour Anya remarque que le gamin a bien pris dix ans depuis dix ans qu'il vit avec nous. Une histoire qu'il va vraiment falloir que je règle ça aussi, mais c'est pas le moment d'y réfléchir.

"Maintenant Blondie, si t'as un problème avec le fait que cette jeune humaine soit au courant de notre secret, c'est par ici que ça se passe. Je m'en porte garant."

Une déclaration qui suffit déjà, certainement, à la mettre en danger, sans rajouter le fait qu'elle est de ma famille. J'en connais une qui serait capable de la tuer juste pour me faire chier.

La jeune femme est apparemment très au courant de la nature de Dmitri, une situation qui me surprend autant qu'elle m'interroge si on veut être honnête. Pourquoi diable s'est-il ouvert de la sorte face à elle? Une nouvelle méthode de chasse tordue chez les bébés vampires? D'accord, il n'appartient plus vraiment à cette catégorie, pas maintenant que j'ai découvert plus décourageant que lui, des minis vampires de moins d'un siècle qui rejettent leur nature... décourageant j'avais dit. Mais là n'est pas le sujet.

Mes yeux s'étrécissent alors qu'il me vend à mon tour, et je lui cracherais bien mon fiel à la figure si nous étions dans un endroit moins exposé. J'ose penser que le regard assassin que je lui lance suffira à le faire se tenir à carreaux.

"Plutôt me bruler la gorge à l'acide que penser à la branche pourrie de la famille à laquelle tu appartiens."

Et le voilà qui ose proférer que Amélia serait plus en sécurité avec lui qu'avec moi. C'te blague. Je suis convaincue que Mina n'a jamais été sans devoir aller le chercher dans un couvent rendu exsangue, celui-là. Je tiens néanmoins ma langue, sur ce coup, décidant de ne pas remettre d'eau dans son moulin (remarquez que Vlad a une bonne influence sur moi, en d'autres temps, il aurait déjà eu droit à se faire broyer la gorge. Ca ne le tuerait pas, mais il parait que ça ne fait pas de bien), pour choisir l'ignorance pure et simple et regarder de nouveau en direction d'Amélia. Regarder et pas que. Cette odeur que j'avais déjà senti sur elle, celle qui me la fait trouver appétissante mais pas seulement, parvient à passer outre l'odeur répugnante du ruskov. Et je crois que seule mon ouïe reste plus ou moins à sa disposition, davantage pour guetter un potentiel coup bas qu'autre chose.

"Aucun problème, tu m'as facilité les choses en vérité. Qu'est-ce que tu en penses, Amélia?T'as envie d'en apprendre plus? Ou tu préfères rester avec celui-là?"

Auquel cas je m'éclipserai... peut-être. Sans doute que je resterai à portée d'oreille pour m'assurer qu'il ne joue pas au con de son coté. Pourquoi je m'intéresse autant à cette fille? Aucune idée, si ce n'est son coté énivrant... on dira que je me ramollit, mais j'ai envie d'un animal de compagnie, pour changer.

Je suis leur échange des yeux. Je sais pas trop dans quoi je me lance là.
Si j'ai envie d'en savoir plus ? Oui bien sur. Si eux sont vampires, alors quel monde s'ouvre à moi ? Si je me sens en danger quand il demande si Sylvana a un problème avec le fait que je sois au courant de leur condition de vampire ? Oui clairement. j'avale difficilement ma salive, tout en attendant sa réponse. Le secret a été éventé et potentiellement je peux être la victime de cet écart de mon ancêtre. C'est un peu à la Twilight, les humains ne doivent pas être mit au courant.

- Vous embêtez pas à me tuer, ein! Je parlerais pas et même si je le voulais personne me croirais. J'ai aucun intérêt à parler de ça.

Je ne sais pas si elle me croyais, mais je le pensais vraiment. Y avait aucune chance qu'on me croit et de toute façon je n'avais aucun intérêt à en parler. J'avais rencontrer un membre de ma famille. il avait tellement de chose à me dire sur notre famille, sur l'histoire en général. J'étais trop curieuse pour le dénoncer. Et elle ? Si je parlais d'elle, je devrais parler des autres... Et puis elle a ce charme indéniable. Je crois que même si je voulais parlé, y a un truc qui ne m'en donne pas du tout envie, c'est assez bizarre. Je suis subjuguée par cette femme (elle m'avait déjà fait un sacré effet la première et dernière fois que je l'avais vu) et rien n'avait changé après ces quelques mois.

- Evidemment que je veux en savoir plus. Tout cela est si étrange !

Dmitri m'en a déjà dit un peu, mais je ne veux pas l'enfoncer d'avantage devant Sylvana vu que de toute évidence il n'aurait jamais du me révéler tout ça. Je ne voudrais pas qu'il lui arrive quelque chose à cause de moi.
Je pourrais rester des heures à parler avec eux je crois.

Son histoire de bain de bouche à l'acide?

"Ca peut toujours s'arranger si l'envie t'en dit."

Cependant, le regard que je lance à Sylvana est pour une fois plus perplexe que mauvais. Et oui, sans doute que pour une fois, c'est vers l'expérience de l'ancienne que je me tourne pour expliquer pourquoi Amélia pense que nous allons la tuer maintenant qu'elle sait ce que nous sommes, alors même que c'est moi qui lui ai avoué la vérité sur notre compte. Je prends assez rarement le temps de discuter avec la nourriture, bien que j'ignore les idées de Sylvana sur le sujet. Ce qui signifie? Que moi je la saignerai pas. Et que je met Sylvana au défi d'essayer.

