Le troll du pont - ft Dante

Le troll du pont

Journée magnifique, soleil qui brille de mille feux, et des embouteillages monstre sur l'avenue que j'ai décidé de prendre. Malgré ma moto, impossible de remonter la file avec les voitures en pagailles, alors j'attends comme une débile que la file interminable de véhicule daigne avancer. J'me demande bien ce que foute les premiers de la file. C'est vrai quoi... Des klaxons furieux se font entendre un peu de partout, rajoutant une couche à mon dépit.

Je tourne la tête, regardant les rares piétons déambuler sur le trottoir...

... Une idée lumineuse me traverse l'esprit ! Et si je roulais sur le trottoir ? Nan parce que bon, c'est pas tout mais je suis une personne très occupée. Pas le temps de rester bloquée dans des bouchons ! Je vais pour mettre mon fabuleux plan à exécution quand autre chose attire mon attention : l'entrée du parc.

Parfait. Le traverser me permettrait de gagner encore plus de temps ! Je mets mon clignotant et déboite sur le trottoir et m'engage sur le chemin poussiéreux du parc. C'est vachement pratique en fait, surtout qu'il n'y a quasi personne !

Trop heureuse de pouvoir rouler a une vitesse décente, je lâche un petit cri de joie et regarde les par-terres qui commencent à fleurir. Je suis d'humeur niaise aujourd'hui. Du genre a m'extasier devant un chaton et écouter gazouiller les oiseaux. Mais ma bonne humeur s'envole lorsqu'un choc stoppe ma moto et manque de m'envoyer au sol.

Mon attention se focalise immédiatement sur la route. Juste à temps pour voir un homme voler par dessus le parapet du petit ponton.

Oh merde...

Je vais être bonne citoyenne et m'arrêter pour voir si tout va bien. Soupirant, je descends de ma monture de métal et me penche pour voir où en est le type. Je jette un œil, et reste un instant indécise devant la forme immobile allongée au sol.

Re merde.

Qu'est ce qu'il foutait en plein milieu aussi ? Il ne m'a pas entendu arriver ? Je me vois déjà devoir trouver une équipe pour enterrer un cadavre que je le vois remuer le bras. Un soupir de soulagement m'échappe, il est vivant, je vois pas de sang, tout va bien. Il se tâte le crâne avant de se relever, ce qui me confirme que je peux me barrer sans plus de cérémonie.

Je remonte sur ma bécane avant de me figer. C'est possible d'aller bien après un vol plané d'une hauteur qui commence à être conséquente ? Je pressens encore une débilité de paranormal là-dessous... Et vous savez quoi ? J'aime bien les débilités. Je démarre et sans plus aucune considérations pour les pâquerettes fleurissantes, je roule sur l'herbe pour rejoindre plus rapidement le dessous du pont. Je laisse ma sublime monture -qui n'est pas vraiment à moi- dans un coin et me rapproche en sautillant.

- Franchement, tu pourrais faire un peu attention ! C'est dangereux de marcher en plein milieu sans regarder où on va !

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Le troll du pont

 
Quand tout va bien dans ta vie, que t’as le smile jusqu’aux oreilles et que tu viens de partir de chez toi après une bonne nuit de débauche avec ton mec, le mieux, c’est d’écouter la musique à fond et de profiter du soleil sur ta peau vampirique qui normalement devrait te consumer. Alors ouais, Maroon 5 à fond je n’hésite pas à pousser la chansonnette sur Animals qui me fait vibrer en ce moment. Hyper glauque compte tenu que le clip c’est quand même un stalker qui fantasme sur une nana et s’imagine lui faire l’amour au milieu des cadavres d’animaux et recouvert de sang. Ok, sans les cadavres, même juste le sang, on va être honnête, lier le sexe à la bouffe n’a jamais fait partie de mes fantasmes. Bien au contraire. Déjà qu’à la base, en étant humain, on était à la diète sévère avec le régime politique qui ne donnait pas assez à la population et une fois mort … ben c’est quand même poisseux le sang donc nope ! Et une femme, double nope !
 
« You can’t deny, nynyny
The beast inside, side side side ! »
 
Et c’est là que je me fais faucher en pleine jeunesse … heureusement que l’immortalité est une option dont j’ai coché la case. Je ne la sens même pas venir qu’une moto me fonce dessus. Le hic, c’est qu’on est sur un pont, que je suis dangereusement près du bord et que j’ai mis mes reflexes de vampire au placard en portant ma perle en plein soleil et occultant mon audition par mes écouteurs. Alors voilà, vole plané pour le beau vampire et je finis rétamer comme une merde en bas.
 
« mmmh »
 
J’ai mal, potentiellement une ou deux vertèbres de fendues, j’ai pas envie de compter les côtes et l’odeur de cramer qui parvient à mes narines m’inquiète grandement sur un autre problème qui va vite s’imposer. Je retire mon bras exposé aux rayons du soleil et profite de l’ombre du pont pour grogner et effectuer une tentative pour me relever sans trop avoir l’air d’un octogénaire qui a oublié son déambulateur. Petite insulte en serbo croate pour saupoudrer le tout et une main rapide dans ma chevelure me confirme l’évidence même.
 
« Bordel … foutue perle ! »
 
Je regarde autour de moi et me redresse tant bien que mal. On va dire que l’avantage, c’est que sans ma perle, je douille un peu moins, désavantage … il fait putain de jour et je suis coincé sous un pont comme les trolls des légendes … je viens de résoudre un mystère, ce sont des vampires ces fameux trolls des contes !
 
Une brunette vient se garer devant moi et m’attaque à grand coup de remontrance alors que je reste dépité, à l’ombre du bâtiment pour éviter de finir en tas de cendres.
 
« Sérieux, mais t’es un danger ! »
 
Je suis à deux doigts de lui dire qu’elle aurait pu me tuer, mais c’est pas vrai ! Du coup je me ravise pour ne pas mettre en avant mon incroyable « chance » d’avoir survécut à l’accident, la chute et tout le tralala … okok elle va bien croire que j’ai le cul bordé de nouilles (cette expression est immonde).
 
« Et toi alors … »
 
Je m’avance vers elle, emporté par mon agacement et un brûlure soudaine me rappelle que je ferais mieux de me retenir. Un pas en arrière et je pousse un nouveau juron.
Un regard autour de moi pour trouver l’artefact, des années à jouer à « où est Charlie » servant grandement ma cause et je soupire.
 
« Tu peux me passer ça s’il te plaît »
 
Ok, je mets de côté mon envie de lui tordre le cou pour le moment et je me rends bien compte que je suis en position de faiblesse. Je lui désigne la perle … à ses pieds … et lui plante mes prunelles bleutées dans les siennes.
 

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Le troll du pont

« Sérieux, mais t’es un danger ! »
- Et toi un inconscient, que je rétorque avec le sourire.

Bah ouais, encore un qui écoutait de la musique à fond sans doute. Au moins, il avait une excuse, pas comme d'autre qui traverse en riant et se mange une camionnette. J'étouffe un gloussement à ce souvenir, alors que l'apparente détente de mon interlocuteur vole en éclat pour quelques secondes. Le mec du pont se rapproche d'un pas et reculement soudainement et jurant.

Il scrute le sol et j'en profite pour l'examiner rapidement. Bon, on va faire ça succinctement, je pourrais vous le détailler, je vais m'en tenir à : c'est un très bel homme. Au passage, je note que la chemise de l'inconnu n'a pas appréciée le petit vol plané offert par la maison, mais il me tire de mon inspection en désignant mes pieds et me demande de bien vouloir lui passer... un truc.

