Les pieds dans le plat ! - ft Nath & Dante

Je gratte, je gratte, je gratte … Merce, c’est tout pourri ce vernis, j’arrive pas à l’enlever. J’ai les ongles noirs à cause de l’ex-cadavre, des tresses partout sur la tête et je me suis même cramé en sortant de chez elle ce matin tout ça parce que j’ai « oublié » de remettre mon charme. Mon bras et une partie de mon visage me brûlent, j’ai la tête dans un étau après la cuite de la veille et j’ai été pouponnée comme si j’étais une ado de 15 ans … Beuuuuh, j’ai juste envie de retrouver mon homme et de dormir toute la journée. Non, mais pour un vampire, que je sois capable d’en être à ce point, c’est que la cuite était monumentale. J’écrase mon front contre le volant de ma voiture et le klaxon qui s’enclenche me fait repartir illico dans l’autre sens et je me cogne contre le siège à l’arrière.

« Meh »

Je masse mes tempes douloureuses après tout ce ramdam, oubliant la moitié gauche de mon faciès qui ressemble plus à une croûte géante après avoir subi les affres du soleil. Je force sur les muscles de mes paupières pour ouvrir grand mes yeux et fini par réussir à m’extirper de la voiture. C’est donc la mine totalement défaite que je croise Shawn en bas de l’immeuble du brun. Je lui adresse un signe de la main, un sourire mal à l’aise et monte les escaliers qui mènent à l’appartement. J’me serais bien passer de me montrer aussi lamentable devant lui, j’me sens déjà jamais sûr de moi de passer après lui. Et oui, je sais, Nath arrête pas de me dire qu’ils sont comme des frères. Mais j’le vois pas aller se taper Max. Un rire débile sort de ma gorge à cette idée et j’insère avec la plus grande des difficultés la clé dans la serrure. Au moins, je peux être à peu près sûr que mon cher et tendre est présent. Tant pis pour la douche pour me redonner un minimum de prestance avant de le voir …

« Salut toi ! »

Mon cœur, mon amour, mon tout beau, mon adoré … j’y arrive pas avec tous ces sobriquets. Pas que j’ai pas envie de lui dire, mais c’est dur. Une marque d’affection que je ne m’autorise pas encore. Après deux ans …

« Je suis faible … je peux avoir un câlin avant que tu constates les dégâts. »

Oui, je parle bien du vernis, des tresses, de ma tête de déterré – pour un cadavre c’est normal – et le petit pincement, la question qui me taraude …

« Il voulait quoi Shawn ? »

Je ne le demande pas méchamment, par contre je baisse les yeux clairement avant même de prononcer son com, comme si je m’immisce dans une relation à laquelle je n’ai pas accès, comme si je rentrais dans l’intimité de Nath, je brave l’interdis que je me suis moi-même imposé. Pourtant, je veux juste savoir si tout va bien. Enfin, c’est ce que j’essaye de me convaincre en tout cas. Enfin, quitte à passer pour un boulet avec ma tête de pizza pas cuite et mes angoisses d’insécure profond, autant le faire à fond.

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Dante qui passe la soirée avec Axel, et Shawn qui passe la soirée avec moi. J'en connais un qui va criser plus que l'autre, mais honnêtement, je m'en fiche royalement. Dante, je l'adore, je dirai même que je l'aime passionnément, mais quand il me pète ses crises de jalousie - d'incertitude plutôt - face à Shawn... zut. Je sais où j'en suis avec chacun d'entre eux, et c'est justement parce qu'il n'y a aucune ambiguïté entre nous que je me permet d'être aussi proche de mon meilleur ami. J'compte pas avoir à choisir entre eux. Et le fait que Shawn soit à la maison quand Dante n'y est pas est un hasard complet. Sérieux, j'dis pas non à une soirée canapé avec ces deux là, et Elaine, et Max, même si j'sais pas trop à quel film mon frère accrocherait vraiment. Et Axel? Oui vrai. Pas encore bien l'habitude. Disons que tant que j'l'ai pas vue en chair et en os, c'est pas bien rentré dans ma tête.

Shawn à peine sorti, j'ai pas le temps de songer à une douche ou quoi que la porte s'ouvre de nouveau, et si je pense d'abord qu'il a zappé un truc à l'appart, je découvre rapidement la tête de zombie de mon mec. Nan, désolé Dante, mais là, j'ai pas d'autre comparaison en tête.

"Eh." Je me sors du canapé pour le rejoindre en quelques pas, l'examinant de plus près alors que je suis enfin près de lui. "Qu'est-ce qu'elle t'as fait subir sérieux?" Je fronce les sourcils en découvrant qu'il y a plus que les dégâts provoqués par notre belle-sœur. C'est quoi ces traces de brulures qu'il a sur le visage?! "J'croyais que t'étais protégé, avec ta perle?"

Oui je m'inquiète. C'est normal. Et j'en ai rien à foutre de sa question à propos de Shawn. Sauf que je vois rapidement qu'il ne supportera pas longtemps que je fasse l'impasse dessus. Je l'entraine jusqu'à la salle de bain, utilisant la lumière et le miroir pour voir les dégâts de plus près.

"On s'est fait un film. Fin trois. Ok, plutôt deux et demi en fait, j'ai pas vu la fin du dernier. Et il en a profité pour m'expliquer à quel point j'étais demeuré. Mais on s'en fout. C'toi qui m'inquiète là, Dis moi c'que j'peux faire pour te soulager un peu?"

Je le force à s'asseoir sur le rebord de la baignoire, me penchant au dessus de lui, le collier à mon cou se retrouvant à hauteur de ses yeux. Ouais nan, la bague au doigt, ça a été un poil trop littéraire pour moi - et accessoirement au taf, c'était risqué -, mais ça n'empêche que j'l'ai toujours sur moi. Je finit par lui donner plus de détail, sans trop y penser, juste pour combler le silence, pendant que je jette un œil plus pressant à ses blessures. C'est censé guérir vite un vampire non? J'aurai pensé plus vite que ça quand même...

"D'après lui, j'aurai du te dire oui, et te condamner à me supporter jusqu'à ce que mort s'en suive. Mais j'crois qu'il est plus égoïste que moi. Quoique... n'espère pas que j'te dise que t'es trop bien pour moi avec cette tête. Elle t'as pas raté la petite!"

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Je me laisse dorloter par mon mec, toujours en train de finir de cuver – pas de doute que j’aurais moins de regrets qu’Axel – et accepte sans broncher de me faire guider jusqu’à la salle de bain.

« Mais … j’ai oublié de la remettre avant de partir … donc pizza party ! »

Je lui adresse un sourire sans contenance si on oublie qu’une moitié de mon visage a crépité sous le feu de l’astre du jour quelques minutes auparavant. Je soupire voyant bien que mes blagues ne le dérident pas le moinds du monde. De toute façon, à la tombée de la nuit, en pleine possession de mes forces, je cicatriserai en moins de deux. J’avoue que le désavantage de cette perle c’est que si elle me permet de résister le jour, elle affaiblit mes supers-pouvoirs et je me retrouve aussi chétive qu’une fillette de 10 ans face à un bulldog – moi fillette, soleil bull dog – cette comparaison est tout à fait valable ! Je regarde la bague se balancer sous mon nez et je ne réprime pas un sentiment de fierté. Juste de savoir qu’il m’aime assez pour arborer ce symbole. Je l’écoute passivement alors qu’il continue de me conter sa soirée. J’ai l’impression que ces moments sont étrangement rares. Je suis pas très bavard de mon taf, faut dire que c’est carrément la déprime et il me raconte deux trois trucs sur le sien, plutôt les déboires qu’il rencontre, mais jamais ceux non résolus, que ceux où il a une solution et m’empêchant d’avoir envie d’intervenir. Je crois que l’autre fois, à avoir failli tuer une des racailles à la sortie de son travaille l’a convaincu que je peux perdre tout mon sang froid si cela le concerne.

« T’inquiète pas chaton, ce soir je serais tout beau pour toi en moins de temps qu’il ne t’en faudra pour dire « sunset ». Et c’est quoi qui t’a valu cette étiquette de demeuré ? »

J’écarquille les yeux de surprise lorsque Nath m’explique que Shawn aurait aimé qu’il m’épouse. Merde … là j’ai un sourire tellement niais qu’on pourrait mettre un filtre instagram rose et des cœurs que ça ne serait pas pire.

« J’ai la preuve que Shawn est un homme de bon sens ! Tu devrais l’écouter. Mais, non, c’est pas totalement Axel. Si on ne prend pas en considération que c’est elle qui a enlevé ma perle, fait boire jusqu’à oublier ma date de naissance – que j’ai vraiment oublié cela dit – et peint mes ongles. »

Ça fait beaucoup de chef d’accusation pour la blondinette tout compte fait. Je secoue la tête d’un signe de négation refusant de rester sur cette note, ma belle mérite bien mieux.

« Elle va se marier à ton frère et veut que je la conduise à l’autel. »

Je soupire, au moins une de contentée, mais bon, pas grave. J’attrape le brun et enfoui mon visage contre son torse. Fatigué et souhaitant atténuer la luminosité du soleil qui se réverbère encore trop pour moi, je soulève même son t-shirt et coince ma tête dessous avant de le rabattre. Il y fait sombre, il y fait chaud et j’ai l’odeur capturé de Nath rien que pour moi. Ma voix étouffée transperce tout de même.

« C’était quoi les films ? Tu taffes aujourd’hui ? Sinon je te capture et tu peux envoyer un message pour leur dire que tu viens pas. »

Je ressers mon étreinte autour de sa taille. Si nos amis ont pu profiter de la nuit avec nous, ce sera la journée que je réserve à notre couple. Non, j’ai la force d’un vieux bigorneau qui ne veut pas être délogé de son rocher. Faut dire que mon caillou à la peau douce et a autrement plus de conversation qu’une pierre.

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Je retiens un rire quand il me dit que Shawn est un "homme de bon sens". Parce qu'il marche dans son sens? Nan, je connais trop bien Dante pour le penser aussi égocentrique. J'crois qu'en vrai, ça le rassure d'avoir la validation de Shawn. Alors qu'en vrai, j'm'en fous de sa validation, à Shawn. Au début, il m'a sorti que j'faisais une belle connerie, et qu'il espérait juste que Elaine se retrouverait pas entre deux feux. Remarquez que l'entendre parler de ma fille comme ça, j'ai failli lui en coller une au mec. Fin, j'ai eu l'intelligence de comprendre son inquiétude, légitime quand on connait pas Dante. Ça lui a sauvé la mise. Et lui a eu l'intelligence de croiser Dante, plutôt que se faire un avis sur lui sans le rencontrer avant. Maintenant il me fait la morale parce que j'ai refusé d'épouser Dante... J'peux le baffer?

"Concernant cette fameuse date... trouves-en une sérieux, que j'puisse chercher de la place sur un gâteau pour poser toutes les bougies."