"Je n'ai jamais eu besoin d'excuse pour saigner un être humain. T'avoir mis au courant de notre nature ne te rend pas plus éligible qu'un autre."

Pas moins non plus, cela dit, parce que si nous sommes capables de nous repérer en un instant entre nous, il faut une certaine expérience aux humains pour pouvoir en faire de même. Et heureusement d'ailleurs. Mais même si elle parvient à obtenir l'immunité nous concernant Sylvana et moi (et j'avoue avoir des doutes sur la blonde), rien ne dit qu'un autre des nôtres ne l'attendra pas dans une rue sombre un autre soir.
Amélia semble vouloir poursuivre la conversation avec Sylvana, ce qui me pousse à lâcher un grondement involontaire, avant que je n'attrape le bras de la vampire pour la forcer à me regarder dans les yeux.

"Tu ne lui feras rien? Sur ton créateur?"

Comme si je pouvais menacer Vladimir et être crédible. Cependant, c'est à ma connaissance la seule personne à laquelle Sylvana tienne un tant soit peu, alors mes options sont limitées.

Le tressautement de ma lèvre devrait indiquer à Dmitri qu'il ferait mieux de ne pas pousser le bouchon trop loin au risque de se faire mordre, mais il a l'idée d'accepter le changement de sujet posé sur la table par Amélia.

"En d'autres termes, je t'aime bien, alors pourquoi j'te tuerai?"

Par contre, je suis plus que curieuse de savoir pourquoi Dmitri semble autant se préoccuper de cette jeune demoiselle. Bon, d'accord, il y a cet idiot de sorcier qu'il semble avoir pris sous son aile aussi, sans compter cette gourde d'Anastasia, et cette pimbêche de Mina... D'accord, Dmitri a un gout déplorable en matière de relations. D'où ma question première. Pourquoi il se préoccupe d'une personne qui n'a à priori aucune tare majeure pouvant expliquer cet intérêt pour elle?

C'est le grondement du vampire qui me fait reprendre pied avec la réalité, associé au fait que, petite victoire personnelle, Amélia préfère rester avec moi qu'avec lui. Et toc! Je dégage mon bras de la prise du russe, m'assurant de lui casser le poignet dans le mouvement, mais sans toutefois lâcher son regard du mien. Parce qu'on sait tous lequel de nous deux a ordre de baisser le regard en premier.

"Sur mon créateur. Si cela te fait plaisir. Devrais-je lui préciser que tu penses pouvoir le menacer de la sorte?"

D'accord, je serai celle qui détourne le regard, mais uniquement parce que je ne compte pas exclure Amélia de la conversation.

"Alors ma belle, tu veux savoir quoi? Comment est-ce qu'on peut te sortir de cette chaise roulante par exemple?"

Et oui, je suis plus que ravie de l'air mi-figue mi-raisin de Dmitri, même si cela signifie qu'il va sans doute vouloir rester plus longtemps pour écouter ce que j'ai à dire.

"Quand on veux des infos sur les vampires, on les prends à la source. Pas d'un ignorant qui pense qu'être vampire signifie se nourrir de sang pour l'éternité, et point. Est-ce toi qui n'a pas su écouter les leçons de Mina ou Mina qui n'a pas su écouter celles de Vladimir? "

Le tout avant de lui offrir un grand sourire satisfait et poser mon menton sur mes mains en direction de la jeune humaine, attendant son interrogatoire.

J'écoute les deux vampires se chamaillaient comme un vieux couple. Ils me font presque rire avec leur pics l'un envers l'autre. Ils me font comprendre qu'ils n'ont pas envie de me tuer, ni l'un ni l'autre. C'est déjà ça de prit ! Je décide d'écouter la plus ancienne des deux m'en expliquer d'avantage. Elle me demande ce que je voudrais savoir et j'avoue que sur le coup, cette question me laisse sans voix. Je ne sais pas à vrai dire, je n'y ai pas vraiment réfléchit.

Je ne capte pas tout de suite quand elle me dit qu'elle peut me sortir de mon fauteuil. En fait, je ne suis pas sûre de comprendre où elle veut en venir avec ça. Je regarde un instant Dmitri, du coin des yeux, pour avoir son avis, mais sur le coup il semble dubitatif. Il est comme moi attentif aux dires de la jolie blonde. Prendre les infos à la source ? Oui c'est bien ce que je pensais faire. Enfaites, si Dmitri ne réagissait pas ainsi face à elle, je n'arriverais pas à croire qu'elle est plus âgé que lui, mais c'est la seule explication à sa réaction. Enfin c'est comme dans les films en tout cas; enfin les livres plus tôt, comme celui de Bram Stocker. Il était si grand et si puissant à mes yeux avant son arrivée à elle. Je me demande comment c'est possible, comme un homme comme lui, malgré les pics qu'il lui lance peut paraître aussi insignifiant. J'ai été subjugué par cette femme à notre première rencontre et rien n'a changé depuis. Elle est si magnétique.

- Comment ça "me sortir de mon fauteuil" ? C'est impossible ? Je ne peux plus marcher et rien ne peut changer cela.

Il y a encore tellement de chose qui m'échappe dans ce monde que je découvre. Tout ça est irréel.