Je m'accroupis et regarde l'objet en question, qui ressemble à une banale perle. Hum. Je me laisse tomber sur mon derrière sur l'herbe et récupère le machin pour le scruter de plus près. Ouais, c'est bien une perle banale. Enfin pour moi. Punaise. J'ai jamais Maxwell sous la patte quand il me serait le plus utile.

- Tu peux pas venir la récupérer ? La flemme de bouger.

C'est une excuse comme une autre. Mais devant son inaction, je claque ma langue contre mon palais. Faudrait qu'il ait une raison en béton armé pour que je bouge mes fesses jusqu'à lui. Remarquez, je pourrais lui jeter dessus, mais j'ai une envie d'emmerder le monde assez développée.  

- Ah en fait, je m'appelle Ghilian. Et toi ? C'est un peu long dans ma tête de te retenir comme le "mec du pont".

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Le troll du pont

 
C’est dur, super dur. J’ai des envies de meurtre et ça peut même aller doucement vers l’envie de planter mes crocs dans sa gorge pour tout dire, j’ai faim … Face palm interne et je regagne mon calme, ce qui n’est pas chose aisé, vue sa remarque. Inconscient … Je mords ma lèvre assez profondément pour sentir mon propre sang avant de revenir à un sujet bien plus important puisqu’il semblerait que j’ai égaré un petit truc … juste ma perle … mon moyen de survivre au soleil. Sans ça, j’suis bon pour finir en tas de cendres et comble du bonheur, elle est au pied de la donzelle. Je suis cuit, assez littéralement.
 
La fourbe se penche pour ramasser mon bien et je sens toute la flemmardise du monde dans les paroles de la jeune femme. Je vais la décapiter c’est définitif. Je fronce les sourcils et réfléchis à comment me dépêtrer d’un telle situation … qu’elle ne me force pas à utiliser mon charme, j’en ai pas envie, mais s’il le faut, j’y viendrais.
 
« Non, je ne peux pas … je suis … superstitieux et sans cette perle, je ne m’expose pas au soleil. Peur d’avoir un cancer. »
 
Cherchez pas, j’ai trouvé que ça de plausible. Je lève les yeux au ciel, autant énervé par son comportement que par ma stupidité. Elle se présente et peux que rire cyniquement à son excuse.
 
« Dante … »
 
Je soupire. Bon, c’est dit avec tant de lassitude qu’elle va p’t être avoir pitié de moi sans compter que j’ai incroyablement envie de lui rentrer dans le lard, mais le bisounours en moi me dit que c’est la pire idée au monde. Alors comme d’hab’ je me la joue cool et je sais que je peux toujours avoir un back up au pire.
 
Juste, donne-moi ma perle et point, tu m’as déjà renversé, j’suis flic et j’aurais déjà assez de raison de te coffrer rien qu’avec ça. J’te passe l’éponge, j’suis gentil, mais fais pas chier.
 
Ok, je l’ai pensé, mais j’peux pas lui dire ça … ça a l’air d’être une garce et je vais jamais avoir ce que je veux si je fais ça. Du coup, je m’assieds par terre et attend. Je regarde ma montre : 8h16. Je suis en retard. On va essayer d’ignorer le lambeau de chemise que je vois pendouiller, mais non, je vais pas aller au taf comme ça quand même, j’ai une image de beau gosse à préserver.
 
« Oh putain ! »
 
J’adore cette chemise, j’suis blasé ! J’arrache le morceau qui ne tient presque plus et remonte le reste de la manche, ce qui me donne un air bucheron viril un peu étrange … Passons.
J’avais juste jeter mon dévolue sur celle-ci pour le mariage et ben y’aura plus qu’à retourner chez le tailleur et cette fois-ci, je ne la porterai pas avant le jour J. Un autre soupir et j’active tous les moulins à vent de la région … ok, y’a qu’un campagnard pour dire ça, parce qu’à Chicago, je suis pas sûr qu’il y en ait un seul. Je masse mon crâne d’une main qui finit sa course dans ma tignasse que je tire en arrière. De l’autre, j’extirpe mon téléphone et me dit qu’il serait grand temps d’envoyer un message à mon homme juste au cas où. Je pense qu’il m’en voudrait si je le préviens pas que je vais finir en poussière. Du genre : J’ai une situation … j’ai perdu ma perle, si jamais je la retrouve pas tu pourras venir me chercher stp ?. Je ne l’envoie pas de suite, on verra déjà ce que me dit la brunette et honnêtement, je préfère ne pas l’impliquer si cela n’est pas nécessaire.
 
« Bon et ma perle ? »
 
Pas que je m’impatiente, mais si j’peux éviter à mon homme de pas pouvoir se reposer avant de commencer son service après la nuit qu’il a eu, j’vais finir décapiter en deux deux !
 
 

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Le troll du pont

Pendant que ma matière grise enregistre le prénom du gus, vachement chelou au passage, mon regard reste fixé sur la perle.

Si son histoire de cancer me convainc ? Franchement, il y a un an, ouais, je l’aurais pris pour un illuminé. Un illuminé chanceux vu que je vous rappelle qu’il a volé par-dessus un pont et qu’il va plutôt bien.

Mais maintenant que j’ai eu de sublimes cours accélérés sur la magie et le reste –Max est un professeur épouvantable - je suis en droit d’être suspicieuse. Oh et, si vous vous posez la question, les « cours » de Max se résument à «oui ca existe et non la magie c’est pas comme dans Harry Potter ».

- Du coup je peux me faire dorer la pilule en toute sérénité ? Cool.

J’me laisse tomber de tout mon long dans l’herbe, ce qui ne semble pas offusquer mon interlocuteur vu qu’il se concentre sur sa chemise. Je l’entends jurer et soupirer. Compréhensible, vu l’état du vêtement. Tiens, au son, je dirais même qu’il en déchire un morceau. Ça pourra pas être pire. Je me redresse et fais une moue dubitative devant son nouveau look.

Décemment, je peux pas laisser partir quelqu’un fringué d’une manière pareille.

Il bricole son portable avant de me redemander sa perle.

- Franchement, t’as plus besoin d’un tailleur. Oh et puis, peut-être d’un médecin aussi. J’ai pas fais de grandes études mais...

Je m’arrête avant de me corriger, sourire aux lèvres :

- En fait j’en ai pas fais du tout, mais t’as fais une belle chute quand même. Puis c’est moi où t’as une jolie brûlure sur le bras ? Et puis tu...

Je suis coupée dans mon élan par mon propre portable qui se met à vibrer furieusement et qui diffuse presque immédiatement Natural de Imagine Dragon. Je roule des yeux en soupirant. Max. Il laissera un message. Je zappe son appel, mais aussitôt mon deuxième portable sonne. Et je refuse de nouveau l’appel. Avant d’entendre mon troisième téléphone sonner.

OK. Messages reçus : reprendre un nouveau téléphone et arrêter d’emmerder le monde pour ne pas avoir de retour de karma dans la figure. Je décroche et ne l’écoute même pas répondant un joyeux :

- Ecoute je te rappelle, actuellement je peaufine mon bronzage dont tu ne pourras pas profiter ! La bise a ton hideuse araignée !

Paf. Raccrochage au nez dans les règles.

- Donc j’en étais où avant d’être grossièrement interrompu...

Je scrute le brun en fronçant les sourcils :

- Ouais donc, ta chemise. Tu peux pas te balader comme ça, c’est un crime contre le bon goût !

Si j’ai délibérément pas parlé de la perle ? Ouais. D’ailleurs, histoire de bien enfoncer le clou je m'amuse à la faire rouler entre mes doigts. Je suis une sale gosse et j'assume.