Et les lui faire souffler aussi? Ok, Elaine et moi on se dévouera, promis juré. Et là, je comprend un peu plus le trouble de Dante. Hormis la picolade et le cramage, j'veux dire. Putain Max, des idées pareilles, tu préviens avant de les pondre, sérieux... C'pas sympa de laisser Dante se mettre dans le guêpier tout seul.. Le brun finit par se planquer sous mon tee-shirt, et je dois avouer un frisson à son contact, n'ayant pas prévu ce geste de sa part. Je glisse mes mains dans son dos, le frottant à travers son tee-shirt.

"Et j't'ai pas aidé à être heureux pour elle j'imagine." Je soupire avant de tendre le bras vers le cordon du store de la fenêtre de la pièce pour le descendre, diminuant un peu la lumière à l'intérieur. "Tu sais que j't'aime hein?"

C'est perturbant de faire la conversation comme ça, sans se voir. C'comme être chacun d'un coté du lit à pas se regarder. Alors ça, c'est un truc que j'ai en horreur, j'ai tellement l'impression de me contrefoutre de lui et de ce qu'il peut bien me dire quand c'est ça... mais d'un coté, quand on décide de se dire un truc à trois heures du mat, et que j'suis bien installé - et pas contre lui, même si c'est rare -, j'ai pas envie de bouger pour deux minutes. On retrouve jamais al position confortable qu'on avait deux minutes avant, après avoir bougé.

"Le seigneur des anneaux. En version longue. J'ai commencé à fermer les yeux à peu près dès qu'il a allumé le troisième dvd, et j'ai arrêté d'entendre quoi que ce soit au bout d'un quart d'heure."

J'évite de lui préciser que j'ai arrêté d'entendre parce que j'ai coulé le nez jusqu'à la nuque dans le creux du cou de Shawn pour échapper à la lumière de la télé. C'pas le genre de détail qu'on file à son mec ça. Même si c'pas moi que ça dérangerait si j'le trouvais dans cette position avec Axel. J'crois que c'est une règle tacite, c'tout.

"J'suis de service de nuit ce soir. Et j'crois que j'ai récupéré assez d'heures ce mois-ci pour ne rien avoir à dire si Luther décidait de me virer. J'en ai b'soin de c'boulot t'sais. Mais j'suis tout à toi jusque là. D'ailleurs, ça te dit qu'on aille s'allonger un peu? Fait noir dans la chambre, j'ai pas ouvert les stores."

D'ailleurs, plus ça va, plus j'me dit que j'devrais en récupérer pour la baie vitrée du salon, des stores. J'avais pas franchement prévu de vivre avec un vampire quand j'ai pris c't'appart. Et encore, il a la chance de pouvoir trainer en plein jour, d'ordinaire. Tin mais il me chatouille avec ses ch'veux en prime!

"Allé, sors de la-d'sous avant que j'me rappelle plus la tête que t'as! J'dois avoir un tube de tulle gras dans le placard si tu me laisse y accéder. Ça te soulageras un peu d'ici ce soir. S'tu crois que j'vais te laisser dans c't'état là toute la journée, tu rêves."

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Je me contente de le humer et de déposer des baisers sur sa peau en l’écoutant très passivement.

« Honnêtement, je me souviens juste que c’est en avril … on avait un cerisier dans la cour chez mes parents et les fleurs fleurissaient généralement à ce moment-là. »

C’est à peu près tout ce que je peux dire sur ma date anniversaire, c’était Luka qui s’occupait de me rappeler quel jour c’était généralement. Je grimace à cette pensée et songe très honnêtement que le temps qui passe n’est pas une chose que j’ai fortement envie de célébrer.

« Après, je t'avoue que je suis pas fan des anniversaires, j’ai pas envie de « nous » voir vieillir. »

Je parle de lui bien évidement, mais aussi de l’éternel jeunesse qu’affiche mon visage, un moment cristallisé de ma vie sur ce faciès et je ne peux que constater l’écart qui se creuse entre son apparence et la mienne. J’ai l’impression d’être une statue de cire figée et immobile que le temps a oubliée dans un coin, délaissée.

« Être heureux pour elle ? Si je suis heureux pour elle. Pourquoi tu m’aiderais pas ?»

Non, je suis pas sûr d’avoir bien compris sa question, enfin, pour ce que cela vaut, je pense que je peux dire que si je suis très heureux pour ma belle et encore plus de partager ce moment à ses côtés, de l’envoyer directement dans les bras de son Maxwell qui reste un homme très convenable et bien plus que cela même si je reste perplexe face à sa jalousie constante. Enfin, qui suis-je pour critiquer cela comparé à mon éternel sentiment d’infériorité dès que je croise le regard de Shawn. C’est vraiment un chouette type et je sais qu’il n’y a aucune ambiguïté de sentiments qu’ils ont l’un envers l’autre.

Pour les films, je ne suis qu’à moitié, même si, heureusement, le sorcier me parle de film assez connus pour que j’en ai entendu parler. J’ai pas trop suivi les films, je suis plus livres et ça me va très bien comme cela. J’ai tendance à trouver le temps long derrière un écran. Je rouspète intérieurement et grogne un peu en entendant qu’il taf encore ce soir. C’est pas possible, j’ai l’impression que tous les soirs il y est, même si pour être plus souvent à la maison, il a échangé beaucoup de ses jours du soir contre des midis. Enfin, je soupire et m’extrait du t-shirt du brun alors qu’il réclame de voir mon faciès. Argument en faveur, les stores clos. Rien que le contraste en me retirant de son vêtement m’arrache une nouvelle grimace, alors je ne rechignerai pas à m’épargner plus d’obscurité.

« Je te suis. »

Je me lève en m’appuyant contre lui et secoue la tête lorsqu’il me désigne son armoire à pharmacie, enfin, sa boîte de métal rouillé à pharmacie je devrais dire. Faudrait que je check qu’il soit bien vacciné contre le tétanos … rien qu’en voulant se soigner il y risque sa vie.

« Non, si on va dans la chambre, j’enlève ma perle, ça me fera guérir vite fait bien fait. »

Résigné à me faire entendre raison, le barman nous entraîne vers la chambre où nous nous étalons comme deux grosses flaques dans notre lit bien confortable. Je vole son oreiller que je plaque contre mon nez avant de me dire que c’est lui tout entier que je pourrais agripper. Raisonnable comme pas deux, je commence par virer mes fringues inutiles dans un lit et m’attèle à défaire les tresses soigneusement nouées sur ma caboche. Merde, Axel a pas lésiné sur le tressage, c’est serré. La perle échappe à mes doigts, ricochent et je l’entends rouler sur le parquet. Au même moment, je me ressens pleins de vitalité et la brûlure ne sera bientôt plus qu’un souvenir.

« T’as pour mission de m’interdire de quitter cette pièce sans ma perle ! Mais au moins, bonne chose de faite, je vais guérir plus vite comme ça. »

N’étant pas au bout de mes peines, je continue de défaire l’architecture capillaire qui se dresse sur ma tête.

« Mince ! Axel devrait se reconvertir coiffeuse je galère là ! »

Je me tourne vers le brun et si dans la pénombre j’ignore s’il le voit, mais moi parfaitement, je lui adresse une mine éplorée afin de quémander son aide. Il n’y a pas vraiment besoin de voir, juste passer les doigts au hasard jusqu’à sentir ma tignasse retrouver son volume normal. Je ma cale sur son ventre alors qu’il devine ma demande à l’instant et je me laisse perdre dans le flot de mes pensées. Tout cela pour en arriver à ça :

« Si je te demande plus de détails sur ta vie d’avant ? Tu m’en parlerais ? »

J’ai envie de le connaître, de tout prendre, son histoire, sa vie et d’arriver jusqu’à notre rencontre.

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Nathan sert davantage Dante contre lui quand ce dernier lui donne une raison valable de détester les anniversaires. Son anniversaire. Une raison d'autant plus valable pour lui que ce n'est pas pour rien qu'il en apprécie tant la date. Le 29 février, ça revient pas assez souvent pour s'en plaindre. En même temps, c'est difficile d'en oublier la date, comme ça. Quoiqu'il s'est passé tellement de choses dans sa vie ces dernières années que d'atteindre une dizaine de plus ne sera pas la seule excuse pour avoir trouvé que le prochaine anniversaire arrive trop vite.

"Tu sais c'qu'on dit? Tant qu'on est jeune dans la tête on l'est dans le corps. Et j'ai pas encore tout à fait passé le cap de l'adolescence alors, tout va bien?"

Pourquoi ne l'aiderait-il pas? Sans doute parce que lui lui avait refusé cette opportunité sans lui laisser la moindre possibilité de négociation. Et si ses raisons lui paraissent suffisamment valables pour ne pas revenir dessus, ça ne l'empêche pas de s'en vouloir d'avoir contré aussi facilement les plans de Dante.

"Parce que j't'ai refusé l'occaz qu'elle te mène à l'autel?"

Nath l'entend ronchonner alors qu'il lui répond qu'il est de service ce soir. Pour être honnête, c'est le service qu'il préfère, il case bien plus avec mes horaires naturels. Il est un piètre dormeur, et là où on trouve à s'occuper en journée en dehors du boulot, la nuit, c'est plus sorcier. Donc bosser la nuit, aucun souci. Le problème aujourd'hui? Un mec qui a un emploi du temps exactement opposé au sien. Qui bosse la journée... et bosse la nuit. Un bourreau de travail quoi, et encore, j'arrive à l'avoir quelques heures par jour pour lui-même depuis qu'il l'a invité à s'installer à l'appart. D'où l'effort fait de son coté pour faire plus de services de jour et passer plus de temps avec son vampire préféré de nuit.

L'autre finit par retirer la tête de sous son tee-shirt, acceptant de le suivre jusque dans la chambre, où l'obscurité règne en maitre malgré un léger fil de lumière traversant les stores. Pas de quoi éclairer la pièce, plutôt simplement aider à discerner les contours pour ne pas s'enquiller le pied direct dans le coin du lit. Un bras autour de sa taille pour le guider, même s'il est persuadé que c'est plutôt le vampire qui va le guider dans l'ombre.

"Si tu le dis. Mais si c'est pas aussi efficace que tu le dis, tu vas y avoir droit, à la pommade. T'es pire que ma fille question soins!"

L’hôpital se fout de la charité? Sans doute. Quoique, si il a tendance à ignorer les petits bobos (non mais... si il écoute le patron, faut y signaler la moindre coupure... ben on aurait pas fini, avec le nombre d'éclats de verres qu'il a pris dans les mains depuis qu'il bosse chez lui..), quand il prend vraiment cher, il ne refuse pas le coup de main. Posés dans le lit, il observe d'abord Dante s'approprier un oreiller - ou du moins la silhouette de Dante provoquer le bruit que fait un oreiller qui quitte le matelas quand on le soulève, avant de le sentir s'installer contre lui, sa tête reposant sur son ventre.