Saisir le bras de Sylvana n'était sans doute pas l'idée du siècle, en témoigne le fait que je retire précipitamment ma main pour la glisser sous la table après avoir autant entendu que senti les os de mon poignet se briser. Et si je ne compte pas lui offrir de signe de douleur évident, je dois tout de même admettre en mon fort intérieur que ça fait mal, même si j'ai bien entendu connu pire au fil des siècles.

"Amuses-toi. Tu sais combien il me tardes de le revoir."

Ou pas. Mais j'ai toujours su dissimuler ma lâcheté naturelle sous mes airs bravaches. Autant dire que Vladimir n'a pas besoin d'en faire beaucoup pour que la puissance qui émane de lui me donne envie de fuir en courant, mais mon ego ne s'en remettrait pas. Accessoirement, il n'y a qu'une chose qui parvienne à me donner du courage, c'est de protéger ma famille, et face à la menace qu'il représente pour chacun d'entre eux, oui, face à elle, et à lui, du courage, j'en ai à revendre.

Mais ce n'est pas là le sujet, et si même Sylvana s'en rend compte, ce n'est pas moi qui remettrait Vladimir sur le tapis. Pour tout dire, elle m'intrigue, et j'accepte même sans broncher ses piques à propos de mon "ignorance" manifeste concernant notre nature. Peut-être a-t-elle raison, peut-être se monte-t-elle d'espérance sur son omniscience, mais dans le doute, je vais attendre qu'elle ait dit ce qu'elle avait à dire avant de critiquer. Même s'il me faut ravaler mon commentaire quand elle décide de s'en prendre à Mina. Sans doute qu'un regard noir de ma part suffira pour le moment, le temps de décider si ses explications valent le coup de supporter sa présence encore un peu ou non.

Je fais l'impasse sur la réponse basée sur la bravade d'un gosse apeuré de Dmitri concernant Vladimir. Ca ne mérite pas davantage qu'une ignorance pure et dure.
Par contre, je suis déçue, pour dire vrai. J'aurai adoré qu'il nous offre un démarrage au quart de tour concernant Mina. De l'eau dans le gaz? Je garde ça dans un coin de ma tête, si ça peut me donner l'occasion de m'en servir plus tard. Et ce même si je compte bien garder cette information pour moi. L'équilibre que Vladimir et moi avons trouvé dans nos relations depuis son retour dans cette ville n'a pas besoin qu'il ne retourne à sa lubie de la brunasse, croyez moi là-dessus!
Bref.

J'oublie totalement Dmitri pour plonger mon regard et mon sourire dans le regard de la jolie rouquine face à moi, et tant pis si ça peut paraitre dérangeant au reste du monde. En un millénaire j'en ai vu d'autres.

"La transformation en vampire ne fait pas disparaitre les cicatrices du passé. Tu resterais un vampire éclopé qui se ferait un peu moins d'ampoules à tourner les roues de ton engin. Et je ne veux même pas penser à la frustration que ça doit être pour un chasseur de ne pas pouvoir chasser..." A cette seule pensée, un frisson véritable me parcourt, avant que je ne considère avoir bien assez fait le tour du sujet qui fâche pour attaquer la partie qui intéresse tout le monde. "Par contre, suffit de s'attarder deux minutes sur les humains qu'on n'achève pas pour comprendre que la morsure est à double sens. Nous, nous obtenons le sang, et eux, notre venin. C'est temporaire, et je n'ai aucune étude poussée à t'offrir sur le sujet, mais j'ai vu des "poussées d'adrénaline" assez fortes chez certains hommes pour ..." Oui bon, je vais m'égarer, je le sens, mais c'est ma faute à moi si les humains sont bien plus intéressants au lit après qu'on leur ait pompé un litre de sang ou deux? Ca ferait presque regretter de les finir au réveil... "Pour penser que ça puisse te remettre sur tes jambes."

Si je sursauterais presque d'entendre un grondement mécontent à coté de nous? Oui, j'ai totalement occulté Dmitri, et je n'ai même pas fait exprès de le faire. Mon attention aime se focaliser sur la personne la plus importante des environs.

"Bref, si ça te dit d'essayer, une morsure et on voit le résultat. Je fais des prix sur les abonnements."

Oui, mon sourire est presque malsain sur ces derniers mots, mais que voulez-vous, on ne se refait pas. Mais plus sérieusement.

"Y a des légendes, concernant les vampires et leurs sources régulières. Qui disent qu'ils partagent un lien bénéfique aux deux parties. Mais dans le détail, il faudrait que je bûche un peu la question. Ca fait plusieurs siècles que je n'y avais pas pensé. Mais voilà l'offre que je peux te faire. Et puis, si ça peut emmerder profondément le gentil monsieur à ta gauche, ça me fera encore plus plaisir!"

Pour tout dire, j'aimerai aussi bien savoir pourquoi ça l'emmerder à ce point... mais je fais confiance à Amélia pour me le dire quand il aura enfin accepté de mettre les voiles. Ou avant si elle veut. Sinon je peux aussi bien jouer avec les nerfs du russe jusqu'à ce qu'il crache le morceau... on a toute la nuit après tout, non?