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Je respire. Ça sert à rien dans ma situation de macchabé, mais ça m’aide à garder mon calme. Qu’on s’étonne pas que les vampires soient sanguin si l’on considère que respirer est une option ! Comment est on sensé faire autrement pour se recentrer ?

Non … JE peux me faire dorer la pilule et toi tu me rends mon bien ! Bien sûr, je me tais et me contente de reprendre une fausse inspiration en essayant également d’oublier ma tenue en lambeau … je sens que ce ne va pas être facile de marchander avec elle … une chieuse !

« Merci pour ton inquiétude, mais je vais très bien et pour le vêtement … - je jette un œil une fois encore sur ma chemise – je me débrouillerai aussi … »

Elle continue de faire semblant de s’inquiéter pour moi alors que je ne lui demande qu’une simple chose pour laquelle elle ne semble pas décider à obtempérer. Son téléphone ne cesse de l’interrompre et voilà qu’elle décroche … La brunette a l’air aussi sympa avec le mec au téléphone que moi … j’en conclu qu’il vaut mieux que j’envoie mon texto à Nath, sinon je suis bon pour finir en tas de cendres. Je soupir de dépit et envoie le sms … la dèche quand même.

« Ma chemise était destinée à être porté pour le mariage de mon beau-frère ! Elle était très bien jusqu’à ce que tu la ruines ! Et maintenant, je suis bon pour devoir retourner chez moi avant d’aller au taf donc si tu veux bien être sympa, j’suis déjà à la bourre et si mon mec doit venir me chercher … »

Je lève les yeux au ciel … rien qui ne la concerne de toute manière, mais c’est sûr que Nath va pas trop apprécier qu’on se paye ma tronche … de là à attaquer une fille … j’pense pas qu’il irait jusque-là. Voir même j’pense qu’il y irait très gentiment … non en fait j’en sais rien de ce qu’il ferait, mais moi, tout de suite, j’ai presque envie de la croquer ! Pas par passion, juste pour me défouler.

Je la regarde jouer avec mon bien comme si de rien n’était …

« Et tu comptes faire quoi de toute manière contre ma chemise en lambeau ? T’en as pas une sous la main que je sache ! »

Franchement, je dois me calmer. Je dois me calmer parce que je comprends bien que si je la braque, je vais l’avoir dans l’os et si je rentre dans son jeu et bien … je vais aussi l’avoir dans l’os … Quelle tristesse quand même d’être confronté à exactement le genre de personne qui me déstabilise. Je masse une seconde fois mon visage, m’arrêtant un peu plus longuement sur mes paupières qui déjà se trouvent fortement endolories par la trop forte luminosité. Déjà je devine que le soleil tourne et rien ne peux me laisser penser que Nath ait lu le message que je lui ai envoyé. Si ça se trouve, il ne le lira pas avant son réveil et ça peut prendre du temps. Je finis par m’assoir sur le sol. Quitte à foutre en l’air mes fringues, autant les achever dignement et mon cul dans la terre me semble être la manière la plus respectueuse. Bien sûr, je veille à me mettre aussi loin que possible de la ligne d’ombre pour ne pas finir brûler une seconde fois dans les dix prochaines minutes. Je parie qu’aucun humain ne prête autant attention qu’un vampire à la vitesse à laquelle les ombres se meuvent. C’est pourtant à une vitesse vertigineuse que l’astre du jour les fait défiler.

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Dire que je suis atterrée lorsque j’apprends que la chemise était destinée à un mariage est un faible mot. Mais qui, sur cette foutue planète, porte un vêtement destiné à une cérémonie pas encore passée ? Un peu plus et je me taperais la tête sur le parterre de pâquerettes devant tant de négligence. Quel manque de bon sens sérieux...

La partie sur le taff par contre... ça me fait hausser à peine un sourcil.

- Sérieux, tu seras moins pressé d’être à l’heure le jour de ta mort.

Et puis son mec va venir le chercher avec quoi ? Un parasol géant ? Deux coups de pied au derrière et hop ! Fini les superstitions. Ou alors c’est pas de superstitions et je tiens un truc fabuleusement cher dans la main. Mais j’ai beau observer à nouveau minutieusement la perle, elle ressemble à toutes les autres.

« Et tu comptes faire quoi de toute manière contre ma chemise en lambeau ? T’en as pas une sous la main que je sache ! »

Si ce n’est pas une pointe de colère que j’entends dans la voix de Dante, dès demain je deviens serveuse dans un fast-food ! Qui finira brûlé dans d’étranges circonstances quelques jours plus tard...

Je le regarde se laisse tomber au sol, totalement dépité. Je fais cet effet à beaucoup de gens.

- Je crois que j’ai oublié ma valise magique chez moi.

Sourire d’agrément qui va parfaitement avec mon ton sérieux. Etrangement, la plaisanterie n’a pas l’air de le détendre. Franchement ces employés stressés j’vous jure....

- En revanche, il y a quelques boutiques dans le coin. Sauf si tu peux te ramener fringué comme ça au taff... Mais j’en doute, vu que tu dois déjà te pointer à l’heure... Peut-être même que je peux te larguer pas loin d’une d’entre elles. Faut que je soigne mon karma.

Et n’y voyez pas la recherche d’une quelconque rédemption pour son vol plané malencontreux, qui est dû, je vous rappelle, au fait qu’il écoutait de la musique beaucoup trop fort.

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Je ricane en l’entendant parler de ma mort. Si elle savait … j’ai plutôt pas raté le rendez-vous et même bien au contraire. J’aurais tendance à dire qu’il s’éternise depuis plus de trente ans. Franchement, je ne suis pas du tout du genre à me prendre la tête et je continue très bien sur ma lancé. Je sais bien que je n’ai pas toute la journée, mais je mettrais ma main à couper qu’on m’en blâmera pas que j’arrive en retard surtout en connaissant mes circonstances atténuantes. Moralité, devant un jury : ça passe. Alors oui, je m’énerve, mais je ne vais pas montrer les dents pour autant. J’ai été bien dressé que voulez-vous !

« Et moi donc … j’y ai carrément laissé mon sorcier. »

Je soupire à ma propre connerie et referme les yeux pour les laisser se reposer du trop pleins de lumière. Franchement, je survis et dépends bien trop de l’artefact entre les mains de la jeune femme et plus ça va, moins j’aime ça. Un nouveau soupir m’échappe et je me convaincs moi-même qu’un tour dans une boutique de fringue pourrait ne pas me déplaire même si la compagnie est des plus étranges.

« Rends-moi ma perle, j’irais me trouver une chemise et je t’absous pour que ton karma redevienne aussi clean qu’avant que tu essayes d’attenter à ma vie. »

J’exécute un signe digne d’un prêtre à son attention et tends une fois encore ma main en veillant à ne pas m’exposer à la lumière. Clairement, je pense pas avoir fait mouche plus que cela concernant mon absolution, mais elle finit par m’envoyer la perle que j’attrape à la volée. Dun geste sûr, je la tresse à ma tignasse et un troisième soupir passe mes lèvres.

« Merci. »

Je me redresse et franchit la ligne d’ombre, d’un pas serein. Honnêtement, j’hésite à rentrer vite à la maison sinon … de toute manière, Nath a reçu mon texto et va pas me lâcher si j’le rassure pas.