"Si tu essaye de sortir, j'utilise ma magie pour faire... je sais pas quoi. Alors inquiète toi, crois-moi."

Il manque un rire, glissant ses doigts sur les cheveux de son compagnon alors que ce dernier se plaint de sa coupe de cheveux. Faut avouer que Axel ne l'a pas loupé et que Nath compte bien se rappeler de se faire ratiboiser le crin avant de tomber sur la blonde récemment ressuscitée. Le mouvement machinal de ses doigts parvient à défaire quelques nœuds, mais les élastiques, c'est déjà bien pénible quand on les voit, alors quand on les voit pas, ça s'appelle un drame, ces trucs.

"Tu peux toujours poser tes questions. On verra bien su j'ai les réponses qui vont avec. Ma vie est trop foutument bordélique pour t'en faire un roman donc..."

Il ne refuse pas de lui répondre, pas pour le moment en tout cas. La suite dépendra de la nature de ses questions. Mais ouais, Nath a besoin de ses questions pour savoir où il va. Bien qu'il craigne que ses réponses n'attirent que plus de questions.

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Trop loin, ça va beaucoup trop loin. Mon neurone de gauche connecte avec celui de droite et la bouche en cœur je lâche un « oooooh » en comprenant de quoi il parle. Je ris de ma stupidité. Franchement, même si je l’ai encore abordé hier soir avec Axel, je ne lui en veux pas et je ne peux pas lui imposer de tenter un second mariage vu comme le premier semble l’avoir mis par terre.

« Non, mais j’avais pas capté que tu parlais de ton refus et ça va je m’en remets très bien. Je crois même que c’est une des décisions les plus sages qui tu auras jamais pris dans ta vie. »

Une fois dans la chambre, il me libère de ses suspicions concernant ma capacité à régénérer suite à mon léger incident du matin. Franchement, je suis chanceux de n’être qu’une face de pizza, j’aurais pu être la merguez cramée voire le tas de cendres de la cheminée. Je l’écoute même attentivement me menacer et acquiesce passivement, comme s’il était capable de tenter sa magie sur moi. Je le connais bien trop craintif sur ses capacités pour les prendre au sérieux, mais je n’ai pas envie de surenchérir sur sa maladresse concernant ses pouvoirs, je reste un entêté qui persiste à croire qu’il pourrait faire de grande chose s’il se décoinçait dans sa caboche. Mais bon, pas la force d’insister sur ça non plus, je le laisse me détresser même si ce n’est pas un franc succès.

Je reste toutefois quelques secondes perplexes lorsqu’il me demande d’axer ma requête sous forme de questions plus spécifiques. J’hésite, trop de choses à aborder et si peu dont je sais pas quel bout commencer. Ses histoires d’amour, son enfance, sa relation avec Max, avec sa fille … et j’en passe

« Tu vas me trouver con, et je sais même pas comment la formuler sans risquer d’être blessant… Alors, si tu veux pas répondre, le fait pas, mais … »

Je prends une profonde inspiration avant de me lancer.

« Je comprends pas toutes les années où t’as été au fond du trou alors que t’étais plutôt bien entouré … enfin je crois ? J’ai du mal à comprendre Shawn, mais je crois qu’il est quelqu’un de bien et après je sais pas non plus si lui aussi a eu des bas… et puis Claire ? C’était si horrible avec elle ? »

Non, mais j’ai l’impression de lui demander les pires choses. Heureusement qu’on est dans le noir, j’ai tellement honte d’aborder ces sujets aussi crument. Aucune envie de lui faire mal, de le blesser ou de raviver des souvenirs douloureux. J’attrape sa main toujours sur mon crâne, mais qui s’est stoppée dans son action. De mon pouce, je caresse le dos de sa main. J’aimerais tellement juste un baiser, oublier le sujet que je viens moi-même de lancer et pourtant … j’ai aussi envie de le comprendre, de savoir. Le sujet du paternel ? S’il est motivé, on l’aborde. Sinon, ce sera pour une autre fois, mais à part quelques bribes de conversations et surtout s’il en parle avec Max, je suis paumé. Les deux parlent du même homme et pourtant, on dirait deux personnes différentes sur tous les points possibles et inimaginables.

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Mes doigts ratent un mouvement dans sa tignasse quand il me dit que j'ai du prendre la décision la plus sage de ma vie. Ouais alors des décisions sages... il a pas tord, ça doit faire partie des rares que j'ai su prendre. Les meilleures concernent Elaine, bien sur, même si, en vérité, j'ai une veine pas possible que ma fille ne soit pas plus rancunière que ça à mon encontre. Mais ouais, si il considère que c'était une sage décision, elle doit être juste derrière.

Sa question? J'avoue que son introduction me fait appréhender ce qu'il va me demander. Et en fait, après s'être emmêlé les pinceaux.. il aurait pu faire pire. Ok, réfléchir à cette réponse va m'emmener sur des terrains très pentus, mais j'ose penser que Dante a le droit de savoir dans quoi il s'emmanche avec moi. A quoi riment les cauchemars qui rythment mes nuits. Je ne les compte plus depuis assez longtemps pour savoir qu'il les a déjà subis, même s'il n'a jamais amené la discussion sur le tapis.

"T'sais, j'crois que tu peux être le mieux entouré du monde, quand on t'enlève ta raison de vivre... t'es incapable de voir le reste."

Je laisse un silence un peu trop lourd s'installer ensuite, me contentant de glisser mes doigts dans les cheveux de Dante d'une façon tout à fait machinale. Tout en réfléchissant à ses paroles en même temps. Et trouvant qu'il a bien raison sur un point.

"Shawn est un mec bien. Ça a été le premier a me tendre la main quand j'ai réussi à échapper à mon père. Et j'l'ai remercié en le lâchant pour Claire... Et tu sais le pire? C'est que j'ai beau avoir été le pire des enfoirés avec lui... je sais que je peux compter sur lui quoi qu'il arrive. Et y a pas à jalouser, c'est comme ça. Lui et moi on est frères. Surtout à présent que je suis assez lucide pour voir tout ce qu'il a fait pour moi."

Je crois que j'ai réussi à virer un nouvel élastique... faudra songer à les récupérer dans les draps avant qu'on se demande d'où vient tout ce bordel. Sa main dans la mienne? Bien sur que je la sens, et même que je la serre surement par moments, quand des pensées pas toujours agréables me traversent l'esprit.

"Claire, c'est foutrement plus compliqué. J'te dirai qu'on avait pas une mauvaise vie, si on oublie qu'elle a pas attendu bien longtemps pour me faire porter des cornes. A c't'époque, autant j'voyais Shawn comme un copain, autant c'était la femme de ma vie. J'y ai cru. Et plus dure a été la chute. Fin, j'mentirai en disant que tout a été de sa faute."

Et me revoilà à tourner autour du pot? Pour être honnête, après quinze années, je suis loin d'avoir fait mon deuil, et évoquer la perte de mon enfant est toujours aussi difficile. De là me viennent la majorité de mes cauchemars, additionnés de quelques visions de mon paternel et d'autres de mon existence précaire dans la rue qui fut mienne au cours des années qui ont suivi.

"Elaine est pas ma seule enfant. Claire et moi avons eu un fils, après elle. Oliver." Un nom que j'ai toujours autant de difficultés à prononcer. Et c'est presque dans un chuchotement que je poursuis, espérant presque qu'il ne m'entende pas. "J'l'ai tué. J'ai pas été là pour lui, et il est... parti. J'l'ai tué. Et j'trouve plus facile d'en vouloir à Claire pour m'avoir trompé que d'accepter que tout est de ma foutue faute!"

Je me dégage de notre position, ayant besoin de prendre l'air une minute, confiant dans le fait qu'il ne me suivra pas dans le salon, là où la baie vitrée laisse bien trop de soleil entrer dans la pièce pour qu'il puisse y aller de jour et sans son sortilège. J'avais pensé le coin du lit dix centimètres plus loin, par contre, et me le prendre dans le genou avec toute l'impulsion que j'avais mis dans ma foulée, ça fait un mal de chien. Assez pour me contraindre à m'asseoir au pied du lit, une main posé sur le point douloureux. Je le sens se blottir dans mon dos, et je tente d'abord de me dégager avant de le laisser faire, acceptant le réconfort apporté par ses bras autour de moi.

"Fais pas ça. Essaye pas de me convaincre que j'y suis pour rien. Ça fait quinze ans que je tourne la question sous tous les sens, c'est pas aujourd'hui que la réponse va changer." Je secoue la tête d'exaspération, lâchant le soupir qui va avec. "Tu sais que j'ai mis des années à savoir où il était enterré? J'ai pas eu le courage d'y aller, ce jour-là. C'était plus simple de prendre une cuite et prétendre que c'était jamais arrivé. Claire est partie avec Elaine peu de temps après. Et tu connais la suite."

Je renifle, profitant de mon tee-shirt pour m'essuyer le visage sans me poser la question de savoir qui des larmes ou de la morve l'emporte dans le tableau. Résultat? Le vêtement finit en boule dans un angle de la chambre.

"Elaine est pas au courant. C'pas un fardeau que j'veux la voir porter. Et j'tiens à ce que ça reste comme ça."

Je n'ose pas me retourner vers lui. Sentir son regard sur moi, l'imaginer me juger, me suffit amplement. Une pensée intérieure? Le supplier de trouver une question bien moins pénible à lui répondre.

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C’est donc une histoire de culpabilité … Je ne vais certainement pas lui demander de faire en quinze ans le deuil de son fils alors qu’il m’a fallu trente ans pour m’apaiser concernant celui de Luka. Impossible de le sauver, culpabilité de ne pas l’avoir soigné, de l’avoir entraîné vers les Amériques et qu’il n’y ait pas survécut … alors son fils … la chair de sa chair. Une vie entière ne suffirait pas. A présent, je suis à ses côtés, pas pour le faire oublier, mais pour le soutenir, l’aider à porter sa croix et que la peine qu’il endure lui soit moins incompréhensible. Je ne suis pas son juge dans cette histoire, qu’un simple figurant, un témoin et je l’aime. Pour ses bons et ses mauvais côtés, pour ses erreurs et toutes les bonnes décisions qu’il a prise, les épreuves qu’il a traversées, aussi dures soient-elles font l’homme que j’ai aujourd’hui devant moi. Le barman initie un mouvement pour se dépêtrer du drap et sortir de la chambre, je me mords la lèvre en imaginant la douleur lorsque son genou tape le coin du lit. Même avec ma nyctalopie, je me le suis tapé un nombre incalculable de fois celui-là. Hyper fourbe. C’est son côté fier qui lui donne envie de quitter la chambre et sa maladresse qui le ramène vers moi. J’ignore pourquoi il n’a jamais évoqué la mort de son fils. Trop difficile ? Trop fier ? Aucune envie de donner une réalité à cet incident tragique qui lui a coûté autant que s’il avait perdu une partie de son âme. En parler, c’est accepter que cela existe un peu plus, je ne veux pas le contraindre s’il n’est pas prêt, mais il va devoir accepter que je suis là pour lui. Je rejoins le bord du lit où il s’est rassis et le sers contre moi. Sa respiration, son odeur, tout me calme, m’apaise et j’espère qu’il va s’autoriser à saisir un peu de mon bienêtre pour se le transférer.