J'écoute avec attention l'explication puis la proposition faites par Sylvana. Vampire de son état, tout comme mon ancêtre, elle me proposait non pas de devenir un vampire (ce qui apparemment me laisserait en fauteuil), mais plutôt de se nourrir sur moi, ce qui me donnerait de nouvelles "capacités" et me permettrait de retrouver l'usage de mes deux jambes. Cette proposition me fais saliver d'avance. Je ne supporte pas ma condition. Oui je sais je pourrais faire mannequin en fauteuil, non ça ne m'empêche pas de devenir créatrice, mais moi je rêve d'autre chose. Ca ou me foutre en l'air... A mon avis le choix va être vite fait. Pourtant je jette un œil vers Dmitri et ça me freine. Je ne le connais absolument pas. Mais savoir que mon ancêtre n'a pas l'air ravi de cette proposition (enfin en même temps il l'a connaissait pas cette possibilité là visiblement). Ca va peut-être lui donner des idées, qui sait.

- C'est assez alléchant en effet.

Comment lui faire comprendre que je veux bien plus d'informations après ses recherches, sans offusquer mon aïeul ? Il vient de me sauver la vie et je suis prête (sans aucun scrupule) à la laisser entre les mains d'un vampire qu'il n'apprécie clairement pas. Je ne sais pas trop quoi dire ou faire. J'ai beau ne pas le connaître, j'ai dans l'idée de le rendre "fier". Oui c'est bizarre tout ces sentiments mélangés.

Si l'explication de Sylvana semble tirée par les cheveux? Honnêtement, si c'est une stratégie pour saigner la petite, elle est partie chercher très loin, alors qu'il aurait été bien plus simple de faire mine de s'en aller pour l'attraper dans la première ruelle. Si je n'ai pas laissé assez d'humains en vie dans mon existence pour valider sa théorie? Si, j'en ai laissé, bien trop d'ailleurs, rien que parce qu'une chambre d'hôtes ou tout le monde meurt ça n'attire pas trop le chaland, mais les flics en revanche, pas mal du tout (et avec eux ces irritants chasseurs de vampires), mais je ne m'y suis jamais assez intéressé pour valider ou invalider ses paroles. La seule chose que je sais, c'est que j'ai du mal avec l'idée que mon x fois petite nièce risque sa vie sous les crocs de la blonde. Cela dit, je ne suis pas son père, je n'ai pas davantage de mot à dire que de la mettre en garde contre la chipie qui nous fait face. Le premier qui me dit que je devrais m'écouter concernant Anya finit au fond du lac.

"Et dangereux. Le lion peut promettre à la gazelle qu'il ne la mangera pas, il reste un lion, et elle une gazelle."

Je termine mon verre avant de me relever, décidant de m'éclipser avant que Sylvana ne décide de lui faire du mal simplement pour m'en faire. La connaissant, ce n'est pas une idée saugrenue.

"Enfin, ce n'est pas à moi de décider pour toi. Je dirai simplement que si je ne suis pas digne de confiance, elle non plus. J'espère que nous nous reverrons. Pour Olga."

Je glisse ma main sur celle d'Amélia avant de commencer à m'éloigner, gardant tout de même l'oreille tendue vers elles en cas où.

Peut-être que je nage un peu en eaux troubles, parce que la dernière fois que j'ai entendu parler de ces histoires remonte à quelques siècles. Aucun humain ne m'a jamais assez inspiré pour que je consente à essayer, même si j'en ai transformé quelques uns au cours des derniers siècles pour occuper mes journées avant de finir par m'en lasser et les renvoyer à la poussière d'où ils étaient nés au départ. Mais je sais pas, avec Amélia, il y a ce truc difficile à comprendre qui me donne envie d'en faire mon amie. Et se rendre service entre amies c'est le début de l'amitié non? Donc si je peux la sortir de son fauteuil, je ne vais pas me priver. Même si Dmitri s'y oppose. Surtout si Dmitri s'y oppose. Ne cherchez pas, j'ai commencé à chercher les puces du russe pour ennuyer Mina, mais en fait, il me le rend si bien que c'est devenu l'un de mes loisirs. Mieux que de s'attarder sur la génération de bébés vampires qui tournent autour du commissariat. Silas est d'un ennui mortel, et Dante est bien trop facile à mettre en pièces, moralement parlant. Pas le temps de s'amuser. Bref, si je commence à faire la liste de tous les vampires ennuyeux du quartier, on est pas rendus.

Mon visage s'éclaire après mon explication quand elle me répond que mon offre lui parait alléchante, même si Dmitri s'obstine à casser mon effet quelques secondes plus tard. Oui ben aux dernières nouvelles, il ne suce pas la sève des arbres lui non plus à ce que je sache. Je me contente donc de lui tirer la langue avant de sourire à Amélia.

"Alors je vais potasser un peu le sujet."

Dmitri décidant de nous laisser de l'air m'empêche de proposer davantage dans l'immédiat, et si je fronce les sourcils, déterminée à savoir qui est cette "Olga" qu'ils connaissent apparemment tous les deux, je le laisse filer un instant avant de le rappeler après quelques mètres, sachant assez bien qu'il garde l'oreille vers nous pour ne pas hurler à pleins poumons.

"Pourquoi? Pourquoi le grand Dmitri Romanov s'intéresse-t-il à une frêle humaine?"

Je garde le regard rivé vers son dos alors qu'il ne me fera apparemment pas le plaisir de se retourner vers moi, même s'il s'est arrêté un instant, avant de reprendre sa route sans me répondre. Faut reconnaitre qu'il sait ménager son suspense, mais je suis tenace. Bon ben s'il s'en va, je vais pas le retenir davantage, alors je glisse mes mains sur la table, attrapant délicatement le poignet le plus proche d'Amélia entre mes doigts.