« Tu veux pas plutôt me poser devant chez moi, j’me débrouillerai après. »

Elle conduit comme une tarée, mais on va dire que ça sera pas pire que la carcasse à deux roues de mon homme et je crains pas trop pour ma vie. La sienne, c’est bien moins sûr, mais avec ou sans moi, elle la mettra tout autant en danger. L’autre truc, c’est qu’avec le poids de la perle, je ne suis même pas sûr de pouvoir rentrer si vite que cela. Définitivement plus rapide si je la laisse me reconduire directement là-bas. Je m’approche de la jeune femme et lui tends pour la seconde fois la main, cette fois-ci pour l’aider à se relever également. J’suis vraiment bon prince quand même.

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Si je tique en l'entendant parler d'un sorcier ? Un peu. A Chicago j'ai l'impression que d'être humain, c'est pas vraiment la norme. Après on va pas se mentir, ça change pas grand chose à ma vie c'est juste... plus fun de savoir qu'au coin de la rue, la dame qui promène son chien, c'est peut-être une sorcière ultra badass qui peut invoquer une tempête d'un claquement de doigt. Ou de se dire que son associé est un putain de hackeur sorcier qui peut tuer des luminaires.

Ou alors le type fait juste écho à ma pauvre vanne de valise magique, allez savoir.

« Rends-moi ma perle, j’irais me trouver une chemise et je t’absous pour que ton karma redevienne aussi clean qu’avant que tu essayes d’attenter à ma vie. »

Je penche légèrement la tête alors qu'il me demande une énième fois sa perle. Bon allez, soyons une adorable petite dame et accédons à sa demande. Surtout s'il absout mon karma ! Je lui lance son bien -j'allais pas me lever pour lui rendre, faut pas rêver- et le regarde remettre la perle avec dextérité dans ses cheveux. ça doit faire un bail qu'il la possède pour aller aussi vite !

Une fois la babiole remise en place, il se pointe enfin au soleil et malgré mon attitude de sale gosse, me tend une main pour m'aider à lever mon popotin. Main que je saisis avec bonheur, même si sa peau gelée me laisse une sensation peu agréable. Je vais peut-être lui acheter des gants chauffants en plus d'une chemise. Et comme s'il lisait dans mes pensées, il me demande de ne pas l'emmener faire les boutiques mais de le déposer chez lui. C'est pas bien de donner son adresse à des inconnus comme ça ! Tout sourire, je trottine vers ma moto en acceptant sa demande... même si dans ma tête j'ai déjà planifié un arrêt shopping. Bah ouais. J'aime bien faire les boutiques. Et avec un inconnu, c'est encore mieux ! Et puis franchement, je radote, mais l'état de sa chemise quoi...

Poussant ma monture de métal jusqu'à la sortie du parc -on va pas tenter le diable et lui proposer de rouler dans un endroit piéton- c'est avec bonheur que je retrouve la civilisation puante et bruyante ! Et quelques feux rouges grillées plus loin, nous arrivons à destination du paradis des chemises.

- Franchement, ça craint de porter un chemise réservée pour un mariage avant le mariage. C'est bien de vivre dangereusement, mais il y a des limites ! Résultat, tu te retrouves à faire les boutiques en pleine matinée avec moi ! Enfin, c'est toujours mieux que d'aller bosser, je suppose.

Si je lui laisse le choix ? Pas vraiment. Mais soyons clair, c'est pas comme s'il rechignait à me suivre sur le trottoir, ou s'il renâclait à entrer dans la boutique que j'ai choisi.

- Du coup, il t'en faut deux. Une pour maintenant, et une pour le mariage ! Histoire de pas refaire deux fois la même erreur !

Je lui adresse un sourire éblouissant avant de sautiller jusqu'aux premières pièces exposées, ignorant ostensiblement le vendeur qui s'est adressé à nous.

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Le troll du pont

J’ai assez arpenté les rues de Chicago pour remarquer rapidement qu’elle ignore totalement ma demande et se dirige dans une toute autre direction. Est-ce que ça m’étonne ? non, vraiment pas. Elle a l’air d’être le genre de demoiselle qui n’en fait qu’à sa tête et j’ai juste envie de dire que je suis trop occupé à me demander où mettre mes mains autour de sa taille sans toucher quoique ce soit de gênant. Autant avec mon mec, je m’agrippe sans problème, mais là, si je veux pas valdinguer au premier virage, faut que je me cramponne sans avoir l’air non plus désespéré. Je zappe les feux-rouges grillés, oublie de m’indigner concernant son je-m’en-foutisme complet des priorités et j’en passe et des meilleures. Je capitule sur tout … Même lorsque la jeune femme se gare en plein trottoir devant une galerie aux magasins branchés, j’esquisse même un sourire. C’est mon p’tit côté fashion victim … je kiff ce genre d’endroits.


« OK chérie … On va faire exactement ce que tu dis. »

J’suis bon prince et bonne poire en fait … Donc j’envoie un second sms à mon homme pour qu’il ne s’inquiète pas et que je lui raconterais ce soir. Il va se foutre de moi et j’pourrais pas lui en vouloir pour le coup, mais je serais admirablement bien sapé et ça on va dire que ça me console partiellement.

« Que veux-tu, j’suis un p’tit fou … mais pour ma défense, j’avais pas prévu de tomber sur toi, ou plutôt que tu me tombes dessus »

Un autre truc, c’est que la brunette a l’air incroyablement contente de venir faire les boutiques avec un parfait inconnu. Ghilian me rappelle étrangement ma chère Axel qui a ce même côté enfantin et toujours de bonne humeur et sans oublier que je suis tombé sur Axel parce qu’elle a percuté ma Tesla avec son pot de yaourt ! Au final, je suis p’t être fait pour rencontrer des gens que de cette manière … Nath c’était direct en prison, il a sans doute la palme et pourtant il a pas attenté à ma vie directement … Non, je plaisante, c’est Ghilian qui a la palme rien que pour l’état de ma chemise.

Je remercie rapidement le vendeur qui nous propose son aide avant de le congédier. J’ai une idée bien trop précise pour ce mariage, c’est mort, je ne me laisserai pas influencer par l’avis d’un vendeur.

« Donc une chemise en lin naturel avec un col mao sinon je fais la gueule et la seconde chemise je m’en fiche, mais pour le mariage j’ai déjà le reste du costume et c’est vraiment celle-ci que je veux. »

Je pose mon regard sur les différents mannequins exposés et c’est pas de bonnes augures. Je claque ma langue, mais j’suis tellement exigeant avec les fringues que je compatis totalement quand Nath fait une tête de chien battu après plus d’une heure à débattre si je prends le jean classique ou un chino beige …

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Le troll du pont

- Oh mais c’est que monsieur sait ce qu’il veut !

Je sautille tout sourire jusqu’aux rayonnages qui nous intéresse, tout en lui dispensant mon avis, même s’il n’est pas –encore- sollicité.

- Franchement c’est un peu étrange comme choix un col mao sur une chemise en lin. Tu perds le côté décontract apporté par la matière avec un col aussi strict. Une préférence pour la couleur ?

Sinon je serais sans pitié et lui ferais essayer toutes les chemises correspondant à sa description. Sauf la noire à grosses fleurs blanches. Je ne suis pas un monstre. Mais pour le moment, vu que je n’ai pas vraiment regardé où nous sommes, une rapide vérification s’impose.

Nan parce que bon, c’est bien joli d’aller faire les boutiques, mais quitte à claquer de la thune, j’aime autant que ce soit dans de la qualité. Même si c’est pas pour moi. Mon petit côté altruiste qui ressort, que voulez-vous.

C’est donc sans aucune vergogne que je dépends une chemise avant de tirailler dessus. Parfait. Les coutures résistent à ma force de moucheron. C’est déjà pas mal. Et d’un simple coup d’œil, les coutures semblent régulières et assez serrées.

- Tu crois franchement que des gens payent pour cette horreur ?