« T’es son père, tu y es forcément pour quelque chose et c’est ta culpabilité qui est saine mon chéri … »

Oui, je connais plus ou moins la suite et celle que je ne connais pas, je n’ai aucune difficulté à l’imaginer. D’où ses nombreuses incarcérations, les rixes qui finissaient au poste et que sais-je encore. Pas une vie, juste de la survie. Je me détache de la chaleur de son corps alors qu’il vire son t-shirt et me remets contre lui. Je reste perplexe quant à sa décision pour Elaine.

« C’est que mon point de vue et ça vaut ce que ça vaut, mais … c’est pas un fardeau de savoir qu’on a un frère … même mort, ça reste son frère et vue le nombre de chose qu’elle t’a pardonné, je suis sûr que celle-ci aussi elle arrivera à comprendre. Elle est extraordinaire ta fille. »

Et c’est pas pour rien, son père l’est. Il l’ignore, mais il l’est. Enfin, cela ne regarde que lui et la jeune demoiselle, jamais je ne me permettrai d’interférer dans leur relation. Trop précieuse. Et j’aime cette petite de ce que j’en vois, c’est un sacré bout de femme.

« Laisse tomber pour les questions ce soir, je crois que la première a pas été tendre. C’est pas de la curiosité mal placée, c’est juste que, je t’aime et j’ai envie d’être là pour toi, mais du coup, j’aimerais savoir comment et t’es pas toujours facile à cerner. »

Même au bout de deux ans, le sorcier ne donne que des bribes de ses états d’âmes. J’ai toujours l’impression qu’il ne se permet pas d’avoir des faiblesses. Sauf que … il en a. Enfin, ça doit être un truc d’Abraxas puisque le frangin à l’air tout aussi intransigeant envers lui-même.

« Attend, si, j’ai peut-être une autre question, mais moins … enfin, je l’espère, moins difficile. C’est par rapport à Elaine, j’ai pas tout compris depuis quand vous vous êtes retrouvé et comment ça c’est fait et tout. »

Parler de sa fille chérie ? Sans doute un bon moyen de faire sécher les larmes que j’ai déclenché par mes questions intrusives.

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J'essaye de profiter de la fraicheur de sa peau contre la mienne, de me concentrer dessus pour ne pas me laisser submerger par ces souvenirs que mon subconscient rappelle à mon esprit dès que je ferme les yeux. Une autre raison pour moi de privilégier des nuits courtes, même si j'ai une fâcheuse tendance à n'avoir jamais su ne dormir que d'un œil. Quand je dors, je dors, même si c'est que pour quelques heures, et quand un cauchemar me prend, bonne chance pour m'en sortir. Enfin, je pense que Dante y a déjà eu droit à plus d'une reprise, même s'il n'a jamais vraiment cherché à en savoir plus.

"Justement. Elle m'en a déjà bien trop pardonné pour le supporter sans séquelles. Mes conneries, mes absences, toute cette connerie de magie dans laquelle je l'ai laissée plonger seule parce que j'ai pas été foutu de lui en parler avant... et même toi. T'es génial, et j't'aime, tu l'sais. Mais j'suis pas sur que "mec" et "vampire" ai été sur sa liste de la belle-mère idéale."

Une pensée qui parvient presque à me tirer un rire, en vrai, et je laisse légèrement retomber ma tête en arrière, pour laisser ma nuque reposer sur son épaule. Juste un instant.

"Bah, t'es un fichu détective privé, j'aurai du me douter que je serai un mystère à résoudre pour toi. C'juste... que j'ai jamais appris à me confier. C'plus simple de dépanner les autres quand ils ont besoin de le faire. D'ailleurs, tu fonctionnes un peu pareil, toi. Tu dis pas grand chose de ton passé."

Pas une critique. Une simple remarque essayant de retourner la conversation à mon avantage. Une façon un peu lâche de m'échapper, même si sa dernière question est moins fourbe que la précédente. Je prend le temps d'une respiration et d'un frisson avant de lui répondre, tournant juste assez le regard vers lui pour apercevoir la courbe de son menton.

"Si y a bien une date que j'ai jamais oublié, c'est son anniversaire. J'pouvais être dans mes pires moments, j'arrivais toujours à ressembler à quelque chose devant elle. Elle a fait une mauvaise chute à vélo quand elle avait huit ans. Et la voir sur ce lit d’hôpital... c'là que j'ai eu le déclic. Que j'ai réalisé que j'refusais de rester le fantôme qui déposait des cadeaux sur le rebord de sa fenêtre pendant qu'elle dormait. Fin, j't'apprends rien en disant qu'avec sa mère, c'était compliqué, alors on est devenus les pros des rancards secrets."

Et moi un pro de l'escalade de toit. Fin, j'avais moins de kilos à soulever avant d'avoir un chef cuistot à domicile. Sans rancune.

"Maintenant que j'ai un appart correct où la faire venir et qu'j'ai l'impression que ma vie fout un peu moins le camp à vau l'eau, c'plus simple. Pis elle est plus grande, elle fait ses propres choix. Si elle veut passer le week end ici, elle vient, si elle préfère rester chez sa mère, j'prends des heures sup."

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Je n’ai rien à redire, je sais qu’il culpabilisera toute sa vie, mais aujourd’hui, je peux parier qu’Elaine est méga heureuse de l’avoir à ses côtés et qu’elle pourrait lui « pardonner bien plus ». Je reste persuadé qu’elle ne considérerait même pas qu’il est coupable pour le décès de son frère, mais que c’est déjà bien assez une tragédie en soi pour qu’elle ne soit pas à deux cent pour cent derrière son père. Un soupire m’échappe et je le laisse continuer et hausse les épaules, toujours silencieux concernant ma vie passée. Je me glisse un peu plus contre lui, trop content qu’il se livre autant à moi. J’ai envie de penser que sa vie fout aussi moins le coup grâce à notre amour. Sa fille, c’est une évidence, mais avec lui, je sais que j’ai aussi mon importance et c’est extraordinaire pour moi ce sentiment de ne pas être inutile, de le sentir vibrer quand nous passons du temps ensemble, lorsqu’on se retrouve ou encore à chaque fois qu’il m’appelle et que je me sens niais devant son minois qui s’affiche sur mon écran.

« J’t’aime aussi mon amour, merci de me dire tout ça. »

Je dépose un baiser sur sa joue et réfléchis quelques secondes. Pas trop envie de refaire tomber la bonne humeur ! J’ai bien vue le demi sourire dans le noir, parler de sa progéniture lui donne le smile à mon pépère ! Franchement, ce mec va me rendre tellement cucul que je vais finir par dessiner des licornes dans le coin de mes dossiers d’enquête entre deux photos de cadavres en putréfaction ! Le romantisme comme jamais.

« Je connais pas vraiment Claire, mais j’ai l’impression que ça va dans le bon sens quand vous vous accordez à propos de Elaine. Je trouve ça chouette. »

Je triture finalement la mèche sensée retenir ma perle avant de me rappeler qu’elle est quelque part au sol. Un regard furtif dans sa direction, mais je capitule sachant bien que je ne la retrouverais pas ainsi et que rien ne presse. Je veux bien devenir un peu plus loquace pour lui, mais tant qu’à faire, autant qu’il n’hésite pas à me poser des questions parce que de moi-même je n’y irais pas.

« C’est pas que je ne veux rien dire sur mon passé, on peut en parler quand tu veux, c’est juste que … je sais pas, je trouve qu’on s’est lancé dans notre vie ensemble et ça m’emballe. Je me sens pas … plus … le besoin de ressasser tout ça. »

J’ai jamais pris le temps de vraiment parler de Luka à Nath. Je l’ai évoqué vaguement comme mon amour de jeunesse, mais c’est pas facile. J’ai toujours cette culpabilité le concernant … sans doute quelque chose qui pourrait s’apparenter à ce que ressent le jeune homme à propos du décès de son fils je suppose. Si j’avais pas entraîner Luka à ma suite, on aurait peut-être mieux soigner sa maladie etc etc etc et j’en passe. De toute façon, aujourd’hui, plus rien n’y changera et j’ai Nath pour me tirer de l’ombre que je traîne tout seul.

« Après si toi t’as des remords un jour et que tu veux finalement me dire oui, t’as le droit tu sais ! »

Je le taquine, mais merde ! Qu’est ce qu’on serait beaux tous les deux en costards pour le grand jour, c’est limite une offense à l’humanité de pas le faire. Je relancerai pas le débat, juste je me permets de laisser la porte ouverte, parce que y’a quand même deux zigotos dans la famille qui vont pas tarder à se passer la bague au doigt et ça me titille. Enfin, je fais taire le vieux romantique qui sommeille en moi et me garde dans un coin de la tête que je vais le faire regretter de m’avoir dis non en le bombardant de dîner aux chandelles, sorties rocambolesques et autres petits soins dont il ne me semble pas nécessaire d’en détailler le contenu.

J’attire Nath contre moi et l’incite à venir regagner le lit pour que nous nous installions plus confortablement. Je profite qu’il soit contre moi pour caresser son torse du bout des doigts et caresser la douce toison qui le recouvre. J’esquisse un sourire au petit bonheur que cela me procure de le sentir contre moi. Je savoure ce moment d’échange et essaye de comprendre pourquoi on ne se permet pas plus souvent de se mettre à nu sentimentalement lui et moi.

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Il dépose ses lèvres contre ma joue, me tirant un sourire ironique quand il me dit que ça a l'air de s'améliorer entre Claire et moi. La preuve par dix qu'il n'a pas encore été témoin de l'une de nos conversations.

"Tant que la discussion dure moins de dix minutes, ouais, ça passe. Faut pas nous en d'mander beaucoup plus."

Faut pas m'en demander beaucoup plus. Associez mon entêtement et ma rancune et imaginez un peu ce que ça peut donner. J'ai jamais dit que j'avais pas mes tords dans toute cette affaire, juste que c'est plus fort que moi, je lui en veut autant que j'ai pu l'aimer, cette femme, et s'il y a bien peu de personnes que j'ai réellement aimé dans ma vie, comparé au nombre que j'ai pu simplement me taper, elle en a fait partie, et pas qu'à moitié.