"Ok, tu veux essayer alors?"

Ici, maintenant, au milieu des gens? Et alors?

Elle va potasser le sujet ? Je suis un peu excitée à cette idée, je dois bien le reconnaître.
Après une nouvelle friction entre eux, Dmitri décide de partir; non sans m'avoir dit au préalable que je devrais me méfier d'elle. Et qu'il espère que nous nous reverrons, pour Olga. Tout ça est si étrange! Pourtant je suis du même avis au fond. J'ai toujours voulu oublié cette partie de ma vie, mon côté russe, ma famille un poil impériale.

Dieu merci, lorsqu'il s'en va sans lui avoir donné de réponse, elle n'insiste pas et ne me pose pas la question à moi. Je n'aurais pas su quoi répondre. Ces deux là ce n'est pas l'amour fou, inutile d'être devin pour le comprendre, alors si je lui révélais notre lien, elle pourrait bien s'en servir contre lui. Ou peut-être pas. Peut-être qu'elle s'en fiche et peut-être qu'elle veut vraiment m'aider ... je ne sais plus.

- Là, tout de suite ! Je sais pas!

Tout à l'heure, elle devait trouver des infos et maintenant elle veut essayer ...

- Et si je mourrais. je veux pas mourir.

Quoi qu'à bien y réfléchir, ça peut pas être pire de toute façon.

- Oui pourquoi pas. Ca peut pas être pire. On sera fixée!

Je la laisse me guider et faire comme bon lui semble. Je me suis déjà fais tout une idée de ce qu'était un vampire et elle et Dmitri ont déjà éventé pas mal de ces idées, alors une de plus ou de moins...

Si je suis du genre versatile? Tout à fait. Mais pas cette fois. J'ai dit que j'allais potasser le sujet de ce lien étrange qui peut lier un vampire et un humain et sur lequel je n'ai moi-même que peu d'infos, très certainement par manque d'intérêt de ma part pour le sujet. J'ai peut-être bientôt un millénaire, mais je ne suis pas non plus une encyclopédie de tout ce qui ne m'intéresse pas. J'aurai franchement pas le temps de retenir tout ce que je peux voir au cours de ma vie. Je n'ai jamais dit que j'allais potasser l'effet de notre venin sur les humains. Ca, je connais. Alors, malgré son hésitation première, dès qu'elle me donne son feu vert, j'attire doucement son poignet vers moi, y posant d'abord mes lèvres, lui laissant une dernière occasion de reculer, avant d'y enfoncer mes crocs.

Ayant appris de longue date à me contrôler, je lui prends la juste quantité de sang dont j'ai besoin pour ce soir, en profitant pour laisser mon venin s'infiltrer dans la plaie en passant. Plaie qui passera largement pour deux égratignures pour qui n'y jettera pas un regard d'expert. Je sais nettoyer mes traces, moi. Contrairement au charpie qu'on peut trouver sur certains restes de repas...

Je finis par lui rendre sa main tout en m'essuyant délicatement les lèvres du bout de mes doigts, croisant de nouveau son regard.

"Laisse-lui le temps d'agir. On en profite pour s'éclipser? Ca t'évitera de trébucher devant tout le monde."

Oui je sais ce que j'ai dit, je suis à peu près sure qu'elle pourra remarcher après ça. Mais j'ai été humaine, il y a longtemps, et je me rappelle assez bien des conséquences d'une période alitée non désirée... à se lever trop vite, on se casse la figure.

Alors que acquiesce à sa proposition de se lancer maintenant elle prend délicatement mon poignet. Je sens sa peau froide contre la mienne. Ca m’électrise. Je pourrais en avoir peur, cette fraicheur représente l'absence de circulation sanguine et pourtant son regard me rassure. Elle penche sa tête vers mon poignet. Je sens ses lèvres, puis ses dents. J'ai un pincement au cœur lorsque je sens la morsure. Sur le coup ça fait un peu mal. On se fait pas mordre tous les jours. Sur le coup j'ai envie de crier, mais très vite c'est une sensation autre qui me submerge, comme une extase. C'est assez étrange! Mon esprit divague. Je suis comme sur un nuage.

Elle se redresse. Ses crocs se sont retirés de mon bras et je me sens comme flouée tout d'un coup, comme un manque qui lui aussi me submerge.
Sylvana me propose de nous éloigner d'ici avant que je ne tombe devant tous ces gens. J'approuve d'un simple signe de tête; incapable du moindre mot.

Une fois de retour sur les quais, à croire que tous les vampires trainent par là à un moment ou un autre, comme une redite de mon début de soirée. Je me demande ce qu'il va advenir de moi. Je me sens soudain grisée. Des fourmis parcourent ma colonne vertébrale, mes jambes aussi et je m'imagine déjà debout. Je souris bêtement. Je suis parcouru d'un frisson que je ne m'explique pas.
J'abaisse les freins du fauteuil, je déplace mes jambes sur le sol et par habitude je le fais avec mes mains pour les aider. Une étrange douleur et euphorie se mêlent. Une chaleur indescriptible a envahit tout mon corps, malgré la fraicheur de la soirée.
Je repose mes mains sur les accoudoirs et pousse dessus afin de m'aider à me redresser.
Elle m'a dit de prendre mon temps, mais j'estime avoir suffisamment attendue. J'ai l'impression d'avoir été ici même avec mon aïeul, il y a une éternité.