Je pointe du menton la chemise à fleur présentée au fond de la boutique, qui me perturbe plus que je ne veux l’admettre.

- On dirait qu’elle est sortie tout droit des vieilles séries des années 80.

Un frisson de dégoût me traverse l’échine avant que je ne me remette à farfouiller dans les modèles, avant qu’une brillante idée ne me traverse l’esprit :

- On devrait peut-être aller dans une boutique sur mesure non ? Enfin si le mariage est pour bientôt, c’est fichu...

Retournant à ma quête de la sainte chemise en lin naturel à col mao de couleur appropriée, je trouve enfin la pièce parfaite.

- Celle-là !

Je manque de trébucher en me retournant trop vite sous l’effet de l’euphorie. Quand je vous disais que j’aime faire les boutiques ! Néanmoins, un rapide coup d’œil sur la chemise et son futur propriétaire fait redescendre d’un cran mon excitation. Une taille d’écart. Et ça, j’en mets une main à couper sans hésitation. Heureusement, quelques secondes suffisent à réparer cette triste erreur.

- Allez zou ! A l’essayage !

Je lui fiche le cintre et la chemise dans les mains avec un grand sourire, et le pousse sans vergogne vers les cabines, histoire que je puisse lui sortir tranquillement une sélection à la Ghilian pour la chemise avec laquelle il va se balader toute la journée. C’est amusant deux minutes les chemises de mariage, mais il a l’air d’avoir une idée ultra précise du truc. Mon talent vestimentaire ne peut pas s’exprimer à son plein potentiel. C’est frustrant.

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Le troll du pont

Je hausse les sourcils en sa direction.

« Parce que tu crois que c’est juste avec ma belle gueule que je peux assurer mon charme ? Nope chérie, faut aussi pas s’habiller comme un sac ! »

Alors ouais, chemise en lin naturelle et col mao … et je la veux écru donc toutes les autres, on oublie direct.

« Et ben justement, j’aime la combinaison des deux qui montre que je peux être cool et intransigeant. Je veux du écru/blanc cassé. »

Je jette un œil sur l’horrible tenue qu’elle me montre et grimace.

« Malheureusement … paraît que tous les goûts sont dans la nature … donc les mauvais aussi. Et même dans les années 80, je portais pas ce genre de truc. »

Oui, bon ben j’ai pas calculé que visuellement, elle doit pas estimé que je devais être bien vieux dans le années 80, surtout que vue ma tête, je fais plutôt milieu année 90 …
Quant à la date du mariage … j’ai même plus en tête la date exacte … faudra vraiment que je redemande à Max comment ça se passe, parce que je mettrais ma main à couper que Nath en a pas la moindre idée aussi. Faut dire que l’invitation s’est faite à l’orale, sans faire-part ou truc du genre, même pas un texto.

« J’sais pas, j’peux essayer d’appeler Axel, mais si elle est avec les jumeaux, aucune chance qu’elle me réponde. »

Je mordille ma lèvre et la laisse ma guider vers une cabine d’essayage, chemise en main … ah merde, mais c’est que celle du mariage et elle avait pas parlé d’une seconde pour la journée ? Enfin bref, sinon je prendrais deux fois le même modèle s’il faut.

J’enfile donc docilement le modèle choisi et sort de la cabine en me regardant dans le miroir le plus proche …

« Fichtre … »

Je grommèle contre moi-même d’avoir oublié ce léger détail … ça fait une paye que je n’ai plus de reflet et que je me rase au bon souvenir de mon faciès, que me remettre une mèche en place vient de mon instinct plutôt qu’autre chose ou encore que je me fie au regard de mon homme pour être sûr que rien ne cloche avant que je sorte … faut dire que des fois, quand il a pas les yeux en face des trous, c’est pas ouf comme méthode. La première fois que j’ai revu mon image, c’est à la création des appareils photos numériques … J’en aurais pleuré si j’en avais été capable. Moralité, j’ai une passion pour prendre des selfies avec mon téléphone lorsque Nath est dans les parages et je suis le cliché du mec qui a une photo de son copain et lui en fond d’écran. Pour ma défense, on est incroyablement beaux ensemble, pas étonnant que tout le monde se retourne quand on se promène bras dessus bras dessous dans la rue. Sinon, pour en revenir à mon problème actuel, ça serait p’t être intéressant que je laisse pas la brunette remarquer ma particularité …. Enfin, si ce n’est pas déjà trop tard bien sûr.

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Le troll du pont

Pendant que ce cher Dante dit des énormités plus grosses que lui –come s’il connaissait les années 80... Quoique je vais arrêter d’essayer d’estimer l’âge des gens à Chicago- je ne peux m’empêcher de glousser intérieurement. Un mariage dans pas longtemps, une Axel avec des jumeaux... Que Chicago est petite... Enfin personnellement, j'appellerai plutôt Max pour ce qui est question d'organisation, parce que Axel est vachement moins carrée.

Mettant le temps de l’essayage à profit, j’attrape un portique qui traîne avec quelques cintres vides suspendus dessus, et je commence la grande sélection. Sûre de moi quand à la taille, je tire l’objet à ma suite en y accrochant tout ce que je juge acceptable à mes yeux, sans faire attention aux regards qui me sont portés.

J’ai quelqu’un à habiller et c’est quelque chose que je prends très au sérieux. Accrochant encore un vêtement sur la tringle métallique, je compte rapidement.

Sept.

Sept chemises. Choix pas assez étoffés. Je passe dans d’autres rayons, continuant d’agrandir la collection été/automne by Ghilian.

Je suis terrible.

C’est en chantonnant que je me ramène vers les cabines d’essayage avec une ribambelle de chemise à ma suite, sans lui faire l’affront d’y suspendre l’horreur à fleurs.

- J’espère qu’elle te va parfaitement, parce que pour ta gouverne, une sur-mesure ça va être short. Le mariage, c’est dans 10 jours.

Je lui adresse un sourire resplendissant, sans capter une seule seconde que le miroir derrière ne réfléchit rien.

- Huuum...

Je l’observe quelques instants, avant de pousser sous son nez mon portique bien étoffé d’article.

- Je pense sincèrement que tu peux passer à ton choix de la chemise du jour. T’es assez sexy pour rameuter la moitié des esseulés du mariage.

L’autre moitié sera pour moi, bien entendu.

- Tu la connais d’où, Axel ?

Autant rentabiliser le passage en cabine d’essayage pour papoter. Sinon je vais retourner dans l’espace de vente et lui rapporter de nouveaux articles. Pas que ça me dérange, mais qu’il commence déjà par mon premier choix, on verra ensuite.

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Le troll du pont

Ok, j’aime les fringues et de la voir m’apporter toujours plus de chemises, j’avouerais presque que le shopping avec Axel m’avait grave manqué. Déjà que je suis dég qu’elle soit allée choisir sa robe sans moi, c’est honteux ! On devrait toujours embarquer son meilleur ami gay pour ça. Par contre, quand elle annonce la date du mariage pour dans dix jours, je lâche un juron en slave me rendant compte que j’suis vraiment à côté de la plaque en ce moment. Il faut dire qu’étrangement, la blondinette a pas trop donner signe de vie ces derniers temps et je devrais peut être commencer à me faire du souci.

Lorsque la demoiselle m’observe, je ne peux m’empêcher de tourner sur moi-même pour la laisser me voir sous toutes mes coutures ou celle de la chemise en tout cas. Un sourire satisfait se fiche sur mon faciès à sa remarque et je valide totalement son idée.

« Parfait ! "

Quant à sa question concernant Axel, je remercie le sang d’avoir quitté mon système veineux pour ne pas pigmenter mes joues.