Je l'écoute éclipser son passé sans en avoir l'air, glissant machinalement une main dans ses cheveux encore partiellement tressés par notre belle-sœur préférée. Y a pas à dire, j'ai encore du boulot avant de le rendre de nouveau présentable, celui-là. Une main qui finit par lui envoyer une pichenette contre le pectoral quand il remet un certain sujet sur le tapis.

"Les seuls remords que j'ai présentement c'est d'avoir reculé le moment de me faire couper la tignasse quand j'vois la tête que t'a fait Axel. Fais-moi penser à appeler demain, j'veux pas lui donner une seconde tête à coiffer."

Si j'ai vraiment aucun remord à lui avoir refusé cette réponse qu'il attendait de ma part? D'accord, peut-être que j'aiquelques remords quand je pense à la douche froide qu'il a pris ce jour là. Mais il aurait du s'y attendre. Le mariage, j'suis vacciné, c'bon. Et si j'dois être honnête, on a pas besoin de ça pour savoir qu'on s'aime, lui et moi.
Je le laisse m'attirer contre lui alors qu'il se réinstalle dans le lit, et je glisse mes bras autour de lui alors que ses doigts glacés parcourent mon torse. Si j'y suis habitué, je ne m'épargnerais pas un léger frisson, avant de poser ma tête dans le creux de son cou, enfouissant mon nez dans ce qu'il reste encore de potable dans ses cheveux.

"Et Dante? Oublie pas cette fichue perle avant de sortir demain matin. Steuplait."

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Je fais semblant de me sentir blesser par sa pichenette avant de lui asséner un sourire moqueur et un clin d’œil.

« Noooooon, pas ta magnifique chevelure, je refuse ! Promis je te protégerai d’Axel la terrible et ses petits élastiques à tresses ! »

Il se glisse contre moi et je me perds dans ce moment de tendresse.

« Mmmh … »

Foutue perle … la brûlure s’estompe déjà, mais je peux dire adieu à ma veste qui a légèrement cramé au col …

« T’inquiète, je ne compte pas réitérer l’exploit, sinon je vais finir par plus avoir rien à me mettre si je flambe toutes mes fringues. Pour me venger, j’entrainerai Axel dans les boutiques pour m’en acheter des nouvelles, je suis quasi sûr que t’es pas un fana de shopping. »

Je dépose un baiser sur le bout de son nez et me laisse une note mentale dans un coin de la tête qu’il faut que je prévienne Axel de ses nouvelles obligations envers ma garde-robe. Je suis pas un grand fan de vêtement maiiiiiis … je dis pas non à avoir la classe dans de belles chemises, une veste bien taillée ou encore une ceinture un peu fun. J’avoue avoir même un petit péché mignon pour les bijoux pour hommes. Je trouve ça incroyablement beau si bien assorti.

« Si jamais, j’en ai pas parlé à Elaine de ma perle … je sais pas si je suis parano, mais avec le taf qu’on a avec Silas, j’préfère qu’un minimum de gens soient au courant. C’est un peu mon talon d’Achille … »

En terme de faiblesse physique, c’est indéniable, mais ma plus grande faille reste l’incroyable sorcier qui me sert de copain. Si à cause de mon travail, il lui arrivait malheur, je pense que je deviendrais fou. C’est d’ailleurs pourquoi je garde l’habitude de passer principalement par la fenêtre en furtif plutôt que par l’entrée principale. Si cela venait à se savoir, les créatures de la nuit que mon collègue et moi tentons de chasser pourraient bien s’en prendre à mon homme.

« C’est pour ça qu’Axel me l’a enlevé sans s’en soucier, elle est pas au courant non plus … »

Et oui, même ma belle-sœur d’amour n’a pas la moindre idée de ce qui me permet de tenir en plein jour. Une vague explication sur un sort et basta, rien de plus rien de moins. Les seuls au courant sont Silas et Nath .
Le brun se retourne pour me faire face et je sens son regard se porter sur moi.

« Tu me trouves trop parano ? »

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"J'sais pas comment ça marche pour toi, mais perso, ça r'pousse toujours trop vite les ch'veux. Sont trop courts pendant quinze jours, pis sont biens une semaine, et paf, tu peux plus rien en faire. Ok, c'pas comme si j'essayais vraiment d'en faire quelque chose. Mais sérieux là, j'les ai rarement eu aussi longs, alors, avec la menace Axel en prime... j'prend pas l'risque d'avoir la même coupe que toi, désolé!"

Pas un fana du shopping? Gagné. Autant j'ai découvert, avec Claire, pis Elaine, que j'étais doué dans le rôle du porte-sacs, autant je reste à la porte de la boutique. Parce que même quand tu arrives à soutirer la promesse qu'on te fiche la paix, on arrive quand même à te pousser à essayer un truc. Non merci. Autant j'ai des fringues corrects au taf, pas trop le choix non plus, autant mes fripes me conviennent très bien dans la vie de tous les jours. J'préfère être confortable dans mes fringues, voyez.

"Pas fan nope. Par contre s't'as besoin, j't'en voudrais pas d'te servir. Ou d'ram'ner des fringues ici t'sais. J'ai d'la place à revendre dans mes placards."

Au milieu de mon bordel digne d'une boutique d'antiquaire. Non mais si faut faire de la place, je sais en faire. Juste que quand y en a pas besoin, j'ai tendance à m'étaler. C'tout. Si c'est une invitation tacite? J'm'en rend pas vraiment compte, en vrai, mais vu le temps qu'il passe ici, de toute, c'est quasi comme si il y vivait à l'année.

Si je le trouve parano? Totalement. Mais je suis le type qui fait trop confiance trop vite alors même que la vie n'a eu de cesse de lui montrer que c'était la pire connerie à inventer, la confiance, alors... je suis très mal placé pour parler.

"Légèrement parano sur les bords, ouais. Fin, ton secret est bien gardé avec moi. Par contre, j'te le donne en mile, j'suis pas convaincu que Elaine s'en servirait contre toi hein. Elle t'adore."

Axel non plus, entre nous, mais autant je parle volontiers pour ma fille, autant les histoires de ma belle-soeur ne regardent que ma belle-soeur. Ok, un type plus possessif que moi pourrait penser qu'elles le regardent lui aussi quand on voit le temps que mon mec passe avec elle. Mais j'suis aussi peu jaloux que méfiant, malgré que ça m'a déj fait du tord une fois. Pis j'ai rien à dire vu le temps que j'passe moi-même avec Shawn. Ok, moins depuis qu'il s'est plus ou moins casé, entre nous. D'ailleurs, va falloir que j'y tire quelques vers du nez, parce qu'il est plutôt discret là-dessus... mais on cause pas de lui là.

"Fin tu fais comme tu veux, c'pas moi qui te forcerai à lui en causer. Juste, si le sujet vient sur la table, lui ment pas. J'y ai bien assez menti depuis toujours pour que j'veuille pas qu'on en rajoute encore une couche."

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Un sourire me fend le visage alors qu’il évoque de me faire de la place dans ses placards.

« J’ai remarqué que tu n’étais pas un fin limier du rangement, mais j’accepte volontiers ta proposition mon amour ! Et sache que si tu me coupes les cheveux ce soir, demain tu retrouveras la même tignasse sur ma tête, je pense que c’est l’effet immortel. Même ma coupe de cheveux super classe résiste au temps. »

Ça pourrait être la solution … je me rase, ça enlève toutes les tresses et demain matin je n’aurais plus aucune trace de l’horrible aventure qu’ont subi mes cheveux ce soir. Un autre baiser rejoint ses lèvres cette fois-ci et je me perds à savourer ce contact éphémère.

« Je veux de la place aussi dans la penderie pour mes costumes et mes chemises par contre, je suis trop tatillon sur ça … je te laisserai découvrir tous mes défauts tu vas voir ! Déjà t’auras pas assez d’une salle de bain entre l’adolescente et moi. »

Je ris à ma connerie, mais je ne rigole pas, j’ai toujours aimé prendre mon temps pour prendre soin de moi, de mon apparence depuis que je suis mort. Pourquoi ? Tout simplement parce que mes aptitudes vampiriques se sont développées partiellement autour de cela. Je suis la caricature même du vampire charmeur qui peut faire chavirer les cœurs d’un sourire et obtenir docilement le consentement de quelqu’un en lui parlant de ma voix la plus séductrice. Je n’oserais pas contredire le fait que j’ai potentiellement légèrement utilisé ces dons sur Nath pour le séduire, mais c’est en toute bienveillance ! J’avais vraiment trop envie de le séduire, de le connaître, qu’il m’apprécie et je ne regrette pas une seconde que mon jeu de drague ait pris.

Même si très vite, je déchante à l’entendre me dire que je suis parano, ce qui m’embête surtout, c’est qu’il a raison.

« Je sais, je sais, le mensonge c’est pas un choix et je t’avoue que ce n’est pas parce qu’elle risque de le divulguer ou l’utiliser contre moi, mais je ne veux pas la mettre en danger … non, mais je me fais sans doute des films, c’est juste que je vous aime et j’ai l’impression que tout ce que je suis, tout ce que je fais, c’est juste une mine de dangers. J’ai déjà la mort de Luka sur la conscience, je ne me le pardonnerai jamais s’il vous arrivait quoi que ce soit … »

C’est débile … je suis débile … je lui dis trois secondes avant que je ne souhaite pas ressasser mon passé et je lui prouve par « A » + « B » que je suis encore totalement parasité par tout ça.

« J’peux t’accompagner au bar ce soir ? Je t’assure, j’ai vraiment pas envie d’être seul … Tu devrais m’interdire de prononcer son prénom, ça m’aiderait à pas devenir morose comme ça … »

Un soupire franchit mes lèvres et je me redresse sur le lit, m’éloignant de la chaleur de son corps, son torse nu contre le mien était pourtant d’un grand réconfort. Je m’autoflagelle … impossible de profiter de Nath sans me dire que Luka n’aura plus jamais cette chance, vivre. Je passe une main sur mon visage pour caresser la brûlure encore bien présente. Toutefois, déjà une cicatrice se forme et je sens la chair moins chaude sous mes doigts. Las de mon attitude de lunatique, je cherche la perle qui a sans doute roulé sous le lit jusqu’à la sentir et l’empêchant de filer une fois encore. Je débroussaille les dernière tresses entremêlées en passant frénétiquement ma main libre dans mes cheveux et entreprend de refaire une tresse dans le noir tout en y incorporant le charme qui me protège du soleil. Je guérirais moins vite, mais j’évite de me retrouver face à l’astre du jour et de finir en tas de cendre. Un regard vers l’extérieur et je constate qu’il est sans doute bientôt l’heure pour mon cher et tendre de se rendre à son travail … impossible pour moi de me dire que je vais être séparé de lui, je compte bien m’imposer ce soir dans son environnement même si je me ferais tout petit pour ne pas le déranger, juste le voir m’apaisera.