Je sens comme une force nouvelle m'habiter et mes jambes me supportent bien mieux que ce à quoi je m'attendais. Je suis debout en un rien de temps. Je suis tout excitée. Je n'en reviens pas. Je tiens debout, ce que tous les médecins croisés m'ont juré qui ne pourrait plus m'arriver. Je n'ai pas encore fait le moindre pas, mais tout cela est si incroyable, je n'en reviens pas.

- Je suis debout. Vraiment !

Je me décide enfin à faire un pas. Je suis prise d'une telle confiance. Je suis prête à aller au bout du monde, me semble-t-il!
Je fais un premier pas, assez lentement, puis un deuxième et là je me sens pousser des ailes. Mes pas s'enchainent et je vais de plus en plus vite. Je ne tremble pas, je n'ai aucune peur, je n'ai pas mal, même la chaleur qui irradiait tout mon corps à disparu. Je me sens libre; le poids qui s'agrippait férocement à mes jambes s'est comme envolait.

Je crois que je pourrais même courir un marathon, même si j'ai jamais était une grande coureuse. Je ne peux m'empêcher d'éclater de rire. Je ne peux plus m'arrêter. Je me tourne vers Sylvana. C'est complètement fou. Je n'en reviens pas.

Pourquoi les quais? Sans doute parce qu'au fil des siècles, j'ai parcouru la quasi intégralité des terres de ce monde, et bien plus souvent à fond de cale qu'en avion, question de rapports compliqués avec l'astre du jour. La mer représente la liberté. Quand j'en ai assez marre d'un endroit pour m'y sentir prisonnière, je prends le premier bateau qui part et je découvre un nouvel endroit. Donc oui, pousser sa chaise roulante par là-bas, ça me paraissait logique. Et pis c'était pas loin.

Enfin, comme la miss n'a pas l'air portée sur la patience (tiens, je comprends mieux pourquoi Dmitri s'y intéresse...), elle finit par bloquer les roues de son engin pour s'essayer à la marche à pieds. Et refuser la main que je lui tends pour l'aider à se relever. Bon d'accord, si tu veux la belle. Je la regarde faire quelques pas devant moi, finissant par m'installer carrément dans sa chaise roulante pour la regarder marcher, rire, bref, faire preuve de tant de vie qu'elle me ferait presque avoir un pincement au cœur de ne plus le sentir battre dans ma poitrine depuis si longtemps. Presque. Si j'éprouvais des regrets à être ce que je suis, je me serai offerte aux rayons solaires depuis fort longtemps.

"Attends quand même un peu avant de balancer ta chaise roulante aux ordures. Le venin a un temps d'effet limité. Je sais pas combien, mais tôt ou tard, faudra bien que tu roules à nouveau... ou que je te morde à nouveau... enfin, si ça te prend en plein jour, je ne pourrai pas grand chose pour toi... donc en attendant, c'toi qui pousses. Ca fait neuf siècles que je marche moi!"

Cela dit, j'y resterai pas trois heures dans sa chaise moi... ce que ça peut être inconfortable! Sérieusement, va falloir que j'emprunte le fauteuil de Vladimir une journée ou deux pour que mes lombaires s'en remettent... si c'est une mauvaise excuse pour squatter son bureau et passer un peu plus de temps avec lui? Peut-être?

Je suis toujours en plein fou rire lorsqu'elle me dit que tout cela à un effet limité dans le temps et qu'elle ne sait pas combien. Ok, à tout moment ça s'arrête. Je me demande combien de temps ça va tenir : quelques minutes, heures, jours peut-être! On verra, pour l'instant j'ai bien l'intention de profiter un max. Elle me dit que c'est à moi de la pousser. Je ne lui ferais pas l'affront de la laisser rouler; il ne faudrait pas abimer ses mains délicates. Je souris bêtement, avant de ma déplacer en dansant à moitié pour me placer derrière son (mon) fauteuil. Je desserre les freins et la pousse. Moi je suis aux anges. Je pourrais faire ça pendant des heures, je crois.

Soudain, je réagis à la fin de son petit laïus.

- 9 ? 900 ans ? Ah la vache !

J'ai bien compris que les vampires ne pouvaient pas mourir aussi facilement. Je comprends mieux la réaction de Dmitri vis à vis d'elle tout à l'heure. Ils n'ont clairement pas le même âge, il est clairement plus jeune, d'environ six cent ans. Oui je pense avoir à peu près tout retenu de mes différentes discussion de la soirée, après avoir "glissée".

- Je pensais pas que c'était possible d'être aussi vieux.

Si je me permets une petite pique à son égard ? Oui carrément. J'espère juste qu'elle est plus que cette vampire très âgée qui a fait de moi une nouvelle humaine sur deux pieds que simplement la vampire très âgée rencontré tout à l'heure face à Dmitri. Elle est tellement différente face à lui que face à moi. Pourquoi ? M'enfin ce sera plus tard les questions, je ne veux pas qu'elle retire sa proposition de m'aider et de faire de moi un calice; surement moi. Je suis trop égoïste pour ça. Qui ne le serait pas à ma place ? J'ai le droit d'être heureuse, moi aussi, non ?

Je me laisse pousser sur sa chaise, bien que je me rende compte assez vite que cette hauteur de vue est assez frustrante. Pour peu qu'il y ait une palissade de sécurité et adieu le panorama... Oui je sais, si il n'y avait que ça comme problème, tout le monde se laisserait trimballer de la sorte...
J'entends son hésitation juste avant qu'elle ne rebondisse sur mon âge, me contentant de hausser les épaules tout en me retournant vers elle, du moins comme je le peux entre les deux accoudoirs.