« Eh bien, vous avez un point commun … Elle venait de me foncer dessus avec son pot de yaourt … Sauf que j’étais en voiture aussi, donc ça a pas ruiné ma chemise, mais mon phare arrière … Et sinon je suis la parrain de Cassandre et son beau-frère … et un peu son ex si on écoute Max-le-jaloux. »

Je prends une chemise, puis deux, puis trois que j’élimine d’avance. Pas mon style et clairement ne mettra pas en avant ma silhouette élancée. Au contraire j’en sélectionne deux qui me plaisent bien trop et une troisième que je vais essayer en sachant pertinemment que si elle me plaît, ce sera pour la mettre sur le dos de mon homme. Un avantage, c’est qu’on a pas une carrure si différente l’un de l’autre et je peux clairement partir en quête de fringue pour lui en les essayant sur moi. Je fils dans la cabine tout en continuant de papoter avec ma nouvelle copine, parce que qu’on se le dise … elle me rappelle vaguement la blondinette du coup, je vois pas de raison de pas finir par l’apprécier et déjà je lui pardonne de m’avoir renverser en moto.

« Et toi alors ? Tu la connais d’où la Blondinette ? »

J’les imagine déjà s’être rentrées dedans l’une l’autre vu les cas qu’elles sont au volant, mais si c’est encore plus What-the-fuck, ça m’étonnerait même pas venant d’Axel. Quitter la chemise de lin pour endosser la suivante ne me prend qu’une petite minute et je sors rapidement de la cabine présenter le résultat à la brunette : une chemise noire en soie avec de légère rayures plus grisées. J’aime comme ça m’allonge, c’est élégant et presqu’un peu flippant et j’imagine très bien que pour aller interroger les gens, ça passe dans le genre « je suis désolé pour votre perte, mais j’aurais besoin de vous poser quelques questions ».

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Le troll du pont

Quand il est fait mention de Max -le jaloux, s'il vous plaît !- je me mordille la lèvre inférieure, histoire de ne pas rire aux éclats. Bon, ça ne marche qu'à moitié vu que je ricane un peu quand même, mortifiée devant tant de mauvaise foi de la part du grand brun. Ok donc, Axel c'est tapé Dante, et il est jaloux. Par contre il ne comprend pas qu'Axel ait été jalouse qu'on soit un peu plus que des collègues...

Bon remarquez, elle était morte. ça compte pas !

- Oh Axel et moi...

Je fais un vague geste évasif de la main, le temps de me décider sur quelle version enchaîner... La dispute ou la course poursuite ? Faisons un bref résumé des deux. Ma légère hésitation permet à Dante de s'enfiler dans la cabine pour se changer, ce qui ne m'empêche pas de continuer à parler.

- Disons que lors de notre première rencontre elle n'était pas vraiment dans un état apte à la discussion. En plus, je lui avait piqué ses pop-corn, alors elle était un chouia énervée.

Je souris largement à ce souvenir et mon nouvel ami ressort avec une nouvelle chemise sur le dos.

- Hum. Un peu austère, mais définitivement très classe. Je valide ! Suivante !

Je lui tends la deuxième qu'il a sélectionné en sautillant sur place, persuadée qu'au vu de sa plastique, peu de choses ne doivent pas lui aller, puis je reprends mon résumé comme si de rien n'était sur ma rencontre avec la blonde surexcitée :

- Puis quelques semaines plus tard, elle s'est cachée dans le coffre de ma voiture pour essayer dans apprendre plus sur moi. Je te passe les détails, mais on a finit par sympathiser en cellule, après une folle traversée de la ville en voiture !

Je laisse passer quelques secondes de silence avant d'ajouter.

- Puis accessoirement, j'me suis tapée Max pendant qu'elle était morte.

C'est amusant mais je suis quasi certaine que Dante met plus de temps à ce changer, cette fois. Du coup je ne peux m'empêcher de remuer le rideau, et de lui demander s'il est toujours vivant. Ce serait tellement bête qu'il fasse un arrêt cardiaque maintenant qu'il a survécu à cette belle chute.

- Hé d'ailleurs, comment t'as fais pour t'en tirer si bien après une chute pareille ?

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Le troll du pont

J'explose de rire lorsque j'entends qu'elle s'est tapée Max, non mais je l'imagine tellement pas comme un homme à femme, que de savoir qu'il a réussi à avoir une aussi jolie femme dans son lit, ça me fait délirer. Alors ok, va me falloir tous les détails croustillants de la partie où Axel se planque dans le coffre, concernant mon beau-frère, je veux pas savoir le oins du monde ce dont il est capable au pieu, j'aurais trop peur de le comparer ensuite à Nath et d'éventuellement de me taper des cauchemars .... finalement Barabas pourra bien se rhabiller après ça. C'est à ce moment qu'elle se décide à entrer dans la cabine gratuitement alors que je suis entre deux changes, torse-nu et pas sûr de quelle chemise essayer ensuite.

" La bleue ou la rose pâle ?"

Ok, j'ai un sérieux doute sur la rose et du coup j'la mettrais bien direct au rebut, mais la bleue m'inspire finalement pas mieux et j'en profite pour mettre également une verte qui accentue bien trop mon teint cadavérique. Concernant sa question, je regarde une seconde le plafond avant de me décider à être honnête -. Elle sait pour la résurrection d'Axel et je suppose que les pouvoirs de Max ne lui sont pas inconnus non plus du coup.

"J'suis déjà mort, t'aurais pas pu me tuer ..."

Je lui adresse un sourire laissant largement entrevoir mes canines saillantes.

"J'ai un penchant pour l'hémoglobine et une aversion totale pour le soleil ... j'te fais un dessin ou t'as deviné ?"

A son regard, je suppose qu'elle a compris et je prends son second regard pour de l'approbation quant au prochain essai de chemise : beige à fleurs ... c'est élégant et ça passe en toutes circonstances ... presque ... je me pointerais pas au taf comme ça, mais sinon ça passe. D'ailleurs, c'est en soulevant celle-ci que je tombe sur une chemise de soie rouge vermeille qui attire mon attention. C'est sexy ça ! Je mettrais ma main à couper que pour mon prochain resto avec Nath, elle pourra très bien faire l'affaire ... enfin, faut-il encore que monsieur daigne se détacher une soirée de son bar pour venir avec moi et ... que je le regarde manger, okok ... idée à la con on oublie le resto et on opte pour un cinéma. J'ai vu qu'il y avait une rediffusion du Bal des Vampires et j'adore ce film !

"Ouuuh je veux celle-ci en rouge, bleue nuit et noire ! Elle est sublime !"

Je sens que mon salaire du mois va passer intégralement dans ce shopping, mais je n'ai pas de bouffe à payer ni de loyer grâce à l'amour de ma vie, donc finalement, je devrais pouvoir faire ce sacrifice sans problème. Par contre, il va falloir que je refasse aussi mon stock de pantalons en conséquence, sinon c'est trop bête et je parierais que la jeune femme va finir par regretter d'avoir proposer cette excursion à la fashion victim que je suis

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Je vous vois venir là, à penser que j'me suis permise de rentrer dans la cabine pour me rincer l'œil... C'est seulement pour une question de gain de temps : plus besoin qu'il sorte à chaque fois ! Puis ça a pas raiment l'air de le déranger vu qu'il continue de me demander mon avis sur certaines fringues.