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J'aime mon bordel, c'clair. Parce que j'aime pas les grands espaces vides et ordonnés. Sans doute un autre traumatisme de jeunesse. Avec mon paternel, si tu prenais un truc à 8.5cm du bord de l'étagère (et encore, fallait déjà être fêlé pour "prendre un truc"), t'avais pas intérêt à le reposer à 9cm du bord de l'étagère. Du coup, chez moi, si tu prend un truc à droite, t'as le droit - non, le devoir - de le reposer à gauche. En vrai je sais faire de la place quand y en a besoin, et sans tout planquer sous le lit ou dans le placard le plus proche. C'juste que mon bordel, je l'aime en bordel.

"Si c'est pour te libérer un peu de place, j'saurai faire un effort. Tu pourrais être surpris. Par contre, la penderie, c'pas un truc que j'ai en réserve ça. Fin si, là-haut. Donc s'tu veux pas caler tes chemises à coté des robes de ma fille, va falloir que t'en ramènes une."

Moi j'm'en fous, je sais qu'il irait pas monter là-haut quand Elaine y est, même si ça le forçait à s'habiller pareil deux jours d'affilée. Mais j'suis pas sur qu'il soit hyper confort avec l'idée. J'dis ça, j'dis rien.

"Si ton plus grand défaut, c'est de passer deux heures dans la salle de bain tous les matins, je devrais y survivre t'sais. Même si j'pense m'arranger pour me lever avant vous le matin. La priorité au plus rapide!"

De manière générale, on peut pas dire que je sois lève tard... quoique j'ai tendance à le devenir avec lui. On peut pas dire qu'il réchauffe les draps (c'est même une tannée en hiver ce mec!), mais sa présence à coté de moi, ça m'aide à faire des nuits de plus de cinq heures. Comme là tout de suite, j'vais être honnête, j'oublierai sans aucun souci que faudrait que je songe à aller bosser. Et s'il ne finissait pas par se lever lui-même, après avoir fait dévier la conversation vers cet ex perdu dont il est loin d'être guéri, je croit que je ne me serai tout simplement pas levé. Pour le coup, je lui laisse le temps de rechercher et replacer sa perle dans ses cheveux avant de le rejoindre, inversant les rôles. A mon tour de le réconforter, même si on est assez partis pour une soirée "mélancolie" pour qu'aucun des deux ne semble bien doué pour réconforter l'autre.

"Nan, j'te l'interdirai pas." Je glisse mes bras autour de sa taille, embrassant sa nuque avant d'appuyer mon menton sur son épaule. "T'as l'droit d'en parler. T'as l'droit d'y penser. Et c'pas en refoulant la douleur au plus profond que tu vas t'en défaire. Crois-moi, j'ai essayé. Tu m'dis d'te confier mes peines... soit. Mais fais de même. S'il te plait."

Je finis par m'écarter à contrecœur quand j'ai l'impression qu'il s'est calmé un peu, avant d'appuyer sur l'interrupteur pour allumer la lumière volontairement tamisée. Déjà, parce que te prendre la lumière vive d'une ampoule "normale" dans la gueule quand tu dors profondément, niet. Ensuite, parce qu'il y a bien assez de lumière avec la baie vitrée de la pièce principale pour s'autoriser un peu de calme dans la chambre. Et enfin, j'avoue, parce que j'me suis dit que ça irait mieux aux yeux de noctambule de Dante. Bref. J'attrape la première chemise et le premier pantalon qui passent sur l'étagère pour m'habiller rapido. J'le laisserai m'expliquer comment prendre deux heures pour une douche en rentrant.

"T'es plus que le bienvenu. Luther va râler mais je l'emmerde."

Pourquoi qu'il râlerai, le patron, que j'y ramène un client pour la soirée? J'l'entends déjà me dire que, non content de me trainer une odeur de vampire, faut en prime que je ramène le vampire (pas ma faute si ce fichu loup sait pas faire trainer son nez ailleurs), et que j'vais pas être des plus concentrés ce soir. Ca c'est pas impossible. Bah, j'vais juste un peu moins draguer les clients et un peu plus mon mec, il est où le souci?

"Tu t'sens de conduire ou j'm'y colle? Pas envie de me les peler sur la moto ce soir."

Je n'attends pas qu'il me réponde pour traverser la pièce à la recherche de mes chaussures, pour finalement les retrouver sous le lit. J'accuserai bien le chat, mais si y a bien une pièce qui lui est interdite, c'est ma chambre. J'ai essayé au début, mais les poils de chat dans les draps, c'était vraiment pas possible, donc nope. Me relevant, je me rend compte que mon vampire préféré a toujours la même expression, et j'attrape son bras pour attirer son attention.

"Eh Dante? Il nous arrivera rien à cause de toi, ok? J'ai un foutu démon dans la famille, tu t'rappelles? La merde viendra pas de ta paire de crocs. J'appellerai même ça un avantage. J'ai pas de bobards à te raconter pour expliquer mes débordements de magie. J'ai fait le tour des excuses peu valables avec Claire... Bref, j'te laisse piocher de quoi t'habiller? J'suis quasi sur que tu t'feras refouler habillé comme ça."

Je lui vole un baiser en passant avant de sortir de la chambre pour passer dans la salle de bain, tentant de donner un semblant de sens à mes cheveux... ce qui se résume à passer une main dedans devant le miroir.

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Je fronce les sourcils m’imaginant ranger mes chemises à côté des robes de la jeune fille. Nope ! Nope et nope !! Il y a certaines choses qui sont justes inimaginables. Je trie mes chemises par couleur et en fonction de la longueur des manches, et si elle mélange ? J’évince cette pensée de ma tête en la secouant de droite à gauche. Il vaut mieux pas que Nath sache pourquoi je refuse sa proposition sinon il va me charrier pour les 40 prochaines années. Sinon, je ne peux pas vraiment dire que j’y passe deux heures dans la salle de bain, mais 30 – 45 minutes facilement. Et si je l’embarque sous la douche avec moi, est ce que j’ai le droit aux prolongations ou je vais me gratter ? De plus, je pense que je ne dors jamais vraiment donc théoriquement, je suis toujours levé plus tôt que lui. Je lui adresse une mine boudeuse. Pas que je sois fâché contre lui, mais juste qu’il a raison et que j’ai tort, alors je boude.

« Ma croix que veux-tu … Si tu arrives à me souler avec de l’alcool hein pas parce que tu es soulant, à ton taf, je parlerais peut-être … »

Ou je vais grave avoir envie de lui faire l’amour et on devra trouver un coin tranquille à sa pause pour me faire visiter le septième ciel au choix. A sa question, je me mets dans un coin de ma tête que ma Tesla pourrait être ce coin tranquille sans aucun problème et qu’on se la jouera Titanic avec la buée sur les vitres et tout le tralala.

« Je conduis. »

Je lui réponds alors que déjà il s’éloigne et l’observe partir résoudre l’énigme de la chaussette disparue.

« Oui, oui je sais … ma paire de crocs est quand même potentiellement incontrôlable par moment et j’ai des pulsions … »

On en parle de sa nuque, de sa peau, de son souffle à la nuit tombée ? Est-ce que je lui dis que je suis obligé de sortir de la chambre, me prendre une poche de sang ou trouver une autre source, que cela finit éventuellement en ronde dans les salles de saignés pour trouver ma jugulaire préférée, celle de ce jeune homme dont je me sers comme abreuvoir. C’est horrible. Le pire est quand je reviens me coucher à ses côtés. Je me sens sale, un monstre. Je soupire et le rejoins dans la salle de bain après avoir choisi un t-shirt blanc et un jean aubergine propre parmi ses affaires. C’est grave si une fois habillé dans ses fringues, je trouve que le jean me donne un cul sublime ?

« Je devrais grave te piquer plus souvent des fringues, t’as bon gout mon chéri ! Ça pourrait résoudre notre problème de penderie. »

Je lui ébouriffe les cheveux qu’il a vaguement tenté d’ordonner et lui souris.

« Allez ramène ton p’tit cul sexy, sinon tu vas arriver en retard et Luther va encore plus me maudire. »

Je retourne dans le salon et attrape mes clés de voiture ainsi que ma sacoche. Il doit bien y traîner un ou deux dossiers au minimum à lire pendant que Nath se fera draguer par sa clientèle, qu’ils se feront des espoirs et au final, ce sera avec moi qu’il rentrera. C’est pas de la jalousie, plutôt l’inverse. J’adore le voir se faire allumer alors qu’au final, je ne l’imagine même pas pouvoir me tromper. J’ai l’exclusivité sur ce beau gosse et ça, je l’espère jusqu’à la fin de sa vie.

Nous descendons les escaliers l’un derrière l’autre et je ne remarque qu’une fois dehors que cela peut paraître étrange que je n’ai pris aucune veste pour couvrir mes épaules alors que Nath a enfilé la sienne. Il faut dire que le vent, le froid, la pluie, la neige … bof quoi, j’ai plus vraiment la sensation. Arrivé devant la voiture, je lui lance mes clés qu’il rattrape sans peine et m’installe du côté passager. J’étire mes jambes et le laisse prendre place comme il se doit du côté conducteur.

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Sa croix. On peut pas dire qu'il soit bavard sur le sujet, comme j'le suis pas sur nombre d'autres, mais je crois en avoir compris le plus important. Je suis l'unique responsable de la disparition de mon fils, et on a pu tenter de m'expliquer de trente-six façons différentes que ça n'aurait rien changé que je sois juste à coté de lui à ce moment là, c'est une culpabilité qu'on ne m'enlèvera pas. Je la retrouve chez lui quand il évoque Luka. Le peu qu'il le fait. C'est dans son regard, dans sa façon de poser ses mots les uns à la suite des autres... bref, je le connais, et ça, j'arrive à le percevoir. Je sais pas exactement ce qui s'est passé entre eux, mais il s'en pense responsable, et je suis bien placé pour savoir que c'est pas avec des "mais non c'est pas ta faute" qu'il s'ouvrira plus.

"Quand tu voudras. Comme tu l'as dis, c'est ton histoire, et j'veux pas être curieux. Mais j'suis là, et j'ai encore un peu de place dans mon panier à mélancolie pour supporter la tienne avec la mienne."

J'me doutais bien qu'il voudrait conduire. J'crois que le fait que ce soit Shawn qui m'ait appris à conduire y est pour quelque chose. Le problème avec ça? Aucun de nous deux a jamais passé le permis. Mais justement, ça me rend plus prudent qu'un autre. Ca serait con d'attirer l'attention des flics, non? Quoique la dernière fois que j'l'ai fait a pas été pour me déplaire. Pas que la cellule ai été très accueillante. La compagnie, un peu plus.

"Fais pas ça. D'essayer de me prouver que t'es dangereux. J'te ferai remarquer que c'moi le plus dangereux de nous deux. Magie incontrôlée, émotions en vrac, toussa toussa. Tes crocs m'effrayent pas. Aussi proches de ma peau que tu puisse les glisser, d'ailleurs."