"J'ai arrêté de compter arrivée à 900 oui. J'dois pas être loin de 1000 maintenant. Faudrait demander à Vladimir, lui, je suis sure qu'il a compté." Si j'ai des étoiles dans les yeux rien qu'à penser à lui? Surement. "J'les fait pas, c'est le principal."

"Vieux"? Je suis pas vieille, d'abord. J'ai plus d'expérience qu'une bonne partie des personnes vivantes de cette planète, c'est tout.

"Quand on a connu le premier des vampires alors qu'il respirait encore, c'est possible." Une demi-seconde de calme avant que l'excitation ne me gagne, manquant me faire oublier que sa chaise roulante n'est surement pas faite pour résister aux excès de folie d'un vampire. "Ah mais, faudra que j'te le présente! Je suis sure que tu vas l'a-do-rer. Mais pas touche hein. Pas qu'il est à moi, c'plutôt moi qui suis à lui, enfin, bref, c'est des histoires de transformation, de loyauté, d'honneur, tout ça tout ça, c'est d'un compliqué. Tout ce que je sais, c'est qu'il t'appréciera. C'est o-bli-gé. Y a pas de raison, vu que moi j't'aime bien. Et qu'on a les mêmes gouts... enfin, sauf en matière de filles, mais il a un gout horrible pour ça."

Oui, je visais Mina, ça doit être le fait d'avoir vu Dmitri y a trois minutes et demi. D'ailleurs, rien que le fait de penser à elle, et mon excitation retombe aussi vite qu'un soufflé, avec la grimace qui va avec.

"Ah si, conseil d'amie. Vaut mieux éviter d'évoquer le russe. C'est un peu ... compliqué, entre eux deux. Une histoire de fille t'imagine bien. Pas moi hein. Moi j'me contente de jouer au chat et à la souris avec Dimi. Et c'est une jolie petite souris. Quand tu mords, il répond, c'est drôle. Pas comme avec ces bébés vampires qui paniquent quand tu grognes un peu fort. Eux ils sont vraiment pas drôles. Mais je cause, je cause, roule si tu veux, j'ai toute ma nuit... enfin, encore une heure ou deux avant que ça sente le roussi. Tu vois le genre."

Non mais en vrai le fauteuil, je peux dire que j'le souhaite à personne. Parce que de base, c'est pour permettre aux gens qui peuvent plus bouger de bouger, on est d'accord? Alors, pourquoi on peut pas bouger plus que ça dedans? Ces humains...

Elle développe un peu plus sur son âge et je m'arrête. J'en profite pour me faire un petit massage des fesses. Oui bin restez assis plusieurs jours déjà et on en reparle, moi ça fait des mois que ça dure (j'imagine même pas ceux pour qui ça fait des années). Je l'écoute quand elle parle d'elle, de son âge et ce Vladimir, ça doit être lui son créateur dont elle parlait tout à l'heure. C'est lui le plus vieux vampire, et elle l'a connu humain ? Bin merde alors...

- Tu connais le premier vampire ? Il est comment ?

Elle me dit qu'il devrait bien m'apprécier. Après, elle enchaine en disant qu'ils ont pas les mêmes gouts en matière de fille, mais pour tout le reste oui. En l’occurrence, je suis une fille, 'fin aux dernières nouvelles. Elle est bi je vois que ça. Y a deux secondes elle avait des étoiles pleins les yeux en évoquant le Vladimir et là elle dit qu'il y a un truc avec les filles...

- Ca tombe bien, j'ai rien à dire sur lui.

J'en suis pas au stade de lui parler de ma vie, alors encore moins de mes aïeux.
Je me remets à marcher et à la pousser quand elle me le demande.  J'aime bien ce revirement de situation, c'est presque drôle, ironique même je dirais. Même si j'ai bien entendu que ça n'allait pas durer, ça je ne l'ai pas encore accepté. Elle n'aura qu'à me mordre de nouveau dès que je sentirais les premiers symptômes. Je vais forcément le sentir avant que ça n'arrive pas vrai ?

- J'crois que je serais cap de courir pendant la prochaine heure en tout cas...

Je ne me suis jamais senti autant en forme, même avant mon accident. J'accélère. je me mets à courir comme prévu. Je ne me sens pas fatiguée. Je suis bien. J'ai l'impression de toucher du doigts cette sensation dont parle les coureurs quand ils disent que ça leur fait du bien. Jusqu'à aujourd’hui j'avais jamais comprit ce principe. Courir était superflu pour moi, douloureux même; mais là pas du tout.

Je cours pendant une bonne demie-heure sans m'arrêter. Lorsque je m'arrête je ne suis même pas fatiguée, même pas essoufflée.

- Comment ça se fait ? C'est trop bien! J'ai jamais été autant en forme!

Ca n'attend pas vraiment de réponse, c'est plus un constat sur ce qui est, je l'espère, le début de ma nouvelle vie.

A sa question concernant Vladimir, je manque répondre spontanément, comme j'en ai l'habitude, avant de décider de réfléchir deux minutes à la meilleure réponse à y apporter. On parle un tout petit peu de Dracula, premier parmi les premiers, et la moindre des choses, c'est d'offrir un minimum de respect tant à l'homme qu'à sa réputation. Qui n'est plus à refaire, en passant.