D'ailleurs à ce sujet, je me demande quelles idées me traversent le crâne lorsque que je le vois hésiter entre une chemise bleu et une rose pâle. Bien évidement que la rose ne lui ira pas, pas assez de contraste entre sa peau et la chemise... Puis ignorant sa propre question, il dédaigne aussi la chemise bleue pour en mettre une verte à la place. C'est pas top non plus, mais je n'ai pas besoin de lui donner mon avis pour qu'il la mette sur la pile à laisser. Puis enfin, il daigne répondre à ma question :

"J'suis déjà mort, t'aurais pas pu me tuer ..."
- Je le savais !

Mon exclamation est peut-être un peu trop surexcitée, mais j'avais tellement raison de pressentir un truc délirant. Enfin qu'on s'entende, j'en savais rien qu'il était déjà crevé moi... C'est considéré comment aux yeux de la loi d'envoyez valdinguer un mort ? De l'abus de cadavre ? ... Je secoue la tête en focalisant de nouveau mes pensées sur Dante, à qui je réponds avec un grand air innocent :

- Si tu dessines bien, je suis pas contre un dessin.

Mais ça ne le leurre pas. En même temps merci, mais j'ai un peu de culture quand même. Si on vous dit qu'un type est mort alors qui parle et bouge, qu'il kiffe le sang et supporte pas le soleil, faut pas être sorti du MIT pour comprendre que c'est un vampire. Classe. Mon premier vampire. Faut que je note ça sur un calendrier. Après démon, sorcier, nécromant, sirène, banshee et métamorphe, la liste s'allonge !

Si je ressens de la peur ? Pas vraiment. je suis encore en vie, et c'est un ami d'Axel. Je vois pas du tout pourquoi je devrais m'inquiéter. C'est vrai quoi. J'ai bien eu un petit lapin quand j'étais gamine, et même si je kiffe le lapin, je l'ai jamais foutu dans une marmite !

- Du coup la perle, c'était vraiment un truc rare ? Zut, j'aurais dû la garder !

Mon air faussement boudeur tient quelques secondes, avant que je ne parte en sautillant chercher de nouvelles chemises aux couleurs demandées. Même que je prends la liberté dans rajouter une bordeaux dans la pile. Revenant avec mon butin, je continue avec mes questions. pas de ma faute si je suis très curieuse :

- Du coup tout à l'heure, quand tu parlais des années 80, c'était pas des bêtises... Va vraiment falloir que j'arrête d'essayer d'estimer l'âge des gens dans cette ville.

Ou demander à Max de m'acheter/bricoler un détecteur de non-humains. Je me vois vachement me balader en ville avec un appareil dotée d'une énorme antenne qui bipe frénétiquement quand je m'approche de quelqu'un pas humain. L'idée me fait ricaner dans mon coin, et devant le léger haussement de sourcil de Dante, je me vois dans l'obligation de lui souffler mon idée stupide.

- En même temps -je ne chercher pas du tout à justifier ma stupidité !- depuis que je suis à Chicago, il ne m'arrive que des trucs de dingue. Bientôt je vais prendre l'habitude de demander dès que je rencontre quelqu'un s'il est humain. En fait, tu travailles vraiment ?

Oui je sais, je change de sujet, mais excusez-moi, la question est légitime ! Que peut bien faire un vampire dans la vie de tous les jours ?

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La brunette me fait totalement délirer ! Elle le savait … bien sûr qu’elle le savait. Si elle autant conscience du paranormal à Chicago, je pue le cadavre à 15km. Enfin, non je sens pas réellement le cadavre … horrible, j’imagine même pas le pauvre Nath dormir à côté d’un macchabée si je sentais vraiment comme ça. Je fronce les sourcils et pince le nez. Je hume … non, non, je pue pas le cadavre, c’est sûr.

Pour le dessin, elle repassera … les bonhommes bâtons de Cassandre et Aedan sont bientôt plus élaborés que tout ce que je suis capable de faire. Enfin non, y’a une chose que je sais dessiner et j’sais pas pourquoi, ce sont des planches anatomiques … moralité, ça m’arrive souvent de griffonnés en lisant les compte-rendu du légiste, mais rien que je pourrais afficher dans la chambre de ma filleule. C’est pas de ma faute, Inaya rédige de très bon rapport, bien complet qui donne libre court à mon imagination …

J’explose de rire concernant son commentaire sur ma perle.

« Yes ma belle, très très rare et tu seras gentille de pas l’ébruiter, j’ai pas des masses envie qu’on connaisse mon talon d’achille ! »

Surtout qu’en tant que détective, des gens qu’aimeraient me voir griller au soleil, il doit bien en exister à la pelle.

« Et oui, j’étais aussi sérieux, mais j’suis pas si vieux que ça … je pourrais juste être ton grand-père, donc tu vois … bébé-vampire ! Juste que je reste incroyablement beau et jeune pour l’éternité. »

Je ne me la pète pas, je reste jeune – 27 ans, c’est raisonnable – et c’est un fait, j’suis plutôt beau. C’est pas pour me la péter, mais au contraire, ça m’est bien utile au taf. On en vient donc à sa question suivante sur ce dernier.

« Oui, oui, je travaille, j’vais pas passer mon temps à me tourner les pouces. J’suis vraiment détective privé et j’adore ça. Mais j’te déconseille de poser la question parce que les non-humains ont tendances à pas trop aimer qu’une humaine sache ce genre de choses. Y’en a qui sont hyper protecteurs de leur communauté et ça finit souvent en carnage. Et toi alors ? Parce que je parle, je parle, mais tu fais quoi dans la vie ? »

Bientôt elle va pouvoir écrire mon autobiographie, que je saurais seulement dire son style en matière de chemise et d’ailleurs au vue de ce qu’elle ramène à nouveau, je dirais qu’on a des goûts similaires.

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Le troll du pont

Jeune et beau pour l'éternité... Sur le papier, ça fait rêver. Mais en réalité, j'me dis que je serais malheureuse comme un poux sur le crâne d'un chauve au bout de quelques années. J'aurais une perte d'intérêt pour toutes les situations qui, actuellement, mettent du piment dans ma vie.

La tristesse totale. Si après, pour kiffer mon existence, mon seul plaisir est de tenter de rentrer dans une église ou une stupidité du genre...

Gardant gentiment mes pensées pour ma petite personne -ça m'arrive hein, vous voyez !- je ne peux m'empêcher de soupirer lorsqu'il me met en garde contre le sectarisme de certaines créatures. J'crois bien que Max m'en a vaguement parlé une fois, mais il a dû se dire que c'était perdu d'avance d'essayer de me mettre en garde. Il a à moitié raison. Cela dit, je préfère m'en remettre à mon instinct pour ce genre de truc. Puis au pire, faut bien mourir !

- Moi ?

Je lui adresse un sourire fondant lorsqu'il me demande mon travail.

- Je te dirais bien de deviner tout seul, vu que tu es détective mais je vais t'épargner cette peine, je pense que tu t'ennuierais. Mon travail, c'est de vendre des choses aux gens qui ignoraient avoir besoin de ces choses, tu vois. En bref, je suis dans le commerce, rien de passionnant.

Bon, même si dans la réalité je vends les choses qui intéressent énormément les gens, plutôt que de leur inventer des besoins…

- Et tu enquêtes sur quoi comme affaire ? Les maris et femmes infidèles ? Les gamins qui fuguent ? Où t'es plutôt là pour boucler les affaires criminelles que les flics arrivent pas à résoudre ?

Pas que je m'inquiète pour mon croupion : personne ne paye des privés pour remonter les réseaux dans lesquels je trempe. Et les chemises dans tout ça ? Et bien j'attends patiemment que mon incroyablement beau et jeune Dante se bouge ses miches éternelles à essayer les dernières chemises que j'ai ramené, histoire de vérifier si la bordeaux lui sied.