Si j'le prend à la rigolade, de visu, j'avoue que la fuite vers la salle de bain était quand même calculée. Parce que je suis sincère le concernant. Mais je suis loin de plaisanter face à ma propre magie et à ses conséquences. Il m'apaise, d'une certaine façon, et ça aide, franchement. Mais une part de moi se demande toujours ce qui se passera le jour où ça va péter à nouveau. Tant que Elaine et lui sont pas là pour en faire les frais, c'est tout ce qui m'importe. Parce que, soyons honnêtes, mes petites explosions de fenêtres brisées, c'est de la blagua à coté du bordel que j'ai pu provoquer quand j'étais au plus bas. A l'époque, mes moyens de "relaxation" (si on peut dire) étaient bien moins sains que sa présence à mes cotés. Pour être clair, être complètement stone, ça aide à éviter les émotions fortes. A pas les laisser nous envahir, en tout cas. Sauf que ça fonctionne comme les anti-douleurs. Quand un cachet suffit plus t'en prend deux, et avant de l'avoir vu venir, tu t'enfile la boite. Pareil. J'peux dire que Dante est ma nouvelle addiction, sauf que, contrairement à ce qu'il pense, celle-là a bien moins de chances que les autres de me tuer.

Il me distrait de mes pensées en débarquant dans la salle de bain derrière moi, et j'suis d'accord avec lui, ces fringues lui vont mieux qu'à moi. D'accord, je suis pas objectif, et en vrai, vaut mieux que j'arrête de reluquer. Genre, tout de suite. Sa main dans mes cheveux me provoque un frisson dans la nuque, du genre qui n'est pas provoqué par le froid de sa peau, auquel je commence à être assez habitué pour ne plus vraiment le sentir, de toute.

Si vaut mieux pas que j'tarde? Pas faux. Je le suis, attrapant ma veste en passant avant de sortir de l'appart, fermant la porte à clefs derrière nous. L'ascenseur? Au rez-de-chaussée, ça sera aussi rapide de descendre l'escalier que d'attendre qu'il monte. Je vérifie en passant que ma moto gêne personne dans le hall avant de sortir dehors, rattrapant in extremis les clefs que Dante me balance. J'pensais qu'il conduisait? Comme il veut. Je m'installe donc sur le siège conducteur, le laissant volontiers me guider pour mettre son bolide en route. Disons que la boite manuelle que j'emprunte parfois est légèrement moins technologique. Du genre? Que les vitres sont même pas électriques. Un truc perturbant, par contre, c'est de pas entendre le moteur. J'ai l'impression d'avoir calé à chaque fois que je dois m'arrêter. Du coup, je met tellement de neurones en jeu pour nous mener à bon port que je ne meuble pas vraiment le silence du trajet, hormis pour écouter ses indications. J'pense le laisser gérer le retour. On va pas dire que c'pas agréable, mais j'pense que s'entrainer dans les bouchons c'pas le mieux en fait. Bon, j'vais pas me plaindre, je trouve une place pas bien loin du bar, et j'arrive même à lui offrir un créneau parfait du premier coup. Y a une assistance au parking? D'accord, ça aide peut-être.

"T'es au courant que ça change un peu de ma vieille bécane qui vaut pas une queue de pelle cassée? J'crois que pour une arrivée remarquée, j'suis bon!"

J'pourrai m'y habituer. Et en même temps, j'vivrais pas de la lui emprunter. Manquerait plus que j'y casse un truc dessus. A mon avis, les réparations coutent un peu plus un bras que sur ma bécane. Ce qui me fait dire ça? J'ai quasi aucune notion de mécanique, et j'arrive à la dépanner, ma moto. Là, nan, j'm'amuserai même pas à lui faire la vidange.

"Attends avant de descendre. Met ça, tu s'ras plus crédible." Je me débrouille pour retirer ma veste dans l'espace laissé entre le siège et le volant pour la lui passer, sentant la contestation qui va suivre. "J'ai passé dix ans dans ces rues, et mon dernier appart avait aucun chauffage ou isolation. J'devrais survivre à cinquante mètres dans le froid. Et j'en ai une autre dans le vestiaire, si jamais."

Je l'embrasse rapidement avant de m'extirper de la voiture, en faisant le tour pour le rejoindre, glissant mes doigts dans les siens. Ok, j'avoue qu'il fait pas chaud. Raison numéro deux pour laquelle je ne perd pas de temps à l'entrainer jusqu'au bar. La numéro une? Là, j'suis plus que ponctuel. J'dirai même que j'vais arriver sur le fil. Et c'pas le coup d'œil mode "ah ben quand même" des collègues qui me fera penser le contraire.

"Bon allé... prions pour que la soirée soit calme."

Et que j'ai personne à foutre dehors, parce que je ne suis pas sur que me faire potentiellement malmener devant Dante soit une idée brillante pour qu'il laisse passer, comment il dit déjà... les "pulsions" de ses crocs.

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J’aime la manière qu’il a de me laisser ma bulle, mon coin perso où je peux ruminer mon malheur jusqu’à ce qu’il me manqué trop et que je l’y invite par moi-même. Toutefois, à force de rester secret, sur mes pulsions, mon passé, je me demande s’il se rend réellement compte du danger que je peux être. C’est vrai que je n’ai encore jamais assisté aux désastres que sa magie aurait causés par le passé, le brun persiste à se penser extrêmement instable sur ce point et moi qui le rassure …. Mais au final, je ne suis guère mieux que lui. C’est le serpent qui se mord la queue entre nous, on ferait mieux de se croire l’un l’autre et d’accepter que c’est sans doute cela qui nous stabilise. Je ne saurais dire lequel est le yin et lequel est le yang, dans le fond, sans doute l’un puis l’autre alternativement. Nous nous préparons sans remettre le sujet sur le feu, rien ne sert de précipiter les choses ni pour lui, ni pour moi. Nous parlerons de nos démons plus tard. Devant la voiture, Nath me jette un sacré regard alors que je lui propose de conduire ma caisse. Un sourire vient naître sur mon faciès.

« T’inquiète, je te guide mon prince, tu vas t’en sortir sans nous tuer. »

C’est sûr que si un de ses collègues le voit débarquer dans cette beauté, il va comprendre qu’il y a eu quelques changements dans la vie de mon cher et tendre. Je me complais dans l’idée que j’en fais intégralement partie. Quelques explications sont nécessaires afin qu’il démarre et comprenne les pédales. Un peu surpris au début par la conduite, le brun devient vite plus à l’aise et nous arrivons à bon port sans aucun encombre. Je détache ma ceinture, mais il m’interrompt avant que je ne sorte. Un sourire en coin, je lève les yeux aux ciel.

« Si tu veux, mais je n’ai aussi que quelques pas à faire tu sais ! »

Je bronche, mais enfiler sa veste avec son odeur me remplit de fierté et de joie. J’hume le col, l’endroit le plus chargé en senteur et soupire. Un baiser vient rejoindre le tableau et je me sens pousser des ailes. Le bonheur a exactement cette odeur.

« Je sais pas si je vais te la rendre par contre, ça va devenir mon doudou ce truc. »

Mon homme sort plus vite que prévue et je n’ai pas le temps de lui retourner son élan de tendresse, une fois dehors, nos mains se joignent et je savoure une fois encore la perfection de cet instant. C’est ainsi que nous arrivons main dans la main jusqu’à l’entrée du bar. Une fois dedans, ce n’est plus la même. Nath me laisse me débrouiller pour aller à son vestiaire et prendre son service. Heureusement, le brun a réussi à chasser pour un temps mes ruminations et je me dirige vers le comptoir pour demander un verre au premier serveur qui sera disponible.

« Rhum-coca s’il te plaît. »

Je tutoie …. Encore et toujours. De toute façon, ses collègues m’ont assez souvent vu pour se faire vite fait une idée de qui je peux être. Un ami, un cousin … j’ignore si certains savent que nous sommes ensemble et je me demande aussi si cela n’arrange pas Nath quelques fois au bar de ne pas annoncer haut et fort qu’il n’est plus célib’. Enfin, j’imagine, je n’en sais rien. Peut-être qu’il existe certaines certains qui viennent boire un coup ici en toute fidélité en espérant avoir son numéro. Je ne peux réprimer un nouveau sourire et j’attrape mon verre après avoir régler l’addition et converge vers une table tranquille dans un coin de la salle. Juste assez isolée pour me permettre de ne pas trop me faire déranger en sortant mes dossiers et occasionnellement jeter un regard sur mon homme pour me redonner courage.
Nath n’est pas encore arrivé que je vois Ava passer près de moi. La demoiselle se retourne brutalement, sans doute mon odeur l’incommode et je lui souris.

« Bonsoir Ava, tu vas bien ? »

Je n’ai personnellement rien contre elle, paraît-il qu’entre loups et vampires, une guerre ancestrale se joue sans savoir pourquoi … je suppute une guerre de territoire. Perso, je m’en fiche royalement, je ne suis pas un conquérant et encore moins belliqueux, plutôt le genre nounours

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On approche à grand pas de la prochaine pleine lune, encore deux nuits et autant vous dire que je pète le feu. Je dirais pas que je suis à fleur de peau, quoique si peut-être, mais c'est surtout de pire en pire au fur et à mesure que la semaine avance. Je tâche de prendre un maximum sur moi, sinon on va encore dire que j'ai mes règles. Cette réflexion m'exaspère au plus au point. Je vais leur montrer ce que ça fait un peu trop de sang qui sort de leur corps, ça va leur faire tout drôle, non mais sans rire.

Bref, tout ça pour dire que je n'ai plus qu'une heure de boulot avant d'avoir finit mon service pour aujourd'hui, lorsque je me rends compte que lorsque Nath est arrivé tout à l'heure il n'était pas seul. Je suis en effet interpellée par une odeur fort désagréable à mon goût, mais que certain apprécie particulièrement si j'en crois les dires. Le fameux chéri de Nath est parmi nous. Tiens on parlait de sang, y en a un autre qui s'y connait là.
La guéguerre loup/vampire ? Ça me plaît quand ça m'arrange, là pour le copain de mon collègue et ami, je peux faire un effort. Ça plaira peut-être pas à toute ma meute, Luther comprit (même si je le pense partiellement de mon côté sur ce coup, tant qu'il vient pas nous chercher des noises, on est plutôt pour la paix des ménages), mais je les emmerde, ça a toujours été, je suis pas prête de changer.

- Salut. Dante c'est ça ? Ravie de te revoir.

Malgré mon frein olfactif, j'arrive à lui sourire, c'est déjà pas mal.

- Tu veux quelque chose avec ton verre ? On doit bien pouvoir te trouver deux/trois cacahuètes !

Si ma connerie me fait rire ? Oui plutôt.