"Si je le connais, depuis mon enfance oui. Enfin, pas personnellement au début bien sur, mais il était le prince que j'aurai suivi jusqu'à la mort. Dans la mort. Et bien après." J'en profite pour me replonger dans ces souvenirs d'une autre vie, où je maniais plus facilement l'épée que la marmite. La guerre m'a toujours paru plus simple que la paix, sans doute parce qu'il est plus facile de s'y faire une place. "Les turcs nous assiégeaient, pour ne pas dire qu'ils auraient massacré chacun d'entre nous avec le plus grand plaisir. Sa transformation nous est apparue comme le sacrifice ultime d'un prince prêt à tout pour sauver son peuple, et c'est sans une hésitation qu'un certain nombre d'entre nous, de ses fidèles, l'avons suivi." C'est très résumé mais elle m'a pas demandé un cours d'histoire non plus, aux dernières nouvelles. "Pas besoin de te dire que depuis, y a eu pas mal de casse, et des premiers, de ce que j'en sais, il ne reste que lui et moi. J'imagine que je ne suis pas vraiment objective en l'évoquant. Mais aujourd'hui encore, il est le prince que je suivrais jusque sous les rayons du soleil de midi s'il le fallait. Ma loyauté lui est acquise, pour toujours et à jamais. Et je suis assez difficile quand il s'agit de me faire passer le collier autour du cou."

Si ma pique à l'attention de Mina fait un flop? Oui ben j'imagine qu'il faut connaitre le personnage pour savoir de quoi je parle quand je dis que Vladimir a un goût déplorable en matière de femmes. Me concernant? Je dirai qu'il ne saurait refuser le soutien de sa plus vieille amie. Pour le reste, l'éternité est éternelle.

"Même pas un petit ragot, une histoire? Rien? Nan parce que Vladimir m'aine pas entendre parler de Dmitri, mais moi je suis pas contre alimenter notre prochaine confrontation."

Elle me parle de pouvoir courir pendant une heure, et joint bientôt le geste à la parole, et je n'ai pas besoin de lui confirmer qu'elle le peut ou pas pour savoir ce dont elle est capable sous l'influence de mon venin. Croyez que j'en ai jamais abusé pour m'offrir du bon temps? Et oui, si j'ai transformé certains de mes amants, j'en ai attiré d'autres dans mes filets d'autres manières. De toute façon, la fin de l'histoire a toujours été la même. Je n'aime pas laisser de restes après mon passage.

Une demi heure durant, nous parcourons la ville au pas de course, au rythme de ses pas poussant la chaise roulante sur laquelle je reste assise. Jusqu'à ce qu'elle ralentisse l'allure pour m'offrir un commentaire sur sa situation actuelle. Un commentaire qui ne réclame sans doute pas de réponse, aussi je me contente de profiter de son arrêt pour me sortir de sa chaise, appréciant le fait de marcher sur mes jambes à nouveau. Oui, au bout d'une heure, je sais.

"Bon miss, c'est pas le tout mais si je ne veux pas passer la journée dans le hall du premier immeuble venu, va vraiment falloir que je mette les voiles. L'aube approche, je peux presque la sentir. Mais on se refait ça. Tu sais où me trouver." Ou pas, maintenant que j'y pense. "Au commissariat c'est le mieux. Ca serait dommage qu'un des bébés vampires de Vladimir te prenne pour le petit déjeuner si tu venais seule à la maison."

Si cette pique ci visait Anastasia? Un peu, si il faut être honnête. Mais en attendant, je lui offre un sourire et une révérence avant de tirer la mienne, de révérence.

Sylvana me parle rapidement du tout premier vampire, qu'elle semble particulièrement bien connaître. Elle a des étoiles dans les yeux rien que d'en parler. J'ose même pas imaginer ce qui lui passe par la tête en cet instant. J'ai l'impression de ne pas être à ma place quand elle parle de lui, comme si j'étais de trop. Ce qui se confirme quand elle évoque son départ et me dit que je peux la retrouver au commissariat au besoin (ou plutôt dès que j'aurais perdu ces nouvelles capacités et que j'aurais de nouveau besoin d'elle).

Je ne lâche pas le fauteuil quand elle se lève. Je suis fascinée par son visage, ses déplacements dans l'air sont presque surréaliste. Est-ce que je ressemble à ça maintenant que son venin parcourt mes veines ? Je suis sûre que non, mais l'idée me plaît bien quand même.
Je bois encore ses paroles, alors qu'elle a cessé de parler depuis plusieurs secondes. C'est très étrange comme sensation.

- Ouais, non, j'aime autant pas. Je viendrais te voir la bas alors! Ca marche !

J'allais lui proposer qu'on fasse la route ensemble, ça se fiat entre femme, pour éviter certain danger, mais il est vrai qu'elle n'en a pas besoin. Je me rappelle ses crocs dans mon poignet, cette sensation d'extase et de danger tout à la fois.
J'espérais de tout cœur que nos retrouvailles se ferait vite. Je lui fais un signe de la main lorsqu'elle s'éloigne. Je reste un instant à la regarder avant qu'elle ne disparaisse à l'horizon. Je reste plusieurs minutes à regarder le point où elle a disparu, comme si ça allait la faire revenir plus vite. Je suis incapable de décrire ce que je ressens pour cette femme, mais je sais que c'est nouveau et magique.