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Le troll du pont

Légère, fraîche et littéralement renversante. Je trouve que ces trois adjectifs décrivent plutôt bien la jeune femme qui m’accompagne afin de se faire pardonner de m’avoir percuté plus tôt dans la matinée. Concernant son travail, son sourire fondant en dit plus long que ces mots et je mettrai ma main à couper qu’elle arrive très bien à pimenter même une activité aussi quelconque que le commerce d’objets …

« Malheureusement oui, beaucoup les histoires de couple. C’est ce qui rapporte le plus et qui ne nécessite généralement pas trop d’énergie. C’est souvent parce que c’est la guerre et des fois juste pour trouver le cadeau idéal … Pas vraiment épic. »

Je hausse les épaules et lui adresse un sourire amusé. Après tout, c’est ainsi et je supporte amplement les propos injurieux des maris et les excuses bidon des femmes. Pour Silas, c’est moins sûr qu’il apprécie, mais toutes les autres enquêtes qui ne rapportent rien pécuniairement, nous gratifie bien plus largement notre égo.

Un dernier tour en cabine pour me convaincre que j’ai déjà trouvé tout ce qu’il me fallait lors de mes précédents essayages. Je repose les dernières chemises qui ne m’ont pas convaincu et me saisis des autres.

« Bon ! Let’s go, on paye et je file au travail. Y’a pleins de maris infidèles qui attendent que je leur tire les oreilles …»

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Le troll du pont

- Sérieux, juste pour trouver un cadeau ?

Là, je suis sur le cul. J'aurais même pas pensé à ça. Il y a vraiment des gens qui payent pour que d'autres trouvent le cadeau idéal ? il y a tellement d'autres manières de faire... Fouiller le téléphone de la personne par exemple.

Dernier tour en cabine pour mon nouvel ami de shopping, et il attrape le paquet des heureuses élues.

- Franchement, je suis d'avis que c'est pas les oreilles qu'il faudrait leur tirer... Juste leur rappeler que le mariage, c'est cher et ça apporte plein de problème. Enfin bon après, faut voir le problème...

Je lui lance un regard amusée et le détaille des pieds à la tête avec une insistance feinte :

- Genre si c'est toi qui vient me tirer les oreilles pour infidélité, j'me marie au premier venu.

Grand sourire de ma part et je sautille jusqu'aux caisses. Je vous parie combien qu'il va faire la tête si c'est moi qui paye ? Après tout, c'est vrai que sa chemise ruinée est de son fait -la musique trop forte- mais si je n'avais pas regardé les pâquerettes avec tant de dévouement, j'aurais aussi pu l'esquiver. Donc c'est sa faute et celle des pâquerettes en fait. On devrait payer la boutique avec un joli bouquet . Certaine qu'ils apprécieraient.

Je me mets une petite gifle mentale pour me tirer de mes conneries printanières et reprend le fil de la discussion.

- Tu veux que je te dépose quelque part après ? Je serais pas sereine de te savoir sur un trottoir.

Je lui adresse un sourire ingénu et réprime un rire tant la situation est cocasse dans mon cerveau. C'est plutôt pour moi que je devrais pas être sereine, vu ma propension à créer des situations ubuesques.

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Le troll du pont

J’acquiesce en silence, comprenant sa consternation. C’est affligeant de souffrir d’une telle flemmardise alors qu’il faut juste connaître un peu la personne. Enfin bref, tout le monde ne fait pas forcément des bons cadeaux et si ça met du beurre dans les épinards, c’est pas Silas ou moi qui allons râler.

« Oui mais si je viens te tirer les oreilles, ça sera moi le premier venu ? Et je peux te dire que mon cœur est déjà pris. »

Je pose une main sur mon cœur comme si j’étais un joyau défendu. On y croit on y croit. Puis je lui adresse un sourire et un clin d’œil. Je lui dirais bien que le divorce aussi ça coute cher d’ailleurs si j’en crois certains de mes clients et c’est pourquoi ils cherchent la faute de l’autre … s’ils amènent une preuve d’infidélité, c’est le second qui se tape tous les frais de divorce … et bien souvent il est courant de découvrir que le client non plus n’est pas blanc comme neige. J’ai même eu le cas où les deux partis sont venus à quelques jours d’intervalle demander nos services … pour dire cela poliment, c’était très inconfortable !

« Et en même temps, me savoir sur ta moto, est-ce que tu considères ma vie moins en danger ? Quoi que, au moins je peux conduire … »

Un nouveau sourire de ma part et nous sortons à l’air libre. La matinée est déjà bien plus entamée qu’elle n’aurait dû l’être et je n’ai toujours pas mis le nez dans mes dossiers. Tant qu’à faire, autant profiter d’un trajet express avec la demoiselle.

« Allez, j’accepte ! »

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Le troll du pont

Je ris devant tant d'emphase sur son "cœur déjà pris" et désigne un vendeur du magasin.

- C'est lui le premier venu, toi, tu viens me tirer les oreilles. Je t'aurais bien proposé de t'accueillir avec un bon cocktail à la clé mais je suis pas certaine de moi, sur ce coup.

Mes connaissances sur les vampires se bornent à "ils boivent du sang". On va pas bien loin donc. Sauf si je vais piquer des poches de sang à l'hôpital du coin... Ok idée amusante que je mets dans un coin de ma tête pour un jour de grand ennui.

On passe à la caisse, où je refrène mes envies princières de foutre un paquet de dollars sur la banque et hurler "c'est tout pour moi !". Je sais me tenir. Parfois.

- Hey ! J'ai jamais eu d'accident et même pas en rêve tu conduis cette moto.

Même si c'est pas la mienne, j'aime pas me faire trimballer. Je préfère conduire. On quitte la boutique pour retrouver l'ambiance bruyante du dehors et je sautille jusqu'au véhicule lorsqu'il accepte ma proposition.

- Tu vas voir, on va y être en un rien de temps !

La circulation est un peu moins dense qu'avant notre excursion shopping, ce qui m'évite de devoir trouver des chemin de traverse et je reste sagement sur la route.

Même une fois le commissariat en vue, je grille le feu juste à côté et me payer le luxe d'un drift juste devant les portes. Vous pensiez pas que j'allais laisser Dante traverser la rue !? Il c'est déjà fait renverser une fois aujourd'hui !

- Là tu vois ! Pas d'accident !

J'adresse un sourire resplendissant au vampire qui a déjà quitté l'engin, tout en ignorant ostensiblement le type en uniforme qui s'approche à grands pas :

- Passe le bonjour au capitaine, arrête d'écouter la musique trop fort et je te dis à bientôt !

Je lui fait un petit coucou de la main, avant de me hâter vers mes propres affaires et loin de tous ces uniformes. C'est génial le shopping, mais il me semble que je suis attendue.

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Le troll du pont

Ça tombe bien, j’étais justement plus dans les bonnes graces de mes collègues du commissariat, alors autant arriver en fanfare ! La demoiselle ne rate pas le coche et moi, je ne manque pas le regard de travers d’un des agents qui sort au même moment et s’abstient de nous apostropher lorsque je devine qu’il me reconnaît. On laisse tomber les explications et j’adresse un signe de la main à la jeune femme pour lui intimer de déguerpir en vitesse, chose qu’elle avait entamé par elle-même puisque déjà les pneus crissent au redémarrage. Honnêtement, si je peux ne croiser ni le capitaine, ni sa seconde, je ne m’en porterais que mieux … eux non plus m’apprécient pas des masses. C’est fou non ? J’suis pourtant pas chiant comme mec. Je soupire. Allez on y croit.

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