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Déjà, une louve ravie de me revoir et sans que je ne décèle une quelconque ironie dans sa réplique, je suppose que c’est déjà extraordinaire dans notre monde de légendes urbaines.

« C’est ça, comme l’écrivain … Et merci, mais non merci ! »

Je lui adresse un clin d’œil à sa proposition qui semble la faire sourire. Je préfère qu’on se dise qu’on se nargue, on se titille ! Rien de bien méchant, mais un jeu auquel je me prête volontiers.

« J’suis plutôt du genre steak bien saignant si tu vois ce que je veux dire ! »

De loin, je remarque mon beau brun prendre son service à son bar. Merde, qu’il est sexy quand il a l’air sérieux comme ça. Je soupire de contentement avant de reporter mon attention sur la louve. J’veux pas faire peur à Nath, mais elle ferait définitivement partie des femmes qui pourraient réveiller mon 1% d’hétérosexualité. En revanche, je ne peux m’empêcher de penser que mon homme aurait aussi de quoi céder face à une beauté pareille. Excepté que je ne l’imagine pas une seule seconde être infidèle. D’ailleurs, je ne dirais pas non à croquer un bout de mon homme plus tard !

« En tout cas, j’aime bien l’ambiance de ce bar, j’devrais y faire mon repère de détective avec mon collègue … »

Je me mords la lèvre, réfléchissant à ce que je viens de dire.

« Quoique, pas sûr que vous soyez bien folichon à voir deux vampires traîner dans le coin cela dit. Nath me parle pas trop de votre boss, c’est un loup aussi non ? »

Mon beau brun à tendance à plus s’affaler comme une loque quand il rentre du taf, une douche rapide et j’peux parfois oublier même que je vis en couple si on oubliait les potentiels ronflement de fatigue. Alors, oui, par acquis de conscience, j’ai un peu investiguer son lieu de travail, mais quand j’ai vu que je me frottais potentiellement à des loups, je me suis dit qu’il valait mieux pas qu’ils pensent que je cherche à leur nuire, j’ai donc cessé. Je suppose que poser la question directement auprès de la brunette n’éveillera pas les mêmes genres de soupçons. En sachant que je suis honnête quand je dis que je n’ai que faire des conflits inter espèces, je veux seulement être sûr que Nath est en sécurité là où il taf … et sans doute qu’il me tuerait s’il apprenait que je me fais du mouron pour ce genre de chose !

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Il prend plutôt bien ma vanne sur son régime alimentaire et je lui souris lorsqu'il réplique avec le steak saignant.

- Oui je suis d'accord, c'est incomparable comme goût.

Ça partait de la blague, mais ça va devenir glauque cette histoire.
Un repère de détective ou de vampires, tout dépend comment on voit les choses. Perso je m'en fiche pas mal, tant que les dits vampires ne nous cherchent pas des noises, on accepte tout le monde ici. Et je parierais gros sur le fait que Luther pense comme moi, ou plutôt que je pense comme lui. J'ai passé ma vie auprès de cet homme, et je lui ressemble bien plus que je ne veux l'admettre.

- Oui on est pareil tous les deux. Deux je pense qu'il s'en remettra. Après faudrait pas amené votre nid entier non plus, là il va nous faire une syncope.

Je souris. Je ne sais pas trop quoi dire. C'est le petit ami de Nath et j'adore Nath, alors je compte vraiment faire de mon mieux pour que ça se passe bien. Et Nath sait qui nous sommes, alors s'il l'a amené ici, c'est qu'il sait que l'on peut bien s'entendre avec lui, aussi bien moi que Luther. Enfin, même lui ne sentant pas le mieux du monde avec le patron, mais il sait pourquoi, et j'imagine du coup qu'il sait ce qui peut lui plaire. Enfin je me mélange les pinceaux et on peut supposer que le sorcier en a rien à péter de ce que pense ou veux l'alpha du meute de loup-garou et à sa place je ferais pareil, mais ... je sais pas, Nath m'a déjà dit plus d'une fois que sans Luther il en serait pas là où il en est et qu'il lui était reconnaissant en gros, alors pourquoi pas. Enfin j'en sais rien et franchement c'est pas mon problème en vrai. Si Luther les accepte tant mieux, si il me demande de les virer, je n'aurais pas vraiment le choix d'exécuter ses ordres.

- Il t'a jamais rien dit à toi, je vois pas pourquoi il dirait quelques choses à ton pote. Tant que vous cherchez pas les embrouilles, ça devrait le faire.

On m'appelle au bar, je dois m'absenter quelques instants. Je reviens aussi vite que possible, après avoir servit deux trois verres. On a pas finit notre discussion lui et moi.

- Alors je te l'amène ce steak ? Tu boiras quelques choses avec ça ? Oui parce que autant des vampires ils s'en fou, autant des gens qui consomment pas, ça risque de le mettre de travers !

Il a son verre entre les mains depuis un moment, je peux donc supposer qu'il est finit. Comment ça j'insiste à la consommation, il est dans un bar après tout, donc il est pas là pour rien. Enfin je suppose ! Y a longtemps que je suis pas sortit avec quelqu'un, je sais plus ce que ça fait que l'autre s'intéresse à ce que vous faites de vos journées ou soirées en l’occurrence pour Nath.

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Je lui souris une fois encore.

« Ben l’entièreté de mon « nid » c’est Silas et moi. Et définitivement pas du genre à chercher la bagarre. »

Sauf si on s’en prend à Nath, mais ça, je me garde bien de l’avouer. J’ai tendance à perdre la raison lorsqu’il s’agit de mon homme et je pense pas que le patron apprécierait de voir le vampire s’énerver dès que son barman se confronte à un client difficile … ou potentiellement qui le drague un peu trop … Nope … définitivement, je préfère pas voir mon chéri à l’œuvre lorsqu’il entre dans le jeu de ses clients. Ça sert à rien de se mentir, j’le connais trop bien pour savoir qu’il continu de le faire, même si jamais plus cela ne va au-delà du simple flirt.

Surpris par sa proposition lorsqu’elle revient, je me lance dans une confidence qui ne concerne que moi comme vampire, tout du moins, pas que je sache que d’autres vampires en souffrent plus que cela.

« Non, merci, je plaisantais. En fait j’supporte plus de manger rien d’autre que … du sang. Et je dirais pas non à une piña colada. »

Dans sa grande mansuétude, Dieu me permet de consommer de l’alcool aussi. Encore un point qui fait que sortir avec un barman est juste parfait si on oublie qu’il m’en faut quand même des litres avant d’atteindre un état d’ébriété qui d’autant plus ne dur jamais bien longtemps. Je cache pas que les cocktails d’Axel mélangeant hémoglobine et rhum sont plus efficaces à me retourner la tête et la jeune femme semble l’avoir bien compris. Sans doute un pécher supplémentaire qui m’enverra juste un peu plus vite en Enfer, mais bon.

Avant même que la jeune femme puisse se dire qu’elle aille chercher ma commande, Nath arrive avec un verre de mojito à la main. Ok, c’est pas la piña colada, mais y’a du rhum et Nath ne connaît que trop bien mon amour pour cet alcool.

« Bon ben parfait ! Merci chéri ! »

Je prends le verre et le baiser furtif qui va avec. J’ai l’extra dont beaucoup de client rêverait et un sourire niais vient poindre sur mon faciès à cette pensée. Me tournant vers la louve, je poursuis :

« Piña colada au prochain round ! »

Ça sera l’excuse aussi pour flâner un peu plus longtemps dans les parages et fantasmer sur mon mec pendant qu’il taf. J’suis en mode procrastination totale et j’l’assume.

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Je prends mon quart de travail sans être réellement en capacité de me concentrer, mon regard n'ayant de cesse de dériver vers la table où Dante s'est installé. Bientôt ça va pas être à cause de sa nature que Luther va le virer, mais à cause de l'inutilité de son employé quand il est dans le coin. Et si j'y regarde d'un peu plus près quand Ava finit par le rejoindre, je me fait bientôt rappeler à l'ordre par un client ayant commandé son verre trente secondes plus tôt et n'ayant pas spécialement envie d'attendre. Notez qu'il va attendre, j'aime pas qu'on pense me diriger au sifflet. Je fais donc mine de ne pas l'avoir remarqué, mais je me remet tout de même au boulot avec le reste des clients du comptoir, jusqu'à revenir vers lui pour lui donner sa commande malgré sa mauvaise humeur évidente. Celui-là, je vais me faire un plaisir de le foutre dehors si il décide de rester jusqu'à pas d'heure. Bref. La soirée se passe sans plus d'anicroche jusqu'à ce que je réussisse à profiter d'un moment d'accalmie pour quitter mon poste et préparer un mojito pour mon cher et tendre. La bouteille de rhum de l'appart descend bien trop vite (surtout étant donné que j'accroche pas tellement à cet alcool) pour que je connaisse pas un minimum ses gouts, après tout.

Je pose le verre dans l'un des rares espaces vides entre les feuilles posées sur la table avant de lui voler un baiser et me redresser, croisant le regard d'Ava .

"J'te sers un truc? C'est lui qui paye. Quitte à t'accaparer toute la soirée, on va pas te laisser le gosier sec quand même!"

Ouais enfin, c'est Dante qui paye, y a quand même une probabilité assez forte que j'oublie de le faire payer. Parce qu'après tout, on m'en paye assez dans une soirée, de verres, pour que j'puisse en glisser un à mon mec et un à ma collègue... qui s'en fait payer pas mal non plus en passant. Si on les prenait tous, on tiendrait surement pas debout à la fin de la soirée, malgré l'habitude.

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Dante me signifie qu'il plaisantait et qu'il ne supporte plus la nourriture humaine. Je ne pensais pas que c'était à ce point. Je sais que les vampires n'en sont pas frillant, mais je croyais qu'ils gardaient un ou deux bons plats sous la dent, il s'avère que non, cette idée reçue n'était que ça une idée. Enfin c'était sans compter sur l'alcool, ça visiblement Dante apprécie toujours. Et plus particulièrement le rhum. Il me demande une pina colada que je suis sur le point d'aller demander à Nath, lorsque ce dernier arrive avec un mojito. Bon bin ça c'est fait !

Je les regarde faire tous les deux, attendrie par leur complicité. Autant je suis pas prête de me caser, autant je suis toujours admirative devant les couples amoureux comme eux le sont; pour qui l'un et l'autre pourrait déplacé des montagnes; eux l'ont déjà fait d'ailleurs.
Nath me propose un verre.

- Je ne peux pas me permettre de prendre un verre d'alcool de plus, j'en suis déjà à trois ce soir. Enfin je pourrais bien sur, un soir prévenant de la pleine lune, mais là non, merci. Après je ne dis pas non à un petit soda de ta composition.

Si je n'ai pas peur d'évoquer la pleine lune à voix haute ? Les humains lambda ne me croirait pas, même si je leur hurlais la vérité et les créatures ne révèleront rien.

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